AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Antoine Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 29 septembre 1997 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre), au profit :
1 / du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre, domicilié en son parquet, tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre, place de l'Eglise, 97110 Pointe-à-Pitre,
2 / de Mme Anne X..., mandataire judiciaire, demeurant Village Viva, La Digue Bas du Fort, 97190 Le Gosier, agissant ès qualités de liquidateur de la société à responsabilité limitée Mikado literie,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 3 octobre 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Besançon, conseiller rapporteur, M. Tricot, conseiller, M. Jobard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Besançon, conseiller, les observations de Me Roger, avocat de M. Y..., de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de La Varde, avocat de Mme X..., ès qualités, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Basse-Terre, 29 septembre 1997), que la société Mikado-Literie (la société) ayant été mise en redressement judiciaire le 10 février 1995, Mme X..., représentant des créanciers, a demandé que des sanctions patrimoniale et personnelle soient prononcées contre M. Y..., gérant de la société ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'il devra supporter la totalité du passif de la société arrêté à la somme de 260 871,68 francs et prononcé contre lui l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale et toute personne morale pour une durée de dix ans, alors, selon le pourvoi, 1 ) que l'état de cessation des paiements est l'impossibilité pour l'entreprise de faire face au passif exigible avec l'actif disponible ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est bornée à relever le montant des dettes de la société pour affirmer que compte tenu de leur importance, elles établissent qu'au moment de la cession l'entreprise était déjà en état de cessation des paiements ; que la cour d'appel, qui n'a pas constaté que l'actif disponible ne permettait pas de faire face à ce passif, a violé l'article 3 de la loi du 25 janvier 1985 ; 2 ) que l'article 187, alinéa 2, de la loi de 1985 prévoit que le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne qui aurait "omis de tenir une comptabilité conformément aux dispositions légales ou fait disparaître tout ou partie des documents comptables" ; que l'article 192 prévoit que ces mêmes fait peuvent entraîner l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler toute entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les bilans des trois dernières années avaient bien été établis mais a considéré qu'il n'y avait "aucune autre comptabilité permettant de connaître le nom des créanciers" et que M. Y... ne se serait pas présenté aux rendez-vous de vérification du passif, faits non sanctionnés par les textes susvisés ; qu'il s'ensuit qu'en réprimant de tels faits sur le fondement des articles 187, alinéa 2, et 192 de la loi de 1985, la cour d'appel a violé ces textes ; 3 ) que M. Y... avait versé aux débats les justificatifs des versements de la somme de 200 000 francs avec l'indication du nom des créanciers ; que la cour d'appel, qui a affirmé que M. Y... ne justifiait pas de l'utlisation des 200 000 francs du prix payé en dehors de la comptabilité du notaire sans examiner même sommairement ces documents, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé, par motifs adoptés, que M. Y... produit, "en guise de pièce comptable", une attestation écrite à la main dont il résulte qu'il aurait acquitté plusieurs sommes, l'arrêt constate l'impossibilité pour celui-ci de produire des factures justificatives ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt, qui relève, par motifs adoptés, qu'il n'existe aucune pièce comptable pour la période d'activité du 1er janvier au 1er octobre 1993, date de la vente du fonds de commerce, et que la comptabilité produite est manifestement incomplète, retient que le grief prévu par l'article 182.7 , de la loi du 25 janvier 1985 est caractérisé ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, abstraction faite du moyen inopérant critiqué par la première branche, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait dans sa troisième branche, ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille.