AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Montbéliard, 22 mai 2001), M. X..., délégué syndical, délégué du personnel, délégué syndical central et conseiller du salarié, est employé par la société ECIA qui a instauré, le 1er juillet 1992, une prime d'assiduité dite "Amadeus" versée semestriellement en février et en août aux salariés ayant totalisé pendant le semestre de référence, quatre mois de travail effectif ; qu'il a saisi la juridiction d'une demande en paiement de cette prime pour l'année 1998 et d'une demande en remboursement d'une somme retirée sur son salaire de janvier 1998 pour dépassement du crédit d'heures octroyé en vertu de l'article L. 412-20, alinéa 3, du Code du travail ;
Sur le second moyen qui est préalable :
Attendu que le salarié fait grief au conseil de prud'hommes de l'avoir débouté de sa demande en versement d'une somme retirée sur son salaire de janvier 1998 pour dépassement du crédit d'heures, alors, selon le moyen, qu'en affirmant qu'il ressort expressément des termes mêmes des dispositions légales que le crédit d'heures supplémentaire de la section syndicale est un crédit global annuel destiné à la préparation de la négociation des conventions ou accords d'entreprise prévus par l'article L. 132-20 du Code du travail et que ce crédit d'heures est alloué pour l'ensemble des négociations "pour en conclure que le salarié devait être débouté de sa demande de paiement d'une somme retirée sur son salaire de janvier 1998 pour dépassement d'une heure 25 du crédit d'heures, alors qu'il ressort du quatrième alinéa de l'article L. 412-20 du Code du travail que chaque section syndicale dispose d'un crédit global supplémentaire au profit de son ou ses délégués syndicaux appelés à négocier la convention ou l'accord d'entreprise, l'usage du singulier signifiant que ce crédit est alloué pour la négociation de chaque accord susceptible d'être conclu dans l'entreprise pendant l'année, le conseil de prud'hommes a violé les articles L. 132-20 et L. 412-20 du Code du travail ;
Mais attendu que le conseil de prud'hommes a décidé, à juste titre, que le crédit de dix ou quinze heures par an confié à la section syndicale dans les entreprises de plus de cinq cents salariés, à charge pour ses membres d'en effectuer la répartition et d'en informer l'employeur, destiné à permettre la préparation de la négociation collective annuelle obligatoire, est alloué globalement et annuellement quel que soit le nombre d'accords conclus dans l'entreprise au cours de la même année ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Mais, sur le premier moyen :
Vu les articles L. 122-45 et L. 412-21 du Code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'une prime d'assiduité dite "Amadeus" pour l'année 1998, le conseil de prud'hommes retient que le fait de ne pas considérer les absences accordées aux salariés appelés statutairement à siéger aux congrès ou assemblées officielles de son organisation syndicale comme travail effectif pour l'attribution de la prime "Amadeus" en l'absence de disposition conventionnelle sur ce point, ne constitue pas une sanction pécuniaire ou la prise en compte d'une activité syndicale dans la mesure où cette prime n'est nullement supprimée ou minorée au regard de cette seule activité mais voit son attribution subordonnée à un seuil mensuel de huit heures pour tout type d'absence ne relevant pas d'une période de travail effectif telle que maladie ;
Attendu, cependant, qu'un salarié investi d'un mandat syndical ne peut être privé d'une prime d'assiduité dès lors que ses absences autorisées par la convention collective sont liées à l'exercice de son mandat ; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la Cour de Cassation est en mesure, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en sa seule disposition relative au calcul des droits à la prime "Amadeus" pour l'année 1998, le jugement rendu le 22 mai 2001, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Montbéliard ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la disposition cassée ;
DIT que les absences statutaires ne peuvent faire obstacle à l'attribution de la prime Amadeus ;
RENVOIE la cause et les parties devant le conseil de prud'hommes de Besançon pour qu'il soit statué sur le montant de cette prime ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille quatre.