Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 00-42.200, 00-42.201, 00-42.202, 00-42.203 et 00-42.204 ;
Sur le moyen unique :
Attendu que Mmes X..., A..., Y..., B... et M. Z..., salariés grévistes de la Société des bains de mer de Poe se sont vu notifier par lettre du 28 juin 1999 leur licenciement pour faute lourde ; qu'il leur était reproché d'avoir participé et d'être personnellement impliqués dans un mouvement illicite ayant donné lieu à la mise en place de piquet de grève à l'entrée de l'hôtel et à la fermeture par apposition de chaînes cadenassées des autres accès de l'établissement en interdisant aussi l'accès normal aux clients, salariés et fournisseurs ; que les salariés ont saisi le tribunal du travail en sa formation des référés pour qu'il fasse cesser le trouble manifestement illicite résultant des licenciements pour fait de grève en l'absence de toute faute lourde pouvant être imputée à chacun d'eux et d'ordonner leur réintégration ;
Attendu que les salariés font grief aux arrêts attaqués (Nouméa, 20 janvier 2000, rendus en référé) d'avoir refusé de constater la nullité de leur licenciement et de les avoir en conséquence déboutés de leur demande tendant à ce que soit prononcée leur réintégration sous astreinte, alors, selon le moyen :
1° qu'il résulte de l'article 78 de l'ordonnance n° 85-1181 du 13 novembre 1985 que, sauf faute lourde, tout licenciement pour exercice normal du droit de grève est nul de plein droit ; qu'il s'évince de ce principe que seul le caractère manifeste de l'illicéité de la grève ou de l'existence d'une faute lourde peut s'opposer à la réintégration qui est de droit ; que le doute subsistant doit conduire le juge des référés à ordonner la réintégration ; que la cour d'appel qui, pour débouter la demanderesse de sa demande, s'est fondée sur le fait que la licéité de la grève n'était pas manifeste, a méconnu la portée du texte susvisé et l'a violé ;
2° que la cessation concertée du travail pour appuyer des revendications professionnelles ayant fait l'objet d'un précédent mouvement de revendication et non satisfaites constitue une grève qui ne saurait perdre son caractère licite du fait qu'elle n'a été précédée d'aucun avertissement écrit à l'employeur ; que la cour d'appel qui a constaté que la Société des bains de mer de Poe avait été oralement informée le jour même du déclenchement de la grève, qu'elle était fondée sur le cahier de revendications du 10 mars 1999, revendications qui, pour six d'entre elles, concernaient les conditions de travail, mais s'est fondée sur l'absence d'écrit et le caractère imprécis de l'assignation pour dire que la grève n'apparaissait pas d'une licéité manifeste, a violé l'article 78 de l'ordonnance n° 85-1181 du 13 novembre 1985 ;
3° que la faute lourde susceptible de justifier le licenciement d'un salarié gréviste s'entend d'une participation personnelle du salarié aux faits illicites ; qu'il était reproché aux demandeurs dans la lettre de licenciement d'avoir depuis le 29 mai 1999, participé à un mouvement qui avait procédé à la mise en place d'un piquet de grève à l'entrée de l'hôtel ; que la cour d'appel qui a tenu pour établie la participation active des salariés aux agissements litigieux sans relever le moindre fait précis qui lui soit personnellement imputable ni préciser les éléments sur lesquels elle se basait pour fonder sa conviction, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 78 de l'ordonnance n° 85-1181 du 13 novembre 1985 ;
Mais attendu que constitue, en principe, une faute lourde justifiant le licenciement d'un salarié gréviste, l'atteinte à la liberté du travail ; d'où il suit que la cour d'appel ayant constaté que chacun des salariés concernés avait personnellement participé au blocage des accès de l'hôtel, empêchant les salariés non grévistes ainsi que les fournisseurs et les clients d'y accéder, a pu, par ces seuls motifs, décider que leur licenciement ne caractérisait pas un trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.