AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant contrats du 3 juin 1992, rédigés en termes identiques, le groupe de presse Editions Bauer (la société Bauer) et la société Even média, spécialisée dans la conception, la réalisation et l'hébergement de services de kiosques télématiques, sont convenues de créer, pour deux publications, un kiosque téléphonique dont les modalités devaient être définies par un cahier des charges dressé à partir d'un descriptif réalisé conjointement par les deux parties ; que la société Even média, chargée auprès de France télécom de la connexion du numéro, devait réaliser la meilleure prestation technique, encaisser en qualité de mandataire la rémunération versée par les usagers et facturer ses prestations ; que la société Bauer devait assurer la promotion du numéro dans ses publications et percevoir sa part des rémunérations de sa cocontractante ; qu'en exécution de ce contrat-cadre et suivant avenant du 15 février 1993, les parties ont décidé la création d'un numéro de kiosque supplémentaire ; que, le 1er mai 1993, elles ont signé une convention d'une durée d'un an renouvelable pour la même période, sauf dénonciation, moyennant le respect d'un préavis de quatre mois, dont l'objet ne différait pas des contrats antérieurs qu'elle remplaçait et annulait ; que, par lettre recommandée avec avis de réception du 22 décembre 1993, la société Bauer a fait part à la société Even média de sa décision de dénoncer le contrat au motif qu'elle souhaitait repenser la stratégie de son activité kiosques téléphoniques, en invitant cependant la société Even média à la recontacter à la fin du mois de
janvier 1994 afin de déterminer ensemble, au cours du préavis de quatre mois débutant le 1er janvier 1994, les termes de leur future collaboration ; que plusieurs réunions ont eu lieu et des correspondances ont été échangées mais aucun accord n'est intervenu à l'issue de ces négociations ; que, le 27 avril 1994, la société Bauer a confirmé sa décision de mettre un terme au contrat le 30 avril 1994 ; qu'elle a judiciairement demandé le transfert à son profit du contrat Audiotel relatif au numéro supplémentaire et le paiement de diverses sommes ; que la société Even média a reconventionnellement demandé le versement de dommages-intérêts ;
Attendu que, pour rejeter la demande de dommages-intérêts de la société Even média pour rupture abusive des pourparlers, l'arrêt retient qu'il n'est pas soutenu que la collaboration aurait continué dans les mêmes conditions que le contrat arrivé à échéance ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Even média avait soutenu dans ses conclusions que les négociations avaient été rompues le 27 avril 1994, soit trois jours avant l'expiration du contrat, et qu'à cette période, elle était sûre de la reconduction du contrat dans des termes quasi identiques, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 février 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Editions Bauer aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. Métivet, conseiller le plus ancien qui en a délibéré en remplacement du président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille trois.