AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Bernard,
contre les arrêts de la chambre d'accusation de la cour d'appel de BASTIA, en date des 28 juin 2000 (n 233) et 16 août 2000 (n 292), qui, dans l'information suivie contre lui du chef de complicité de destruction de biens appartenant à autrui par l'effet d'un incendie, ont, pour le premier, rejeté partiellement sa demande d'actes et, pour le second, rejeté sa demande d'actes, et contre les arrêts de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date des 4 avril 2001 (n 84) et 18 avril 2001 (n s 105 et 106), qui, dans la même information, ont, pour le premier, déclaré irrecevable sa demande d'actes, pour le deuxième, rejeté sa demande d'annulation d'actes de la procédure, et pour le troisième, déclaré son appel irrecevable ;
ainsi que sur les pourvois formés par :
- X... Bernard,
- Y... Henri,
- Z... Yves, A... Brigitte, épouse Z...,
et LA SOCIETE SERENA venant aux droits de la SOCIETE "CHEZ FRANCIS", parties civiles,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 15 janvier 2003, qui a condamné le premier, pour complicité de destruction de biens appartenant à autrui par l'effet d'un incendie, à 3 ans d'emprisonnement, dont 2 ans avec sursis, et 3 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, le second, pour destruction d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'un incendie et complicité de ce délit, à 30 mois d'emprisonnement, dont 2 ans avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 septembre 2004 où étaient présents : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, MM. Le Gall, A...ier, Mme Ponroy, MM. Arnould, Corneloup, Mme Guirimand conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mmes Caron, Guihal, M. Lemoine, Mme Degorce conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Mouton ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de Me CHOUCROY, de Me FOUSSARD et de la société civile professionnelle TIFFREAU, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON, les avocats des parties ayant eu la parole en dernier ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
I - Sur les pourvois de Bernard X... contre les arrêts avant dire droit :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II - Sur les pourvois contre l'arrêt du 15 janvier 2003 :
Sur les faits et la procédure :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, dans la nuit du 19 au 20 avril 1999, la paillote-restaurant "Chez Francis", située à Coti Chiavari, près d'Ajaccio, sur le domaine public maritime, et exploitée par les époux Z... et la société Serena venant aux droits de la société "Chez Francis", a été détruite par un incendie ; que, sur les lieux du sinistre, ont été retrouvés des tracts portant l'inscription "Z... balance des flics" ainsi que divers objets dont un poste de radio émetteur-récepteur encore allumé dont on découvrira ultérieurement qu'il appartenait au Groupe de pelotons de sécurité (GPS) placé sous l'autorité du capitaine de gendarmerie Norbert B..., lui-même placé sous les ordres du colonel Henri Y..., chef de la légion de gendarmerie de Corse ; qu'une information judiciaire a été ouverte le 26 avril 1999 du chef de destruction d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'un incendie commise en bande organisée ; que le magistrat instructeur a été saisi, par un réquisitoire supplétif du 10 mai 1999, de la destruction par incendie d'une autre paillote, "Aria Marina", survenue le 7 mars 1999 à Ajaccio ; que les investigations menées dans le cadre de l'enquête puis de l'information ont conduit à la mise en examen puis au renvoi devant le tribunal correctionnel, notamment, de Henri Y..., des chefs de destruction par incendie d'un bien appartenant à autrui, à savoir la paillote "Aria Marina", et de complicité de ce délit, en ce qui concerne la paillote "Chez Francis", ainsi que du préfet de région, Bernard X..., pour complicité de ces destructions ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé par Me Choucroy pour Henri Y..., pris de la violation de l'article préliminaire du Code de procédure pénale issu de la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000, de l'alinéa 1er de l'article 81 dudit Code dans sa rédaction résultant de la loi susvisée, des articles 184 et 593 du Code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation du principe du contradictoire, violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de l'ordonnance de renvoi soulevée in limine litis par Henri Y... ;
"aux motifs que la référence faite par le juge d'instruction aux réquisitions motivées du ministère public satisfaisait aux dispositions de l'article 184 du Code de procédure pénale ; que postérieurement à la loi du 15 juin 2000, la chambre criminelle par un arrêt du 20 juin 2001 (n 08.82.614) a confirmé cette solution pour une chambre de l'instruction qui avait repris textuellement le réquisitoire du parquet général dans sa réponse à un mémoire qui lui était soumis ; que l'information proprement dite n'a pas fait l'objet de critiques portant sur son caractère contradictoire et sur la recherche d'éléments à décharge ; que le magistrat a prononcé un non-lieu partiel pour détention illégale d'une arme au bénéfice de Gérard C... et a disqualifié les faits d'incendie volontaire ; qu'il n'apparaît pas que les exigences posées par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme sur le droit à un procès équitable, aient été substantiellement méconnues d'autant que l'ordonnance de renvoi reste un acte de simple saisine et non une décision sur la culpabilité ;
