AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six novembre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de Me SPINOSI, avocats en la Cour ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Maurice,
1) contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de BASTIA, en date du 14 mai 1997, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'agressions sexuelles aggravées, a rejeté partiellement sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;
2) contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 20 mars 2002, qui, du chef précité, l'a condamné à 5 ans d'emprisonnement, 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille et 5 ans d'interdiction de séjour, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
I - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 14 mai 1997 :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 63, 77, 170, 171, 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base ;
"en ce que l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bastia du 14 mai 1997 attaqué, qui a constaté la nullité de la seconde période de la garde à vue, n'a ordonné le retrait du dossier que de certaines pièces, cotées D22 à compter du second alinéa de la page 9, D37, D38, D42 et C1 à C7 ;
"aux motifs que "la seconde partie de ladite garde à vue, à compter du 9 août 1996 à 9 heures 15, est donc irrégulière et sera annulée ; il en sera de même par voie de conséquence des actes en étant la suite ou y faisant expressément référence : procès-verbal de première comparution, mandat de dépôt et actes concernant la détention et le contrôle judiciaire, procès-verbal d'audition du mis en examen le 11 octobre 1996" ;
"alors que doivent être annulées par voie de conséquence les pièces qui ont pour support nécessaire les actes entachés de nullité ; que Maurice X... faisait valoir que les nullités qui vicient sa garde à vue devaient s'étendre à l'ensemble de la procédure subséquente et, notamment, au réquisitoire introductif du procureur de la République, lequel a un lien d'indivisibilité évident avec la garde à vue ; qu'en se bornant, ainsi, à annuler par voie de conséquence certains actes en estimant qu'ils étaient la suite ou faisaient expressément référence à la garde à vue annulée, sans s'expliquer précisément sur le point de savoir si le réquisitoire introductif ne trouvait pas son support dans l'acte entaché de nullité, la chambre d'accusation n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la régularité de la décision" ;
Attendu que la chambre d'accusation, après avoir constaté l'irrégularité de la prolongation de la garde à vue de Maurice X..., a dressé la liste des actes subséquents procédant de cette mesure et les a annulés ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les juges ont souverainement apprécié que le réquisitoire introductif, dont la garde à vue n'est pas le préalable nécessaire, a trouvé son support dans d'autres actes que ceux entachés de nullité, ainsi que la Cour de Cassation est en mesure de s'en assurer, la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
II - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 20 mars 2002 :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-27, 222-29 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Maurice X... coupable d'agressions sexuelles sur mineures de quinze ans ;
"aux motifs que, pour obtenir les faveurs sexuelles de ses nièces dont la vulnérabilité lui était connue compte tenu de leur âge, Maurice X... a utilisé un stratagème de nature à surprendre leur consentement en les invitant dans sa caravane sous le prétexte fallacieux de leur donner des bonbons et de l'argent, et d'un cadeau d'anniversaire qu'il aurait oublié d'offrir ; qu'il n'a pas davantage hésité à invoquer son état de santé déficient pour atteindre le but recherché, en prétextant que les caresses sexuelles imposées à ses nièces lui "faisaient du bien à son coeur" ;
"alors que l'élément constitutif du délit d'agression sexuelle, au sens de l'article 222-22 du Code pénal, consiste à surprendre le consentement de la victime lors de l'accomplissement de l'acte à caractère sexuel ou directement à cette fin ; qu'en considérant, en l'espèce, que Maurice X... avait eu recours à un stratagème de cette nature en invitant dans sa caravane ses nièces, qu'il savait vulnérables compte tenu de leur âge, sous le prétexte de leur donner des bonbons, de l'argent..., la cour d'appel n'a pas justifié que ce comportement, qui au demeurant se serait répété et n'était pas, en soi, de nature à forcer le consentement des fillettes, en dépit de leur âge, à subir des attouchements de nature sexuelle, caractérisait la violence, la contrainte, la menace ou la surprise, susceptibles de priver les victimes de toute résistance et de toute possibilité de se soustraire, une fois dans la caravane, à l'emprise du prévenu ;
"et alors que pas davantage le fait que le prévenu ait invoqué son état de santé déficient n'était, en soi, susceptible de caractériser l'élément de violence, menace, contrainte ou surprise au sens du texte susvisé" ;
Attendu qu'en l'état des énonciations de l'arrêt attaqué, d'où il résulte que les stratagèmes utilisés par le prévenu pour surprendre le consentement de ses petites nièces et obtenir d'elles des faveurs sexuelles caractérisent la surprise, au sens de l'article 222-22 du Code pénal, le grief allégué n'est pas encouru ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que les arrêts sont réguliers en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;