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20/11/2002 | FRANCE | N°01-60605

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 novembre 2002, 01-60605


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
LA COUR, en l'audience publique du 9 octobre 2002, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Andrich, conseiller référendaire rapporteur, MM. Coeuret, Gillet, conseillers, Mmes Slove, Farthouat-Danon, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Attendu que selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Versailles, 22 mars 2001) à l'occasion des élections professionnelles organisé

es au sein de la société Bouygues travaux publics, un protocole préélect...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
LA COUR, en l'audience publique du 9 octobre 2002, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Andrich, conseiller référendaire rapporteur, MM. Coeuret, Gillet, conseillers, Mmes Slove, Farthouat-Danon, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Attendu que selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Versailles, 22 mars 2001) à l'occasion des élections professionnelles organisées au sein de la société Bouygues travaux publics, un protocole préélectoral du 13 septembre 1999, a été homologué par un premier jugement du 6 janvier 2000, sous réserve de la décision de l'inspection du travail en ce qui concerne la répartition des sièges et des électeurs entre les collèges ; que postérieurement à la décision de l'inspecteur du travail du 2 juin 2000, le protocole préélectoral a été complété et modifié le 23 juin 2000 ; que postérieurement au déroulement des élections, la FNTC-CGT a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation des élections qui se sont déroulées le 26 octobre 2000 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la Fédération nationale des travailleurs de la construction CGT (FNTC-CGT), fait grief au jugement attaqué de l'avoir déboutée de sa demande, en annulation des élections des membres du comité d'établissement et des délégués du personnel premier et second collège, alors, selon le moyen, que :
1 ) la seule circonstance qu'en présence d'un protocole d'accord préélectoral, n'ayant pas reçu l'adhésion de l'ensemble des organisations syndicales représentatives, il n'ait pas été demandé au tribunal d'instance de déterminer les modalités du vote et que les opérations électorales se soient déroulées sur la base du dit protocole, ne fait pas obstacle à ce que la régularité et la conformité aux principes du droit électoral de ce protocole soient contestées à l'appui d'un recours dirigé contre ces opérations électorales ; qu'en jugeant le contraire, le tribunal d'instance a violé l'article L. 423-13 du Code du travail ;
2 ) les modalités de vote arrêtées par le tribunal d'instance, avant l'adoption du protocole litigieux ne pouvaient être modifiées que par le tribunal d'instance ou par un protocole ayant recueilli l'adhésion de l'ensemble des organisations syndicales représentatives ; qu'en estimant néanmoins que les élections avaient pu être organisées conformément à un protocole d'accord modificatif, qui n'avait pas reçu l'adhésion de la FNTC-CGT et qu'il qualifie néanmoins d' "inattaquable", le tribunal d'instance a de plus fort violé l'article L. 423-13 du Code du travail ;
3 ) subsidiairement, les principes généraux du droit électoral sont applicables dans le silence du protocole électoral ; que les dispositions du protocole d'accord du 23 juin 2000, disposant que les organisations syndicales ne peuvent désigner qu'un seul délégué pour surveiller le travail des bureaux centralisateurs, ne peut être interprété comme faisant obstacle à la libre circulation des électeurs et au contrôle que ceux-ci doivent pouvoir exercer sur les opérations de dépouillement ;
que le tribunal d'instance ne pouvait, dès lors écarter le moyen déduit de ce que les électeurs n'avaient pu exercer ce contrôle, en excipant de ce que le protocole n'avait pas été critiqué en temps utile ; qu'en statuant par un tel motif inopérant, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 423-13 du Code du travail, ensemble des principes généraux du droit électoral ;
4) les protocoles d'accord successifs ne permettaient de fixer à 15 heures l'heure de fermeture des bureaux de vote fixe, que dans la mesure où des aménagements d'horaires ne permettaient pas à l'ensemble des salariés de voter avant midi ; que le syndicat exposant reprochait à l'employeur d'avoir fixé à 15 heures, l'heure de fermeture des bureaux de vote de Météor et de Choisi-le-Roi sans justifier de l'impossibilité de tels aménagements ; qu'en statuant, pour rejeter ce moyen par des motifs inopérants déduits des horaires normaux de travail et de la nécessité d'accueillir les salariés en mission, le Tribunal a statué par motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 423-13 du Code du travail ;
5 ) le tribunal d'instance ne pouvait constater que le report de l'heure de fermeture de ces bureaux de vote n'avait pas fait obstacle au contrôle effectif par les délégués de la CGT, des opérations de dépouillement des votes par correspondances, elles-mêmes reportées à 17 heures au lieu de 14 heures, sans rechercher, comme l'y invitait le syndicat exposant, si ces délégués, qui n'étaient pas informés de ce report, n'avaient pas été contraints de quitter les sites de Météor et de Choisy-le-Roi avant la fin des opérations de vote et de dépouillement de ces bureaux de vote ; qu'à défaut, le tribunal d'instance a de plus fort privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 423-13 précité et de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu d'abord, que l'homologation par une décision judiciaire d'un protocole préélectoral, ne fait pas obstacle à ce que des modifications négociées entre le chef d'entreprise et les organisations syndicales intéressées lui soient apportées et que l'absence d'unanimité de ce protocole modifié se substituant au premier, a pour seule conséquence de permettre à la partie non signataire qui conteste ses modalités, de saisir le tribunal d'instance ;
Attendu ensuite, qu'en l'absence de saisine du tribunal d'instance d'une contestation préalable au déroulement des élections, le syndicat appelé régulièrement à la négociation qui présente des candidats est réputé avoir adhéré au protocole préélectoral qu'il n'a pas signé ; que le tribunal d'instance qui a constaté que la FNTC-CGT avait présenté des candidats, a décidé à juste titre qu'elle n'était plus en droit de contester l'application des modalités prévues au protocole d'accord négocié entre les partenaires sociaux et signé le 26 juin 2000 ;
Attendu enfin, qu'ayant constaté que le report de la fermeture des bureaux de vote était expressément prévu au protocole, que cet aménagement était nécessaire en raison de l'organisation du travail sur les chantiers, et qu'en l'espèce, le début des opérations de dépouillement ayant été également reporté, les observateurs désignés avaient pu assister aux opérations, le tribunal d'instance a légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la FNTC-CGT reproche encore au juge d'instance d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen que :
1 ) la FNTC-CGT critiquait le fait que les électeurs votant par correspondance avaient dû remettre leurs votes à des collaborateurs de la société chargée de leur transmission à l'huissier ; que le Tribunal ne pouvait, pour écarter ce grief, se borner à invoquer les termes des protocoles d'accord successifs, lesquels prévoyaient seulement que le retour de ces votes étaient "à la charge" de la société Bouygues travaux publics, ce qui n'obligeait celle-ci qu'à en assumer le coût et l'organisation matérielle, mais ne l'autorisait pas à obliger ses électeurs à remettre leurs enveloppes contenant leurs votes à l'un de ses collaborateurs ; qu'en statuant par un tel motif inopérant, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions de la FNTC-CGT, si le fait que les votes aient été ainsi remis à un collaborateur de la société, n'était pas en lui-même susceptible d'affecter le secret du vote et la sincérité de celui-ci, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 423-13 du Code du travail ;
2 ) toute irrégularité portant atteinte au secret du vote compromet la loyauté du scrutin dans son ensemble ; qu'en retenant pour rejeter le grief précité, ainsi que celui déduit de ce que les clés des urnes des bureaux de vote de Challenger et des bureaux de vote itinérants aient été laissés à plusieurs reprises sans surveillance, que la FNTC-CGT ne serait pas en mesure de démontrer que le résultat des opérations électorales aurait été faussé, le Tribunal qui a, à nouveau, statué par un motif inopérant, a encore une fois privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 423-13 du Code du travail ;
3 ) le Tribunal, qui pour affirmer que la FNTC-CGT ne serait pas en mesure de démontrer que le résultat des opérations électorales aurait été faussé, se borne à faire état des résultats obtenus par celle-ci, sans rechercher si les irrégularités dénoncées n'étaient pas susceptibles d'affecter un nombre de votes suffisant pour modifier lesdits résultats, a de plus fort privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 423-13 précité ;
Mais attendu d'abord, que le tribunal d'instance qui a constaté que les modalités de retour des votes par correspondance prévues au protocole préélectoral avaient été respectées et que durant les absences de l'huissier contrôlant les opérations, l'enveloppe contenant les clefs des urnes restait sous la surveillance des membres des bureaux de vote, a pu décider qu'aucune atteinte au secret ou à la sincérité du vote n'était démontrée ;
Et attendu ensuite, qu'ayant fait ressortir en relevant les résultats obtenus par la FNTC-CGT, que les irrégularités dénoncées qui, en l'espèce, ne constituaient pas des irrégularités qui par nature emportent annulation du scrutin, n'avaient eu aucune incidence sur les résultats de celui-ci, le tribunal d'instance a légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Rejette les demandes formées en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 01-60605
Date de la décision : 20/11/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Opérations électorales - Modalités d'organisation et de déroulement - Protocole d'accord préélectoral - Homologation judiciaire - Effets - Limites .

