AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi principal :
Sur les deux moyens, réunis :
Attendu que M. X..., salarié de la société Nordon, a été atteint d'une asbestose numérotée 30 au tableau des maladies professionnelles ; qu'après enquête, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) a informé la société Nordon de sa décision de prise en charge de la maladie professionnelle sans que celle-ci ait saisi la commission de recours amiable ; qu'ultérieurement, M. X... a formulé une demande complémentaire en reconnaissance de la faute inexcusable portée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale après échec de la tentative de conciliation prévue par l'article L.452-4 du Code de la sécurité sociale ;
Attendu que la Caisse fait grief à l'arrêt attaqué (Nancy, 5 décembre 2000) d'avoir infirmé le jugement et déclaré inopposable à l'employeur la reconnaissance de faute inexcusable, privant la Caisse de son action récursoire, alors selon les moyens :
1 / qu'en application des articles R.142-1 et R.142-18 du Code de la sécurité sociale, les litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale doivent obligatoirement être soumis à la commission de recours amiable avant d'être portés devant le juge ; qu'à défaut de procédure gracieuse, le moyen tendant à remettre en cause la décision prise par un organisme de sécurité sociale est déclaré irrecevable ; qu'au cas d'espèce, en déclarant recevable, en l'absence de procédure amiable, le moyen de la société Nordon tiré de l'inopposabilité à son égard de la décision de la CPAM, les juges d'appel ont violé les articles R.142-1, R.142-18 et L.452-4 du Code de la sécurité sociale ;
2 / que si les parties à un acte ne peuvent pas s'en prévaloir à l'encontre d'un tiers dès lors que cet acte lui est inopposable, en revanche, les obligations qui existent, indépendamment de l'acte déclaré inopposable, entre les parties et ce tiers ne sont affectées ni dans leur existence, ni dans leurs modalités ; qu'au cas d'espèce, la CPAM s'est bornée, le 17 juin 1997, à reconnaître le caractère professionnel de la maladie de M. X..., sans prendre parti sur l'existence d'une faute inexcusable de la société Nordon ; qu'en décidant que l'inopposabilité de la décision de la CPAM de Nancy avait pour conséquence de laisser à sa charge l'indemnisation complémentaire due en cas de faute inexcusable et de la priver de son action récursoire prévue à l'article L.452-3 du Code de la sécurité sociale, les juges d'appel ont violé les articles R.441-10, L.452-4 du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu, d'abord, que le fait pour un employeur d'opposer à la demande formée contre lui par son salarié, ou par les ayants droits de celui-ci, en vue d'obtenir une indemnisation complémentaire en raison de sa faute inexcusable, l'inopposabilité à son égard de la décision prise par la Caisse de reconnaître le caractère professionnel de la maladie, qui ne tend pas à remettre en cause cette décision, ne constitue pas une réclamation contre une décision prise par un organisme de sécurité sociale au sens de l'article R.142-1 du Code de la sécurité sociale, de sorte que cet employeur n'est pas tenu de saisir la commission de recours amiable préalablement à l'exception qu'il soulève ;
Et attendu que la cour d'appel a décidé à bon droit que, dès lors que la décision de la caisse primaire d'assurance maladie d'admettre le caractère professionnel de la maladie était inopposable à l'employeur, la Caisse ne pouvait récupérer sur ce dernier, après reconnaissance de sa faute inexcusable, les compléments de rente et les indemnités versés par elle au salarié malade ou à ses ayants droit ;
Que les moyens ne sont fondés en aucune de leurs branches ;
Sur le pourvoi incident :
Attendu que le pourvoi incident n'a été formé ici par la société Nordon qu'à titre subsidiaire au cas où une cassation aurait été prononcée sur le pourvoi principal, la société Nordon déclarant par avance se désister de son pourvoi incident au cas de rejet du pourvoi principal ;
Que dès lors il n'y a pas lieu à statuer ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi incident ;
Condamne la CPAM de Nancy aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette l'ensemble des demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille deux.