AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Nîmes, 20 décembre 2001), que la société Trollat immobilier et M. X... ont signé un contrat d'agent commercial pour une durée déterminée d'une année à compter du 2 janvier 1999, renouvelable par tacite reconduction par périodes d'égale durée, sauf dénonciation trois mois avant l'échéance ; que par lettre du 14 juin 1999, la société Trollat immobilier, considérant que le courrier que lui avait adressé M. X... à la suite d'un différend sur un problème de facturation contenait rupture implicite, a pris acte de cette rupture avec effet immédiat ; que M. X... l'a assignée en paiement de commissions impayées, de l'indemnité compensatrice prévue à l'article 12 de la loi du 25 juin 1991 et de dommages-intérêts pour rupture abusive ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la société Trollat immobilier reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer une somme de 60 000 francs à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat d'agent commercial à durée déterminée et celle de 165 000 francs au titre de l'indemnité de l'article 12 de la loi du 25 juin 1991, alors, selon le moyen :
1 ) que la rupture du contrat à l'initiative du mandant, lorsqu'elle n'est pas justifiée par l'une des causes énumérées à l'article 13 de la loi du 25 juin 1991, ne peut ouvrir droit au profit de l'agent commercial qu'à l'indemnité compensatrice du préjudice prévue par l'article 12 de ladite loi ; qu'ainsi, en condamnant la société Trollat immobilier à payer à M. X..., outre l'indemnité de l'article 12 de la loi du 25 juin 1991, des dommages-intérêts pour rupture abusive de son contrat d'agent commercial, la cour d'appel a violé ledit texte, ensemble l'article 1147 du Code civil ;
2 ) qu'en tout état de cause, après avoir relevé que les affaires réalisées par M. X... au cours du premier semestre 1999 avaient généré à son profit des commissions d'un montant global de 165 000 francs et que l'agent commercial ne rapportait pas la preuve, ni de ce qu'il aurait pu réaliser au second trimestre 1999 le même chiffre d'affaires qu'au cours du premier, ni d'autre chef de préjudice, ce dont il résultait que le préjudice subi par M. X... du fait de la rupture n'excédait pas le montant des commissions par lui perçues pendant le premier semestre de l'année 1999, la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître les conséquences légales de ses propres constatations, condamner la société Trollat immobilier au paiement de ladite somme au titre de l'article 12 et d'une somme de 60 000 francs à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, soit une somme globale de 225 000 francs ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 12 de la loi du 25 juin 1991 et de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 12 de la loi du 25 juin 1991, devenu l'article L. 134-12 du Code de commerce, qui obligent le mandant à réparer le préjudice subi par l'agent commercial du fait de la cessation du contrat d'agence commerciale, n'interdisent pas la réparation du préjudice spécifique subi par l'agent lorsque les causes de cette cessation ont un caractère fautif ; qu'ayant retenu que la société Trollat immobilier avait rompu avec effet immédiat le contrat à durée déterminée avant son terme et que cette rupture était abusive, l'arrêt a apprécié souverainement, en la limitant, l'étendue du préjudice résultant de cette faute ; que le moyen nest pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Trollat immobilier reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. X... une somme de 69 973,91 francs au titre de commissions restées impayées, alors, selon le moyen, que dans ses conclusions d'appel, la société Trollat immobilier faisait valoir que M. X... restait lui devoir au titre des avances qui lui avaient été consenties au cours de l'année 1998, une somme de 10 000 francs ; qu'elle soutenait également que, durant la période où il avait été VRP, M. X... avait reçu des avances sur salaire pour des affaires qui avaient donné lieu à signature de compromis, que ces mêmes affaires s'étaient concrétisées par des ventes courant 1999 et que M. X..., devenu agent commercial, les avait à nouveau facturées pour un montant de 34 874,76 francs, qui lui avait été payé, de sorte qu'il y avait lieu de déduire cette somme, payée deux fois, des factures dont la société Trollat immobilier se reconnaissait débitrice envers M. X... ;
qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, répondant ainsi aux conclusions prétendument délaissées, l'arrêt indique que la cour d'appel a procédé au rapprochement des pièces comptables versées aux débats et retient que la société justifie ne devoir que 69 973,91 francs ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Trollat immobilier aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Trollat immobilier à payer à M. X... la somme de 1 800 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille trois.