"alors que l'article 184 du Code de procédure pénale prévoyant que les ordonnances du juge d'instruction doivent indiquer de façon précise, les motifs pour lesquels il existe ou non contre les personnes mises en examen des charges suffisantes et l'article préliminaire du Code de procédure pénale issu de la loi du 15 juin 2000, rappelant le principe du respect du contradictoire, l'article 81 dudit Code prévoyant en outre dans son alinéa 1er modifié par la loi précitée applicable à compter du 1er janvier 2001, que le juge d'instruction instruit à charge et à décharge, la Cour a violé les textes susvisés ainsi que l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui pose le principe du droit, pour tout accusé, à un procès équitable, en admettant que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel rendue après la date d'entrée en vigueur de la loi du 15 juin 2000, puisse se borner à se référer aux motifs du réquisitoire définitif sans énoncer aucun motif propre" ;
Attendu que l'exigence de motivation de l'ordonnance de renvoi prévue par l'article 184 du Code de procédure pénale est satisfaite lorsque le juge d'instruction rend, comme en l'espèce, une ordonnance conforme au réquisitoire motivé du procureur de la République et s'y réfère explicitement ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le premier moyen, proposé par Me Foussard pour Bernard X..., pris de la violation des articles 111-3, 121-7, 322-1 et suivants du Code pénal, de l'article 6 1 et 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 427, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. le préfet X... coupable de complicité de destruction, dégradation ou détérioration de biens appartenant à autrui, en répression l'a condamné à la peine de 3 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis simple, a prononcé à son encontre l'interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 3 ans, outre des dommages et intérêts ;
"aux motifs que, "l'article 427 du Code de procédure pénale prescrit que les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve sous réserve que ces preuves soient apportées au cours des débats et contradictoirement débattues devant la juridiction ;
qu'au cas d'espèce la cassette, effectivement enregistrée sans l'accord de Bernard X..., a fait l'objet d'une expertise qui a authentifié les propos tenus ; que lesdits propos ont fait l'objet d'interrogations contradictoires entre les parties et ne constituent que l'un des éléments proposés à la conviction des magistrats ; qu'il en résulte que le versement aux débats de cette pièce, largement discutée, ne constitue pas une violation du droit au procès équitable prévu par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de retrait présentée par la défense de Bernard X... ; que s'il résulte des dispositions de l'article 524 du Code civil que les biens placés dans un fond pour son exploitation sont immeubles par destination encore faut-il que cette installation résulte d'une initiative du propriétaire ;
qu'au cas d'espèce les immeubles ainsi qu'il vient d'être démontré, étaient la propriété de l'Etat et ce sont les exploitants qui ont placé des équipements et des marchandises ; qu'ils en sont restés les propriétaires " (arrêt attaqué, p. 26, avant dernier et dernier et p. 27, 1er et p. 29 6) ;
"alors que, premièrement, l'enregistrement effectué de manière clandestine par un gendarme agissant dans l'exercice de ses fonctions, des propos qui lui sont tenus, fût-ce spontanément, par une personne suspecte, élude les règles de procédure et compromet les droits de la défense ; qu'au cas d'espèce, en refusant de retirer des débats la retranscription de l'enregistrement effectué par le chef d'Etat major de la légion de la gendarmerie, le Lieutenant-Colonel D..., à l'insu de M. le préfet X..., alors que cet enregistrement a été effectué de manière clandestine, par le Lieutenant-Colonel D..., dans l'exercice de ses fonctions et dans le seul but de compromettre M. le Préfet X..., les juges du fond ont violé les textes susvisés, ensemble les droits de la défense ;
"et alors que, deuxièmement, le principe de loyauté, en même temps que les droits de la défense interdisent aux juges, pour fonder leur intime conviction, de prendre en compte un enregistrement capté à l'insu du prévenu et qui a été, par la suite, trafiqué dans le dessein d'effacer des propos qui pourraient être mis à la décharge du prévenu ; que par suite, en statuant comme ils l'ont fait, sans rechercher si l'enregistrement n'avait pas été trafiqué comme l'ont d'ailleurs relevé les experts, les juges du fond ont, en toute hypothèse, privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu que, pour rejeter la demande de retrait de la procédure de la cassette contenant l'enregistrement, effectué par Bertrand D... à l'insu de Bernard X..., d'une conversation échangée avec ce dernier, l'arrêt attaqué relève que cette