REJET des pourvois formés par :
- X..., Y...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Montpellier, en date du 5 septembre 2000, qui, dans l'information suivie notamment contre eux, des chefs d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, complicité et recel de ce délit, a rejeté la requête en annulation d'actes de la procédure présentée par X...
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle du 30 octobre 2000, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
I. Sur le pourvoi de Y... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II. Sur le pourvoi de X... :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 40 du Code de procédure pénale et des articles 485 et 593 du même Code, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, violation de l'ordonnance du 1er décembre 1986, violation des droits de la défense, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en nullité de la procédure présentée par X... ;
" aux motifs qu'"il est constant que lors de la transmission, dans le cadre des dispositions de l'article 40 du Code de procédure pénale, d'un rapport de la DDCCRF au procureur de la République de Perpignan (D. 1 et D. 2) les pièces visées en annexes de ce rapport n'ont pas été communiquées, pas plus d'ailleurs que l'avis technique donné par l'administration centrale, avis visé par la lettre du directeur départemental de la DDCCRF (D. 2) ; que si le requérant soutient qu'il s'agit en l'espèce d'une violation grave des droits de la défense, force est d'observer que ces pièces non annexées et cet avis technique ne correspondent pas à la procédure pénale mais à la procédure fondée sur l'ordonnance du 1er décembre 1986 tendant à la saisine éventuelle du conseil de la Concurrence et, dès lors, les griefs exposés par le requérant restent hors de la saisine de la chambre d'accusation ; que de surcroît, un certain nombre de ces pièces ont été versées à la procédure pénale après l'audition par les services du SRPJ des inspecteurs de la DDCCRF ayant établi le rapport communiqué au Parquet (D. 49), qu'il s'ensuit que, contrairement aux affirmations portées dans la requête en nullité, les parties ont eu connaissance de ces documents et ont pu les discuter devant le juge d'instruction ; que la dénonciation de faits criminels ou délictuels au procureur de la République, telle que visée à l'article 40 du Code de procédure pénale n'est soumise à aucune forme particulière et que, de surcroît, les termes de l'article 40 du Code de procédure pénale font l'objet d'une interprétation extrêmement large ; que l'organisation hiérarchique de la DDCCRF a entraîné que le directeur départemental a acquis, au vu de l'enquête menée par les inspecteurs placés sous son autorité, la connaissance qu'une infraction avait pu être commise ; qu'il pouvait donc la dénoncer au ministère public (D. 2) dans les formes qu'il désirait, en l'espèce en adressant copie du rapport dressé par les inspecteurs (D. 1) et le fait que la dénonciation n'a pas été directement faite par les inspecteurs qui avaient dressé le rapport n'est pas de nature à faire grief aux parties et ne peut donc entraîner la nullité des pièces (D. 1 et D. 2) ; qu'au vu des renseignements qu'il obtenait ainsi, et qui laissaient présumer l'existence d'une infraction, le procureur de la République de Perpignan a, par soit-transmis, ordonné l'ouverture d'une enquête préliminaire confiée au SRPJ et que ce n'est qu'à la suite de cette enquête, que, par réquisitoire introductif du 9 février 1999, répondant aux exigences de la loi, qu'une information a été ouverte ; qu'aux termes de ce réquisitoire, ce n'est pas le rapport de la DDCCRF qui fonde les poursuites pénales mais l'enquête menée par le SRPJ, laquelle enquête n'est atteinte d'aucun vice pouvant entraîner sa nullité ;
" alors que, d'une part, l'absence au dossier pénal de pièces visées en annexe du rapport transmis par la DDCCRF au procureur de la République de Perpignan, ainsi que de l'avis technique donné par l'administration centrale, expressément constaté par la chambre d'accusation, caractérise une atteinte grave aux droits de la défense de X..., dès lors que les poursuites ont été déclenchées à partir des faits constatés dans les documents manquants au dossier ; qu'en refusant de reconnaître l'existence d'une violation des droits de la défense, la chambre d'accusation a violé les textes visés au moyen ;
" alors que, d'autre part, dès lors que le rapport administratif rédigé par les enquêteurs de la DDCCRF et transmis au procureur de la République le 16 juillet 1996, faisait expressément référence au procès-verbal de communication de documents du 12 mars 1996, et que les poursuites ont, notamment, été déclenchées sur le fondement de ce procès-verbal du 12 mars 1996, il incombait à la chambre d'accusation d'en apprécier la validité ; qu'en refusant de procéder à cet examen, la chambre d'accusation a, de nouveau, violé les droits de la défense et les textes visés au moyen ;
" alors, enfin, que la transmission par le directeur départemental de la DDCCRF au procureur de la République du rapport administratif rédigé par les enquêteurs de la DDCCRF assorti d'un avis technique de l'Administration centrale ne répond pas aux exigences de l'article 40 du Code de procédure pénale, qui prévoit une implication personnelle du fonctionnaire ayant acquis, dans l'exercice de ses fonctions, la connaissance d'un crime ou d'un délit, c'est-à-dire, en l'espèce, les enquêteurs de la DDCCRF ; qu'en jugeant, néanmoins, que la dénonciation au procureur de la République, dont elle constatait qu'elle n'avait pas été faite par les inspecteurs ayant dressé le rapport, était régulière, la chambre d'accusation a violé l'article 40 du Code de procédure pénale et les textes visés au moyen " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure, qu'au cours d'une enquête effectuée par les fonctionnaires de la Direction départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la répression des Fraudes (DDCCRF) sur les pratiques anticoncurrentielles des principales entreprises de travaux publics du département des Pyrénées-Orientales, en application des articles 45 et suivants de l'ordonnance du 1er décembre 1986, il est apparu que des irrégularités avaient été commises à l'occasion de la passation d'un marché de travaux publics par la commune de Saint-Cyprien avec la société Z..., le 6 juin 1994 ;
Que le 16 juillet 1996, le directeur départemental de la Concurrence a transmis au procureur de la République un rapport établi par des inspecteurs de la DDCCRF, en application de l'article 40 du Code de procédure pénale, exposant ces irrégularités ;
Qu'après avoir ordonné une enquête préliminaire, confiée au service régional de police judiciaire, le procureur de la République a requis l'ouverture d'une information pour favoritisme, complicité et recel de ce délit ; que X... a été mis en examen de ce dernier chef ;
Que le 18 octobre 2000, l'intéressé a saisi la chambre d'accusation d'une demande en annulation de pièces de la procédure ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, la chambre d'accusation relève, d'une part, que les documents visés en annexe du rapport des inspecteurs de la DDCCRF ne concernent pas la procédure pénale mais celle fondée sur l'ordonnance du 1er décembre 1986 tendant à la saisine éventuelle du conseil de la Concurrence et, d'autre part, que le procès-verbal du 12 mars 1996, dont la nullité est invoquée, ne figure pas au dossier de l'information si ce n'est comme pièce jointe à la requête en nullité ; qu'enfin, elle énonce que la circonstance que la dénonciation n'a pas été directement faite par les inspecteurs qui avaient dressé le rapport, ne fait pas grief aux parties et ne peut entraîner la nullité des pièces de la procédure ;
Qu'en cet état, et dès lors que la dénonciation au procureur de la République, par le supérieur hiérarchique des enquêteurs de la DDCCRF, des faits délictueux qu'ils avaient constatés dans l'exercice de leurs fonctions, répond aux exigences de l'article 40 du Code de procédure pénale, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans méconnaître aucun des textes invoqués au moyen, lequel doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.