Statuant tant sur le pourvoi principal que sur le pourvoi incident :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 24 mars 1999), que, le 26 août 1996, trois agents des Douanes se sont présentés à bord du navire de plaisance Wapiti of the Seas, voilier battant pavillon britannique et amarré dans le port de plaisance de La Trinité-sur-Mer ; qu'au cours de la visite du navire, un des agents a découvert deux armes de la quatrième catégorie ; qu'un procès-verbal d'infraction a été dressé et qu'il a été procédé à la saisie tant des armes que du navire lui-même, Mme X... étant constituée gardien ; que la société Topmast Management, propriétaire du voilier, et Mme X... ont assigné l'administration des Douanes et l'agent judiciaire du Trésor devant le tribunal d'instance de Vannes en annulation de la saisie, lequel tribunal a rejeté leur demande par jugement du 4 décembre 1997 et a mis hors de cause l'agent judiciaire du Trésor ; que la société Topmast Management et Mme X... ont interjeté appel ; qu'infirmant la décision du premier juge, la cour d'appel a annulé les procès-verbaux consécutifs à la visite et saisie litigieuses, la mainlevée de la saisie du navire ayant été accordée entre-temps par les services des Douanes ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deux branches :
Attendu que le directeur général des Douanes fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen :
1° que, si, aux termes de l'article 64 du Code des douanes, les agents des Douanes peuvent procéder à des visites en tous lieux, même privés, sur autorisation du président du tribunal de grande instance, les articles 60 à 63 bis du Code des douanes les dispensent de demander une telle autorisation lorsqu'ils visitent un moyen de transport et, notamment, un navire, même lorsque celui-ci est doté de couchettes privatives ; que le droit de visite des moyens de transport est inhérent à la mission des Douanes et que cette mission ne pourrait être correctement exécutée s'il était nécessaire de demander à chaque fois une autorisation judiciaire ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 60 et 63 du Code des douanes ;
2° qu'un moyen de transport ne constitue pas un domicile au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'à supposer même qu'il le soit, le droit, pour les agents des Douanes, de visiter un moyen de transport sur simple réquisition est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et de la morale ; qu'en outre, il ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits de capitaine du navire puisque, si celui-ci s'oppose à la visite, les agents des Douanes ne peuvent y pénétrer qu'avec l'assistance d'un juge ou d'un officier de police judiciaire ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et les articles 60 et 63 du Code des douanes ;
Mais attendu que l'arrêt constate que le navire Wapiti of the Seas est destiné à la croisière de plaisance, qu'il est aménagé dans ce but et comporte des appartements privés pour les passagers et des cabines pour les membres de l'équipage, qu'il disposait ainsi d'aménagements intérieurs propres à assurer le confort et l'intimité des occupants pendant les longues traversées transatlantiques de loisir qu'il effectue, que les armes de quatrième catégorie ont été découvertes dans l'équipet surmontant la couchette et dans la couchette elle-même d'un compartiment servant habituellement et privativement à un des membres de l'équipage ; que la cour d'appel a pu en déduire que la visite et saisie litigieuses de ces lieux privés relevait de l'article 64 du Code des douanes et non des articles 60 et 63 du même Code et aurait dû être autorisée au préalable par le président du tribunal de grande instance ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche :
Vu l'article 38 de la loi du 3 avril 1955 ;
Attendu que, pour rejeter la demande de mise hors de cause de l'agent judiciaire du Trésor, l'arrêt retient que la présence de l'agent judiciaire du Trésor en la cause reste nécessaire pour que le présent arrêt lui soit opposable, la nullité prononcée pouvant fonder une action indemnitaire contre l'Etat ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune demande indemnitaire n'était formée contre l'Etat dans l'instance engagée devant elle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de cassation peut, en cassant sans renvoi, mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a infirmé la décision de mise hors de cause de l'agent judiciaire du Trésor, l'arrêt rendu le 24 mars 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Met hors de cause l'agent judiciaire du Trésor.