cassette, ayant fait l'objet d'une expertise qui a authentifié les propos tenus, a été soumise à la libre discussion des parties ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que cet enregistrement ne constituait que l'un des éléments probatoires laissés à l'appréciation souveraine des juges, la cour d'appel a justifié sa décision au regard des dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen, proposé par Me Foussard pour Bernard X..., pris de la violation des articles 111-3, 121-7, 322-1 et suivants du Code pénal, des articles L. 28 et R. 53 du Code du domaine de l'Etat, des articles 552 et 555 du Code civil, des articles 6 et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. le préfet X... coupable de complicité de destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui, en répression l'a condamné à la peine de 3 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis simple, a prononcé à son encontre l'interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 3 ans, outre des dommages et intérêts ;
"aux motifs propres qu' "il résulte des pièces du dossier que la paillote Aria Marina était implantée sur des rochers surplombant les flots, que ce seul constat permet d'affirmer conformément aux dispositions de l'article 1 titre VII livre IV de l'ordonnance royale d'août 1681 encore en vigueur que ce bien était édifié sur le domaine public maritime ;
que par jugement, en date du 4 mai 1995, le tribunal administratif de Bastia a condamné Yves Z... à remettre dans leur état primitif les lieux qu'il occupait sans titre sur le domaine public maritime au lieu-dit plage Cala d'Orzu ; qu'en ses motifs la juridiction administrative a considéré que l'emplacement servant d'assiette au bar-restaurant était situé sans autorisation sur le domaine public maritime en visant l'ensemble des pièces du dossier, et non le seul procès-verbal de grande voirie dressé le 17 mars 1992 ; qu'il apparaît ainsi qu'il existe une décision définitive de la juridiction administrative qui non seulement statue sur la validité du procès-verbal dressé en 1992 mais aussi constate que l'établissement d'Yves Z... est édifié sans autorisation sur le domaine public maritime ; qu'aucune partie au procès n'établit l'existence d'un fait nouveau intervenu entre le prononcé de cette décision et la commission des faits permettant de remettre en cause l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 4 mai 1995 en ce qui concerne la situation du domaine public maritime ; qu'il importe peu sur ce point qu'une procédure de délimitation du domaine ait été entreprise sur la plage de Cala d'Orzu depuis lors, cette procédure ne pouvant remettre en cause la chose jugée au moment des faits ; que par ailleurs, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'accord intervenu le 9 avril 1999 entre les exploitants et l'autorité préfectorale ne constitue pas une autorisation d'occupation temporaire dont la forme et le contenu sont définis expressément par les articles L. 28 et R. 57-1 du Code du domaine de l'Etat, mais un simple sursis à exécution ne pouvant constituer une autorisation de jouissance et encore moins un titre de propriété ; qu'il apparaît en conséquence que tant la paillote Aria Marina que la paillote Chez Francis étaient au moment des faits édifiées sans droit ni titre sur le domaine public maritime ; que la nature d'immeuble des deux paillotes n'est ni discutée ni discutable ; que ces immeubles ont été construits sur le domaine public maritime naturel, propriété de l'Etat ; qu'en application de l'article 551 du Code civil, qui est repris en droit public sous la terminologie de la théorie de l'accessoire, ces biens sont en conséquence devenus propriété de l'Etat au fur et à mesure de leur construction" (arrêt attaqué p. 28, 2, 3, avant dernier et dernier et p. 29 1 et 2) ;
"et aux motifs éventuellement adoptés qu' "il est constant qu'implantées de telles sorte qu'elles étaient attachées au sol (...) les constructions incendiées constituaient des biens immeubles par nature ; qu'il est encore constant que tant la paillote Chez Francis, dont la démolition a été ordonnée par jugement définitif du tribunal administratif de Bastia, en date du 4 mai 1995, que la paillote Aria Marina, qui a fait l'objet d'un procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 12 mai 1998, étaient édifiées sur le domaine public maritime naturel ; que le domaine public maritime naturel appartient à l'Etat conformément aux dispositions des articles L. 1 et L. 2 du Code du domaine de l'Etat ; que par application des dispositions de l'article 555 du Code civil qui définissent l'acquisition de la propriété par accession, le régime de la domanialité publique s'étend aux immeubles attachés au domaine public ; qu'il est dérogé à ce principe en cas d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public au sens des articles L. 34-1 et suivants du Code du domaine de l'Etat ; qu'en outre on relève que s'il est dérogé au principe civil de l'accession en cas d'autorisation d'occupation temporaire, il n'y est dérogé que pour la durée de cette autorisation ; qu'en effet, au contraire, ce principe s'applique pleinement de nouveau au cas où l'Etat accepte le maintien des constructions à l'issue du titre