AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize janvier deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général FROMONT ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Pascal,
contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 4ème chambre, en date du 18 janvier 2001, qui, pour infraction à la législation sur les stupéfiants en récidive et contrebande, l'a condamné à 5 ans d'emprisonnement et à des pénalités douanières ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation de cassation, pris de la violation des articles 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 510 et 591 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'affaire a été jugée par trois magistrats qui avaient déjà, dans le cadre d'un premier arrêt du 6 juillet 2000 concernant les mêmes faits mais d'autres personnes, porté une appréciation sur la culpabilité de Pascal X... ;
" alors qu'il résulte de l'article 6. 1 de la Convention européenne des droits de l'homme que toute personne a droit à ce que sa défense soit entendue par un tribunal impartial ; que l'exigence d'impartialité, qui doit s'apprécier objectivement, n'est pas garantie lorsque la cour d'appel est composée de trois magistrats qui ont déjà porté une appréciation sur la culpabilité du prévenu ;
qu'en l'espèce, la cour d'appel était composée des mêmes magistrats que ceux qui avaient, par un arrêt du 6 juillet 2000, statué à l'égard des autres prévenus, impliqués dans la même affaire de trafic de stupéfiants, et qui avaient, après avoir précisé qu'Aïcha Y... était la concubine de Pascal X..., énoncé " qu'elle ne pouvait ignorer le trafic auquel se livrait son compagnon " ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel ayant jugé Pascal X... ne présentait pas les garanties objectives d'impartialité requises par l'article 6. 1 de la Convention susvisée " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, saisie des recours de plusieurs prévenus, dont Pascal X..., la cour d'appel a, par arrêt du 6 juillet 2000, disjoint la cause, renvoyé l'affaire concernant ce dernier, non comparant, à une date ultérieure et statué à l'égard des autres prévenus en énonçant, notamment, qu'Aïcha Y..., concubine de l'intéressé, " ne pouvait ignorer le trafic auquel se livrait son compagnon " ; que Pascal X... a comparu à l'audience du 2 novembre 2000 et, par arrêt du 18 janvier 2001, rendu par les mêmes magistrats, a été déclaré coupable des faits reprochés ;
Attendu que le demandeur ne saurait invoquer la violation de l'article 6. 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, dès lors que, dans son arrêt du 6 juillet 2000, la juridiction du second degré ne s'est pas prononcée sur la valeur des charges existant contre lui ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-36 et 222-37 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'importation, de détention et de transport de produits stupéfiants, en état de récidive légale, et l'a condamné à la peine de cinq ans d'emprisonnement ;
" aux motifs que les portables de A... étaient en contact avec le poste fixe de la mère de Pascal X... (deux appels), ainsi qu'avec le portable de Laïd Y..., père de la concubine de Pascal X... (onze appels) ; que Cédric Z... a précisé que celui qui lui remettait les paquets litigieux le rejoignait sur un booster rouge ; que Yasmina Y... prêtait son scooter à Pascal X..., et était propriétaire d'un scooter rouge avant d'en acquérir un bleu ; que Pascal X... est donc intimement lié au réseau ; que si Cédric Z... et Ahmed B... ont affirmé ne pas connaître Pascal X..., ces précautions démontrent que ce dernier est un membre éminent du réseau ;
" alors, d'une part, qu'en déduisant la prétendue implication de Pascal X... dans le trafic de stupéfiants poursuivi du fait que des contacts téléphoniques ont été établis entre les membres du réseau (qui ont déclaré ne pas le connaître) et un poste fixe appartenant à sa mère et un portable appartenant au père de sa concubine, sans relever à son encontre aucun fait concret de participation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors, d'autre part, que les juges du fond n'ont relevé à l'encontre de Pascal X... aucun fait de passage de frontière et d'introduction en France de produits stupéfiants ; qu'il s'ensuit que la déclaration de culpabilité du chef d'importation de stupéfiants n'est pas légalement justifié ;
" alors, enfin, que le fait que Pascal X... a pu emprunter le scooter d'un membre de la famille de sa concubine, Aïcha Y..., au demeurant relaxée des fins de la poursuite, est insuffisant pour caractériser des faits de détention et transport de produits stupéfiants ; qu'il s'ensuit que la déclaration de culpabilité n'est pas légalement justifiée " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 414 et 417 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pascal X... coupable d'importation en contrebande de produits stupéfiants, en le condamnant, solidairement avec Cédric Z..., Ahmed B..., Karim A..., Taheb C... et Mohamed D..., au paiement d'une amende douanière de 690 000 francs, somme égale à une fois la valeur de la marchandise saisie ;
" aux motifs qu'il convient de faire droit aux conclusions de l'administration des Douanes ;
" alors, d'une part, que les éléments constitutifs du délit d'importation en contrebande sont distincts de ceux du délit d'importation illicite de stupéfiants ; qu'en se bornant à déclarer établis les faits d'importation illicite de produits stupéfiants et à énoncer qu'il convenait de faire droit aux conclusions de l'administration des Douanes, sans caractériser les éléments constitutifs du délit d'importation en contrebande, et notamment la violation de la législation douanière, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors, d'autre part, que les juges du fond n'ont pas constaté que Pascal X... aurait introduit des produits stupéfiants en France, en dehors de tout contrôle douanier ; que le délit d'importation en contrebande n'est donc pas caractérisé " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Challe conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Roger, Dulin, Mmes Thin, Desgrange, MM. Rognon, Chanut conseillers de la chambre, Mme de la Lance, MM. Soulard, Samuel conseillers référendaires ;
Avocat général : Mme Fromont ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;