AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le premier avril deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GAILLY, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- DE LA X... Hélène, épouse Y... ,
- DE Z... Jean-Stanislas,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 7 novembre 2002, qui, dans l'information suivie contre eux pour infractions au Code de la consommation, a rejeté leurs demandes en annulation d'actes de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 6 février 2003, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article L. 215-3 du Code de la consommation et de l'article 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt a rejeté la requête en nullité du procès-verbal de saisie et des actes subséquents ;
"aux motifs qu'aux termes de l'article L. 215-3 du Code de la consommation, les agents peuvent exiger la communication ou procéder à la saisie des documents de toute nature, entre quelques mains qu'ils se trouvent, propres à faciliter l'accomplissement de leur mission ; qu'il résulte du procès-verbal de remise des documents et de la note relative à la saisie des documents que la personne présente dans les locaux a accompagné les agents tout au long de leur visite et qu'effectivement elle a ouvert, à leur demande, un bureau et leur a présenté les documents litigieux ; que les agents n'ont pas procédé à une fouille des locaux ni même ouvert personnellement les tiroirs du bureau, ces deniers ont été ouverts par la personne présente, laquelle aurait pu s'y opposer ; que ce mode opératoire ne peut être assimilé à une perquisition ; qu'il n'y a donc pas violation de l'article L. 215-3 du Code de la consommation et la saisie des documents est régulière ; que, par ailleurs, l'administration étant seule juge de l'opportunité de saisir, les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes disposent nécessairement du droit d'effectuer une consultation et de sélectionner les documents utiles à leur mission ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter la requête et de renvoyer le dossier de la procédure au juge d'instruction pour poursuivre l'information ;
1 ) "alors que les agents du service de la répression des fraudes, pour rechercher et constater les infractions, disposent du seul pouvoir d'exiger la communication de documents et d'en opérer leur saisie ; qu'il résulte des faits de l'espèce que les agents enquêteurs se sont rendus dans les locaux du domaine de la Crémade où ils ont été reçus par un ouvrier et ont recherché, notamment, dans les tiroirs du bureau, des documents susceptibles de rapporter la preuve d'une infraction, procédant ainsi à une véritable perquisition ; qu'en refusant de prononcer la nullité des actes en cause au seul motif que les agents n'avaient pas fouillé les locaux ni ouvert eux-mêmes les tiroirs bien que ces actes soient manifestement entachés d'excès de pouvoir puisqu'accomplis dans le cadre d'une perquisition par des agents ne disposant que du pouvoir d'exiger la communication de documents déterminés et de procéder à leur saisie, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;
2 ) "alors que le droit pour les agents de contrôle d'exiger la communication de documents et de procéder à leur saisie emporte obligation de transmission matérielle des documents demandés, mais ne saurait conférer à ces agents un droit de consultation préalable afin de déterminer les documents dont ils entendent exiger communication ou qu'ils envisagent de saisir ;
qu'en affirmant que les actes accomplis par les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes n'étaient pas entachés d'illégalité au motif que ceux-ci disposaient nécessairement du droit d'effectuer une consultation et de sélectionner les documents utiles à leur mission bien que la loi ne leur confère qu'un droit de communication et qu'en l'espèce, les agents n'avaient pu exiger la communication des documents en cause, ceux-ci étant des documents internes sans caractère obligatoire dont ils ne pouvaient connaître préalablement l'existence, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;
3 ) "alors que la communication suppose la remise matérielle de documents déterminés ; que, la requérante faisant valoir qu'en l'espèce, la personne présente sur les lieux, Abbes El A..., ne pouvait leur avoir remis un quelconque document dont il aurait été exigé communication, dès lors qu'il ne sait ni lire, ni écrire en langue française, et qu'il n'aurait pu, de ce fait, les identifier ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme cela lui était expressément demandé, si la communication d'un quelconque document n'avait pas été rendue matériellement impossible du fait de l'illettrisme de la personne présente sur les lieux qui n'aurait pu remettre les documents dont il aurait été exigé communication faute de pouvoir les singulariser, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu que, mis en examen des chefs de tromperie, publicité de nature à induire en erreur et infraction à la législation sur les appellations contrôlées, Hélène de la X... et Jean-Stanislas de Z..., co-gérants de la société coopérative agricole de Fonscolombes, ont régulièrement présenté à la chambre de l'instruction une requête en annulation de la procédure, au motif que les agents de la Direction générale de la répression des fraudes auraient, en violation des articles L. 215-3 du Code de la consommation et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, procédé, dans les locaux d'exploitation de cette société, à une perquisition suivie de la saisie de plusieurs documents ;
Attendu que, pour rejeter cette requête, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les agents n'ont pas excédé leurs pouvoirs, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa troisième branche, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Roman conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Gailly conseiller rapporteur, MM. Blondet, Palisse, Le Corroller conseillers de la chambre, Mmes Agostini, Beaudonnet, Salmeron conseillers référendaires ;
Avocat général : M di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;