d'occupation puisque l'article L. 34-3, alinéa 2, prévoit qu'elles deviennent alors de plein droit et gratuitement la propriété de celui-ci ; qu'en tout état de cause, tant en ce qui concerne la paillote Chez Francis qu'en ce qui concerne la paillote Aria Marina, les exploitants n'étaient pas titulaires d'une autorisation d'occupation temporaire aux jours des incendies ; que s'agissant de la paillote Chez Francis, le moratoire permettant à Yves Z... de poursuivre son exploitation en contrepartie de son engagement de démolir la construction illégale au plus tard le 30 octobre 1999, ensuite de l'accord général intervenu entre les paillotiers et l'autorité préfectorale le 9 avril 1999, ne constitue pas une autorisation d'occupation temporaire au sens des article L. 34-1 et suivants du Code du domaine de l'Etat, dont les conditions d'obtention, la procédure de délivrance, la forme et le contenu, notamment la redevance correspondante, sont précisément définis par les articles L. 28 et suivants et R. 57-1 et suivants du même Code ; qu'il résulte de ce qui précède que, du seul fait qu'il est propriétaire du domaine public maritime naturel auquel elles étaient attachées, à défaut d'autorisation d'occupation temporaire, l'Etat a acquis la propriété des paillotes Chez Francis et Aria Marina par accession, et ce dès la construction de celles-ci au fur et à mesure de leur édification ;
qu'en sollicitant du tribunal administratif une décision de remise en état de son domaine, l'Etat a opté pour la démolition des constructions implantées ;
que cependant, l'exercice de cette option ne lui a pas fait perdre sa qualité de propriétaire desdistes constructions, laquelle ne pouvait disparaître qu'à l'issue de leur démolition complète ; qu'en conséquence, il est établi de façon certaine qu'à la date des faits, le 7 mars 1999, pour la paillote Aria Marina et dans la nuit du 19 au 20 avril 1999, pour la paillote Chez Francis, l'Etat était propriétaire des constructions litigieuses" (jugement entrepris p. 19, 5, 6, avant dernier et dernier et p. 20) ;
"alors que, premièrement, l'Etat ne devient propriétaire des constructions édifiées sur le domaine public que s'il l'accepte expressément ; que par suite, des constructions, même édifiées illégalement sur le domaine public maritime, ne peuvent devenir la propriété de l'Etat par l'effet de la théorie de l'accession dès lors que celui-ci n'a pas manifesté sa volonté de les acquérir ; qu'au cas d'espèce, en énonçant, pour décider que l'Etat était propriétaire des paillotes, que ces paillotes avaient été construites illégalement sur le domaine public maritime, les juges du fond ont statué aux termes de motifs inopérants et ont violé les textes susvisés ;
"alors que, deuxièmement, en statuant comme ils l'ont fait alors qu'il résultait de leurs constatations que non seulement l'Etat n'avait manifesté aucune intention d'accepter d'acquérir la propriété des paillotes, mais qu'à l'inverse il en avait demandé la destruction, les juges du fond n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations et ont violé les textes susvisés" ;
Attendu que le moyen, qui ne prétend pas que Bernard X... ait été le propriétaire des constructions litigieuses et qui ne conteste pas qu'il s'agissait de biens appartenant à autrui, est inopérant ;
Sur le deuxième moyen, proposé par Me Choucroy pour Henri Y..., pris de la violation des articles 122-4, alinéa 2, 322-6 et 322-15 du Code pénal, de l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790, 384, 386, 388 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté les exceptions d'incompétence et de sursis à statuer soulevées par Henri Y... ;
"aux motifs qu'il est de la compétence du juge répressif d'examiner toutes les exceptions proposées, notamment il lui appartient de rechercher si le bien sur lequel a porté l'infraction pouvait appartenir au domaine public ; qu'il n'y a pas lieu en conséquence de renvoyer cette question devant la juridiction de l'ordre administratif ; qu'en outre aucun des prévenus n'excipant d'un droit de propriété sur les biens en cause, il y a lieu de déclarer cette exception irrecevable ; que de même appartient-il au juge répressif de déterminer si le préfet X... a ou non agi dans le cadre de ses fonctions dans l'hypothèse où il aurait donné l'ordre de détruire les biens incendiés, cette question relevant de l'examen de l'élément légal ou intentionnel de l'infraction qui ressortit à la compétence du juge pénal ;
"alors que la Cour, qui, dans la partie de sa décision consacrée à la culpabilité des prévenus, a expressément reconnu que l'ordre dont elle a souverainement constaté l'existence, donné par un préfet à ses subordonnés, de détruire les restaurants de plage construits sans autorisation sur le domaine public maritime et dont la démolition avait été ordonnée par décision de justice est légitime, mais qui a refusé d'admettre la légalité des conditions de ces destructions sous prétexte de leur caractère occulte et éventuellement dangereux, a violé l'article 384 du Code de procédure pénale et l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 qui pose le principe de la séparation des pouvoirs et interdit au juge répressif de se substituer à la juridiction administrative compétente, pour décider de la légalité d'une décision individuelle prise par cette dernière en rejetant l'exception d'incompétence et de sursis à statuer soulevée par Henri Y... ;
