AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 janvier 2000), qu'après la fin du concubinage ayant existé entre elle et M. X..., Mme Y... s'est maintenue dans l'immeuble édifié au cours de la vie commune sur un terrain appartenant à son concubin ; que ce dernier ayant demandé que soit ordonnée son expulsion et qu'elle soit condamnée à lui payer une indemnité d'occupation, Mme Y... a résisté à ces demandes en invoquant l'existence d'une société créée de fait entre les concubins ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté cette prétention et accueilli les demandes de M. X..., alors, selon le moyen :
1 / que tout jugement doit être motivé et que le défaut de réponse à conclusions constitue le défaut de motif ; qu'en l'espèce, pour établir l'existence d'une société de fait entre elle et M. X..., elle faisait valoir dans ses conclusions d'appel, d'une part, l'existence d'un compte courant commun à partir duquel était effectué le remboursement des échéances du prêt, et, d'autre part, les travaux d'agrandissements de la maison effectués par son frère ; qu'en se bornant, pour écarter cette demande, à constater que le prêt avait été souscrit par M. X..., seul, sans répondre à ces conclusions déterminantes desquelles il résultait la volonté commune des parties de s'associer dans la construction de la maison, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que le virement de fonds opérant dessaisissement du donateur et tradition au bénéficiaire constitue le don manuel ; qu'elle faisait valoir qu'en virant la somme de 100 000 francs sur son compte personnel, M. X... lui avait fait un don manuel et qu'en utilisant cette somme pour la construction de la piscine, elle avait manifesté sa volonté de s'associer effectivement à l'édification de la maison ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'existence d'une société créée de fait entre concubins, qui exige la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société, nécessite l'existence d'apports, l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun et l'intention de participer aux bénéfices ou aux économies ainsi qu'aux pertes éventuelles pouvant en résulter ; que ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns des autres ;
Attendu qu'en l'espèce, ayant constaté que Mme Y... ne faisait pas la preuve, qui lui incombait, que les concubins avaient eu l'intention de s'associer pour la construction de l'immeuble dans lequel leur relation avait perduré, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre aux conclusions tendant à établir sa participation financière à la construction et à l'amélioration de cet immeuble, que cette constatation rendait inopérantes ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille quatre.