AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un mai deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ARNOULD, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN et de Me de NERVO, avocats en la Cour ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Eugène,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 13 février 2003, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises du MORBIHAN sous l'accusation de viols aggravés ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 191 du Code de procédure pénale et l'article 131-4 du Code de l'organisation judiciaire ;
"en ce que la chambre de l'instruction ayant prononcé la mise en accusation d'Eugène X... du chef de viol sur mineure de quinze ans par ascendant et son renvoi devant une cour d'assises était composée de M. Y..., président titulaire, Mme Z... et M. A..., conseillers ;
"alors que ne peut siéger dans une même affaire un magistrat ayant précédemment participé, dans la même procédure, à un arrêt censuré par la Cour de Cassation ; qu'il résulte des pièces de la procédure que M. Y..., président, avait déjà présidé la chambre de l'instruction ayant partiellement refusé de faire droit à la requête en annulation d'actes de la procédure (procès-verbal d'audition de Eugène X... du 12 octobre 1999), par un arrêt du 18 février 2001 annulé par la Cour de Cassation le 10 mai 2001 ; qu'il y avait donc incompatibilité à ce que M. Y... présidât, à nouveau, la chambre de l'instruction dans la présente instance, et il appartenait à la chambre de l'instruction de relever l'irrégularité de sa composition eu égard aux textes et principe susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. Y..., président, a également présidé la chambre de l'instruction lorsque cette juridiction a statué sur une requête en annulation par arrêt du 18 février 2001, lequel a été cassé le 10 mai 2001 ;
Attendu que, contrairement à ce qui est soutenu au moyen, cette cassation n'a pas eu pour effet d'interdire que le même magistrat siège ultérieurement, en qualité de président, dans le cadre d'une instance différente, sur le renvoi de la personne mise en examen devant la cour d'assises ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 332 ancien du Code pénal, abrogé depuis la commission des faits, 222-22, 222-23, 222-24 du Code pénal, 214, 215, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit y avoir lieu d'accuser Eugène X... d'avoir, par violence, contrainte ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne d'Hélène B..., avec ces circonstances aggravantes que la victime était, à l'époque des faits, mineure de quinze ans comme étant née le 17 avril 1983, et qu'Eugène X... est son ascendant légitime ;
"aux motifs que "(...) Eugène X... a fait usage de son autorité et de sa force pour parvenir à ses fins ; les éléments de contrainte et de surprise s'induisent de l'attitude naturellement soumise et innocente de cette très jeune enfant ignorante de la sexualité des adultes, qui s'est trouvée confrontée à des agissements auxquels elle ne pouvait échapper tant physiquement que psychologiquement, son grand-père l'impressionnant d'autant plus qu'il régnait en despote sur l'ensemble du clan familial ;
Hélène B... était mineure de quinze ans au moment des faits" ;
"alors que la chambre de l'instruction, tenue de qualifier légalement les faits objet de l'accusation, ne pouvait accuser Eugène X... de viol aggravé sans caractériser l'élément constitutif de violence, contrainte ou surprise, qui ne pouvait se déduire de l'ignorance liée à l'âge de la victime, ni de l'autorité exercée sur elle par son grand-père, circonstances qui ne pouvaient constituer qu'une aggravation du crime de viol, non l'élément constitutif de ce crime" ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, après avoir exposé les faits et répondu comme elle le devait aux articulations essentielles des mémoires dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges qu'elle a estimé suffisantes contre Eugène X... pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation de viols aggravés ;
Qu'en effet, les juridictions d'instruction apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, la Cour de Cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Arnould conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
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