Attendu que le moyen, qui se borne à reprendre l'argumentation que, par une motivation exempte d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel a écartée à bon droit, ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, proposé par Me Foussard pour Bernard X..., pris de la violation des articles 111-3, 121-7, 322-1 et suivants du Code pénal, de l'article R. 53 du Code du domaine de l'Etat, de l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, de l'article 34 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, du décret du 11 février 1998 portant nomination de Bernard X... en qualité de préfet de Corse et de Corse du sud, des articles 6 et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable de complicité de destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui, en répression l'a condamné à la peine de 3 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis simple, a prononcé à son encontre l'interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 3 ans, outre des dommages et intérêts ;
"aux motifs que, "l'Etat constitue une entité dotée de la personnalité juridique ; qu'à ce titre, il dispose d'un patrimoine propre distinct du patrimoine de ses agents ou de ses représentants ; qu'en conséquence si, en application de l'article R. 53 du Code du domaine de l'Etat, le préfet est compétent pour autoriser les occupations et le stationnement sur les dépendances du domaine public et prendre les décisions relatives à leur administration, et que plus généralement il a compétence pour faire exécuter les décisions de justice, y compris relatives à ce domaine, ces circonstances ne le rendent évidemment pas propriétaire à titre personnel de ce domaine au demeurant inaliénable ; que, par ailleurs, le fait pour l'Etat de demander en justice l'autorisation de démolir un bien lui appartenant par sa situation mais édifié et exploité par un tiers, est, contrairement à ce qui a été soutenu, sans effet sur sa qualité de propriétaire ; qu'il résulte de ce qui précède qu'au moment des faits, la paillote Aria Marina et la paillote Chez Francis étaient propriété de l'Etat, entité juridique distincte de chacun des prévenus ; qu'en conséquence, l'élément constitutif du délit relatif à l'appartenance du bien détruit à un tiers est bien rempli" (arrêt attaqué p. 29 3, 4 et 5) ;
"et aux motifs que, "l'application la plus autorisée de la notion de faute détachable a été faite par une décision du tribunal des conflits du 19 octobre 1998 (préfet du Tarn Rec. Dalloz 1999, Jurisprudence p. 127) qui, saisi de la situation d'un fonctionnaire ayant réalisé un faux à la demande de son supérieur hiérarchique, a considéré que la faute commise, alors que l'intéressé n'était animé par aucun intérêt personnel, qu'il avait agi dans l'exercice de ses fonctions et avec les moyens du service, ne pouvait, quelle que soit sa gravité, être considérée comme une faute personnelle détachable du service ; qu'il en résulte qu'il est sans conséquence sur la mise en cause de la responsabilité civile de l'Etat que pour l'exécution d'un ordre l'agent public ait commis un délit dès lors qu'il est dans l'exercice de sa fonction et qu'est constatée l'absence d'intérêt personnel (...) ; que la Cour considère cette analyse comme pertinente substantiellement et adaptée au cas d'espèce pour les prévenus qui, sur ordre, ont agi dans le cadre même de leurs fonctions en en utilisant les prérogatives, les pouvoirs et les moyens et, s'ils ont eu une vision erronée de leur mise en oeuvre et de l'intérêt public, n'ont jamais poursuivi aucun intérêt privé ; (...) ;
qu'en conséquence, il sera retenu que les délits établis à l'encontre des prévenus Henri Y..., Gérard C..., Norbert B..., Lionel E..., Eric F..., Franck G... et Denis H... constituent des fautes non détachables du service ; que leurs conséquences civiles relèvent de la seule appréciation des juridictions administratives, l'Etat devant, dans ce cas, garantir les victimes des conséquences dommageables des actes de ses agents quitte à exercer contre ces derniers l'action récursoire dont il dispose ; que, par contre, Bernard X... n'a reçu aucun ordre et c'est de sa seule initiative qu'il a commis ou commandé que soient commis les faits délictueux reprochés, que dès lors c'est sa seule responsabilité personnelle qui est engagée" (arrêt attaqué p. 3 6) ;
"alors que, premièrement, en tant que représentant de l'Etat dans le département, le préfet est dépositaire de l'autorité publique ; au titre de ses attributions, il tient de l'article R. 53 du Code de domaine de l'Etat le pouvoir de gérer le domaine public de l'Etat, de veiller à sa bonne administration et de faire cesser toute occupation irrégulière ; que, dès lors, en ordonnant la destruction d'un bien propriété de l'Etat, édifié sur le domaine public, le préfet ne fait qu'exercer ses attributions pour le compte de l'Etat ; qu'il s'ensuit qu'en ordonnant leur destruction - laquelle avait d'ailleurs été ordonnée par un jugement du tribunal administratif de Bastia rendu exécutoire par une mise en demeure du 24 novembre 1998 - et en incendiant les paillotes, dont il était constaté qu'elles appartenaient à l'Etat, Bernard X... et les différents prévenus n'ont pu détruire un bien appartenant à autrui ; que pour avoir décidé le contraire, les juges du fond n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations et ont violé les textes susvisés ;
