AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 octobre 2001), que l'association Fédération sépharade mondiale (la FSM) est composée de branches nationales, la qualité de membre ne pouvant être accordée qu'à une branche par pays ; que l'association Fédération sépharadie de France (la FSF), qui a pour objet, selon ses statuts, de "conduire une action au service des valeurs du judaïsme sépharade", était membre, jusqu'en 1998, de la FSM ; que l'association Fédération des associations sépharades de France (la FASF), qui s'est constituée en 1998, a le même objet et est ouverte aux mêmes personnes que la FSF ; que la FSF, reprochant à la FASF des manoeuvres par lesquelles elle aurait usurpé sa qualité de membre de la FSM, l'a assignée, ainsi que différents membres, en paiement de dommages-intérêts ; que la FSM étant intervenue volontairement à
l'instance au soutien de la FASF, la FSF a étendu ses demandes à son encontre en faisant valoir qu'elle avait été exclue fautivement de la FSM et qu'il en était résulté pour elle un préjudice notamment du fait de la perte des subventions octroyées par la FSM ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la FSF fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes en dommages-intérêts dirigés contre la FASF, ses cinq membres fondateurs, MM. X..., Y..., Z..., A... et B..., et la FSM ainsi que de ses demandes en changement de dénomination et de siège dirigées contre la FASF, alors, selon le moyen, que le parasitisme consiste à s'immiscer dans le sillage d'autrui afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts, de son savoir-faire ou des signes de sa notoriété ; que le parasitisme est constitué, même en l'absence de risque de confusion entre les antagonistes ; qu'en écartant les prétentions de la FSF fondées sur les agissements parasitaires de la FASF parce qu'il n'existait pas de risque sérieux de confusion entre les deux associations, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt constate que pour caractériser "les manoeuvres de la FASF et de certains de ses membres aux fins d'usurpation ou à tout le moins une tentative pour ce faire, de la notoriété, de la réputation, voire de la place de la FSF", la FSF invoque la confusion créée par la dénomination de la FASF, par le parrainage de M. Gaon, président de la FSM dont elle-même était membre, la domiciliation de la FASF à l'ancien siège social de la FSF et la reproduction à l'identique de ses statuts" ; que l'arrêt relève que les statuts de la FASF ne sont pas identiques à ceux de la FSF même si l'objet social l'est, ce qui ne saurait lui être imputé à faute au regard du principe de liberté d'association ; que l'arrêt observe que si la FASF s'est installée dans les locaux qui avaient été occupés par la FSF, celle-ci les avait volontairement libérés et qu'il n'est pas établi que l'entrée dans les lieux de la FASF ait été immédiate ;
que l'arrêt estime que les dénominations des deux associations pas plus que les initiales de leurs noms, ne peuvent être confondues ; que l'arrêt retient enfin que le parrainage du président de la FSM n'est pas fautif dès lors qu'il a été adopté dans un contexte de conflits affectant le fonctionnement de la FSF et que cette situation nuisait à l'objet social poursuivi par la FSM ; qu'ayant ainsi examiné les agissements dénoncés, et déduit de cet examen qu'ils ne caractérisaient aucune faute imputable à la FASF ou à ses membres fondateurs, et qu'il n'existait aucun risque sérieux de confusion entre les deux associations et en l'état des écritures de la FSF qui n'invoquait aucun autre fait distinct à l'encontre de la FASF et fondait sa demande sur le risque de confusion résultant selon elle des agissements de la FASF, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait;
que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la FSF fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en dommages-intérêts dirigée contre la FSM en raison de l'interruption du versement des subventions, alors, selon le moyen :
1 ) qu'en écartant l'existence d'un lien de causalité entre l'exclusion de la FSF intervenue en 1998 et le préjudice matériel invoqué par celle-ci au motif que le versement des subventions avait été suspendu dès la fin de 1996, sans rechercher si la FSF n'aurait pas dû, conformément aux statuts, recevoir des subventions pendant la période 1997-1998, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
2 / qu'en déclarant non établie la réalité du dommage invoqué par la FSF au motif que l'obtention des subventions n'était pas de plein droit mais soumise à conditions, sans rechercher si, la demanderesse n'avait pas perdu, du fait de son exclusion, toute chance de prétendre pour l'avenir au versement de ces subventions en répondant aux conditions de leur obtention, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la FSM ne justifie pas avoir respecté la procédure prévue à l'article X de ses statuts pour procéder à l'exclusion de la FSF et que celle-ci est bien fondée à demander réparation des conséquences que cette faute a eu pour elle, la cour d'appel, qui a relevé que la FSF n'avait pas perçu de subvention après celle de l'année 1996 en raison des conflits existant au sein de l'association française, et qui en a déduit que le défaut d'obtention de subvention était sans lien avec la faute relevée au titre du non-respect de la procédure d'exclusion, a légalement justifié sa décision, sans avoir à procéder aux recherches invoquées aux deux branches du moyen que ses appréciations sur la faute commise par la FSM rendaient inopérantes ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la FSF aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la FSF à payer à la FASF, à la FSM, à MM. X..., Y..., Z..., A... et B... la somme globale de 1 800 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille quatre.