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Opérations électorales - Modalités d'organisation et de déroulement - Protocole d'accord préélectoral - Conclusion - Unanimité - Défaut - Portée

TRIBUNAL D'INSTANCE - Compétence - Compétence matérielle - Elections professionnelles - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Opérations électorales - Modalités d'organisation et de déroulement - Fixation - Condition

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Opérations électorales - Modalités d'organisation et de déroulement - Protocole d'accord préélectoral - Adhésion - Condition

L'homologation judiciaire d'un protocole préélectoral ne fait pas obstacle à ce que des modifications négociées entre le chef d'entreprise et les organisations syndicales lui soient apportées.. L'absence d'unanimité du protocole ainsi modifié se substituant au premier, permet à la partie non signataire qui en conteste les modalités de saisir le tribunal d'instance en l'absence de saisine préalable au déroulement des élections, l'organisation syndicale, appelée régulièrement à la négociation, qui présente des candidats, est réputée, bien que non signataire, avoir adhéré au protocole préélectoral.


Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Versailles, 22 mars 2001

A RAPPROCHER : Chambre sociale, 2002-01-08, Bulletin 2002, V, n° 6, p. 5 (rejet) ; Chambre sociale, 2002-03-20, Bulletin 2002, V, n° 97 (2), p. 105 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 nov. 2002, pourvoi n°01-60605, Bull. civ. 2002 V N° 348 p. 340
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 V N° 348 p. 340

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Andrich.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Roger et Sevaux, la SCP Bachellier et Potier de la Varde, la SCP Gatineau, la SCP Masse-Dessen et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.60605
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