"alors que, deuxièmement, la complicité suppose, au préalable, que les juges du fond aient caractérisé, aux termes de motifs suffisants et dépourvus de contradiction, les éléments constitutifs du délit en la personne des auteurs principaux ; que, par ailleurs, dès lors que les juges du fond ont constaté que Norbert B..., Lionel E..., Henri Y..., Eric F..., Gérard C..., Franck G... et Denis H... avaient agi dans l'exercice de leurs fonctions et qu'ils n'avaient pas commis de faute personnelle détachable du service, les juges du fond ne pouvaient considérer qu'ils s'étaient rendus coupables de destruction du bien d'autrui et que Bernard X..., en en donnant l'ordre, s'était rendu coupable de complicité de ces délits ; qu'en effet, si Norbert B..., Lionel E..., Henri Y..., Eric F..., Gérard C..., Franck G... et Denis H... ont agi dans le cadre de leurs fonctions, c'est qu'ils ont agi en tant que représentants de l'Etat, de sorte qu'en exécutant l'ordre d'incendier les paillotes, ils n'ont fait que disposer, dans le cadre des ordres hiérarchiques qui leur ont été donnés, d'un bien appartenant à l'Etat et pour le compte de celui-ci, que, partant, en statuant comme ils l'ont fait, les juges du fond n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations et ont violé les textes susvisés ;
"alors que, troisièmement, un représentant de l'Etat qui commet une faute agit dans l'exercice de ses fonctions lorsque cette faute n'est pas sans lien avec le service ; que, dès lors, à supposer l'Etat propriétaire des paillotes, les juges du fond auraient dû rechercher si Bernard X..., représentant de l'Etat pour la gestion du domaine public, agissait en son nom personnel ou dans l'exercice de ses fonctions ; qu'en se limitant à relever que le patrimoine du préfet était distinct de celui de l'Etat pour considérer qu'il y avait atteinte au bien d'autrui, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"et alors que, quatrièmement, il n'existe de faute personnelle détachable que si l'agent public qui en est à l'origine a agi en vue de la satisfaction d'un intérêt personnel ; d'où il suit qu'en considérant, et ce uniquement à l'occasion de l'examen de la responsabilité civile, que Bernard X... avait commis une faute personnelle détachable du service au motif qu'il avait donné l'ordre de détruire les paillotes sans avoir reçu lui-même de directives de sa hiérarchie, motifs impropres à établir l'existence d'une faute personnelle, et sans rechercher si Bernard X... avait agi dans un intérêt personnel, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu qu'en donnant l'ordre illégal de détruire par incendie des paillotes construites sans autorisation sur le domaine public, celles-ci seraient-elles devenues la propriété de l'Etat, Bernard X... ne saurait être considéré comme ayant satisfait, en sa qualité de préfet, à une obligation attachée à l'exercice de ses fonctions et exécutée pour le compte de l' Etat ; qu'en outre, la reconnaissance, au plan civil, d'une faute de service imputable aux auteurs principaux des destructions ne fait pas obstacle à l'engagement de la responsabilité pénale de ces derniers ainsi que de celle du préfet pour complicité ;
Qu'il s'ensuit que ce moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, proposé par Me Choucroy pour Henri Y..., pris de la violation des articles 322-6 et 122-4, alinéa 2, du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Henri Y... coupable de destruction de biens appartenant à autrui par l'effet d'un incendie et de complicité de cette infraction ;
"aux motifs que les paillotes étant propriété de l'Etat, entité juridique distincte de chacun des prévenus en sorte que l'élément constitutif du délit relatif à l'appartenance du bien détruit à autrui est bien rempli ; que si l'ordre de détruire un bien construit sans autorisation administrative sur le domaine public ou dont la démolition a été ordonnée par décision de justice est légitime venant de l'autorité préfectorale, il devient manifestement illégal lorsque des instructions sont données pour que la destruction se fasse de manière clandestine avec utilisation d'un procédé dangereux et en l'absence de réquisition de la force publique pour assurer la sécurité des biens et des personnes ; que le fait de laisser sur place des tracts destinés à égarer les enquêteurs sur l'identité des auteurs, fait compris dans les éléments portés à l'appréciation de la Cour, même s'il ne fait pas l'objet de poursuites distinctes, démontre au demeurant que pour l'autorité donneur d'ordre, l'illégitimité de l'action elle-même était évidente ; que Gérard C... et Henri Y..., respectivement sous-préfet et colonel de gendarmerie, ne pouvaient ignorer le caractère manifestement illégal d'une destruction par incendie, de nuit, en laissant des tracts sur place ; qu'aucun élément du dossier ne permet de soutenir que la situation en Corse au moment des faits exigeât que les paillotes soient détruites de manière clandestine ;
qu'à supposer même que la théorie des circonstances exceptionnelles, avancée par les prévenus, puisse s'appliquer en droit pénal, elle s'avère en conséquence dénuée de toute pertinence ;
"alors que, d'une part, la Cour qui a for- mellement reconnu que le préfet de Corse pouvait légalement ordonner la destruction des paillotes implantées sans autorisation sur le domaine public maritime et qui, de ce fait, étaient devenues propriété de l'Etat, a violé l'article 322-6 du Code pénal qui ne réprime que la destruction du bien d'autrui, en décidant que l'élément constitutif de cette infraction résultant de l'appartenance du bien détruit à autrui était réuni parce que ni le préfet, qui avait donné l'ordre de destruction, ni ses subordonnés qui l'avaient exécuté, n'étaient propriétaires des paillotes, les pouvoirs reconnus par les juges du fond au préfet de Corse représentant de l'Etat dans ce département faisant nécessairement disparaître l'élément constitutif de l'infraction poursuivie résultant de l'appartenance à autrui du bien détruit ;
"alors, d'autre part, que les juges du fond qui ont formellement constaté que le préfet de Corse s'était trouvé dans une situation exceptionnelle eu égard aux circonstances de sa nomination par le gouvernement qui en avait fait le pivot de l'action publique dans cette île en lui accordant une grande liberté d'initiative après l'assassinat de son prédécesseur, que cette situation très difficile, avait nécessairement rejailli sur l'image qu'en avait eue ses collaborateurs et qui ont également déclaré que ce préfet pouvait légitimement ordonner, comme il l'avait fait, la destruction des paillotes illégalement édifiées sur le domaine public maritime, se sont mis en contradiction manifeste avec leurs propres constatations en refusant néanmoins de reconnaître au prévenu le bénéfice des dispositions de l'article 122- 4, alinéa 2, du Code pénal sous prétexte que celui-ci ne pouvait ignorer le caractère manifestement illégal de l'ordre de destruction qui avait été donné par le préfet en raison de ses conditions de clandestinité, celles-ci découlant à l'évidence des circonstances exceptionnelles dont la Cour a pourtant reconnu la réalité" ;
Attendu que, pour écarter le fait justificatif du commandement de l'autorité légitime, prévu par l'article 122-4, alinéa 2, du Code pénal, l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, après avoir rappelé que Bernard X..., préfet de région, était une autorité légitime au sens du texte précité, relève que Henri Y..., colonel de gendarmerie, n'a pu se méprendre sur le caractère manifestement illégal de l'ordre donné, y compris dans une situation de crise exceptionnelle, alors que les destructions ordonnées devaient se faire de manière clandestine, en utilisant un moyen dangereux sans requérir la force publique pour assurer la sécurité des personnes et des biens, et en laissant sur les lieux des tracts diffamatoires destinés à égarer les enquêteurs sur l'identité des auteurs des faits ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, l'arrêt n'encourt pas les griefs allégués ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation, proposé par Me Foussard pour Bernard X..., pris de la violation des articles 111-3, 121-7, 322-1 et suivants du Code pénal, de l'article R. 53 du Code du domaine de l'Etat, de l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958, de l'article 34 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, du décret du 11 février 1998 portant nomination de Bernard X... en qualité de préfet de Corse et de Corse du sud, des articles 6 et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. le préfet X... à payer des dommages et intérêts aux parties civiles ;
"aux motifs que, "l'application la plus autorisée de la notion de faute détachable a été faite par une décision du tribunal des conflits du 19 octobre 1998 (préfet du Tarn Rec. Dalloz 1999, Jurisprudence p. 127) qui, saisi de la situation d'un fonctionnaire ayant réalisé un faux à la demande de son supérieur hiérarchique, a considéré que la faute commise alors que l'intéressé n'était animé par aucun intérêt personnel, qu'il avait agi dans l'exercice de ses fonctions et avec les moyens du service, ne pouvait, quelle que soit sa gravité, être considérée comme une faute personnelle détachable du service ; qu'il en résulte qu'il est sans conséquence sur la mise en cause de la responsabilité civile de l'Etat que pour l'exécution d'un ordre l'agent public ait commis un délit dès lors qu'il est dans l'exercice de sa fonction et qu'est constatée l'absence d'intérêt personnel ( ... ) ; que la Cour considère cette analyse comme pertinente substantiellement et adaptée au cas d'espèce pour les prévenus qui, sur ordre, ont agi dans le cadre même de leurs fonctions en en utilisant les prérogatives, les pouvoirs et les moyens et, s'ils ont eu une vision erronée de leur mise en oeuvre et de l'intérêt public, n'ont jamais poursuivi aucun intérêt privé ; (...) ; qu'en conséquence, il sera retenu que les délits établis à l'encontre des prévenus Henri Y..., Gérard C..., Norbert B..., Lionel E..., Eric F..., Franck G... et Denis H... constituent des fautes non détachables du service ; que leurs conséquences civiles relèvent de la seule appréciation des juridictions administratives, l'Etat devant, dans ce cas, garantir les victimes des conséquences dommageables des actes de ses agents quitte à exercer contre ces derniers l'action récursoire dont il dispose ; que, par contre, Bernard X... n'a reçu aucun ordre et c'est de sa seule initiative qu'il a commis ou commandé que soient commis les faits délictueux reprochés, que dès lors c'est sa seule responsabilité personnelle qui est engagée" (arrêt attaqué p. 36) ;
"alors qu'il n'existe de faute personnelle détachable que si l'agent public qui en est à l'origine a agi en vue de la satisfaction d'un intérêt personnel ; d'où il suit qu'en considérant que Bernard X... avait commis une faute personnelle détachable du service au seul motif qu'il avait donné l'ordre de destruction des paillotes sans en avoir reçu lui-même de directives de sa hiérarchie, motifs impropres à établir l'existence d'une faute personnelle, sans rechercher si Bernard X... avait agi dans un intérêt personnel, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu que, pour retenir la responsabilité civile de Bernard X... sur le fondement d'une faute personnelle détachable du service, l'arrêt attaqué énonce que le préfet n'a reçu aucun ordre de quiconque, ayant, de sa seule initiative, commis les faits délictueux ou ordonné qu'ils fussent commis ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu' être écarté ;
Sur le cinquième moyen de cassation, proposé par Me Foussard pour Bernard X..., pris de la violation des articles 1382 et 1383 du Code civil, des articles 111-3, 121-7, 322-1 et suivants du Code pénal, de l'article L. 146-4, III, du Code de l'urbanisme, ensemble les articles 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. le préfet X... à payer des dommages et intérêts aux parties civiles ;
"aux motifs que, "l'application la plus autorisée de la notion de faute détachable a été faite par une décision du tribunal des conflits du 19 octobre 1998 (préfet du Tarn Rec. Dalloz 1999, Jurisprudence p. 127) qui, saisi de la situation d'un fonctionnaire ayant réalisé un faux à la demande de son supérieur hiérarchique, a considéré que la faute commise alors que l'intéressé n'était animé par aucun intérêt personnel, qu'il avait agi dans l'exercice de ses fonctions et avec les moyens du service, ne pouvait, quelle que soit sa gravité, être considérée comme une faute personnelle détachable du service ; qu'il en résulte qu'il est sans conséquence sur la mise en cause de la responsabilité civile de l'Etat que pour l'exécution d'un ordre l'agent public ait commis un délit dès lors qu'il est dans l'exercice de sa fonction et qu'est constatée l'absence d'intérêt personnel ( ... ) ; que la Cour considère cette analyse comme pertinente substantiellement et adaptée au cas d'espèce pour les prévenus qui, sur ordre, ont agi dans le cadre même de leurs fonctions en en utilisant les prérogatives, les pouvoirs et les moyens et, s'ils ont eu une vision erronée de leur mise en oeuvre et de l'intérêt public, n'ont jamais poursuivi aucun intérêt privé ; (...) ; qu'en conséquence, il sera retenu que les délits établis à l'encontre des prévenus Henri Y..., Gérard C..., Norbert B..., Lionel E..., Eric F..., Franck G... et Denis H... constituent des fautes non détachables du service ; que leurs conséquences civiles relèvent de la seule appréciation des juridictions administratives, l'Etat devant, dans ce cas, garantir les victimes des conséquences dommageables des actes de ses agents, quitte à exercer contre ces derniers l'action récursoire dont il dispose ; que, par contre, Bernard X... n'a reçu aucun ordre et c'est de sa seule initiative qu'il a commis ou commandé que soient commis les faits délictueux reprochés, que dès lors c'est sa seule responsabilité personnelle qui est engagée ; (...) que sur les demandes de MM. I... et J..., chacun demande les sommes de 2 150 euros au titre du préjudice matériel et 4 500 euros au titre du préjudice moral ; que toutefois, ainsi qu'ils l'indiquent eux-mêmes dans leurs écritures, ils n'apportent aucun élément de preuve sur leur préjudice d'autant plus hypothétique qu'il n'existait pas d'exploitation au moment des faits ; que l'allocation d'un euro au titre du préjudice moral sera confirmée car aucun élément de conviction n'est proposé pour évaluer différemment celui-ci ( ... ) ;
que sur les demandes d'Yves Z..., il soutient qu'il est propriétaire des matériaux de construction de la paillote qu'il devait d'ailleurs démonter et qu'il est bien fondé à demander la somme de 56 302,213 euros correspondant à la différence entre leur évaluation par expertise et l'indemnité reçue par sa compagnie d'assurance ; qu'il a déjà été indiqué que la paillote n'était pas une propriété privée mais celle de l'Etat ; que la position prise par une compagnie d'assurance dans un cadre contractuel propre aux parties ne saurait modifier cette situation ; qu'il en va de même d'une mesure administrative relative à la disposition des lieux ; que cette demande ne sera pas accueillie ; que les premiers juges ont par ailleurs justement apprécié son dommage moral qu'ils ont évalué à 4 175 euros, montant qui sera confirmé ; que sur les demandes de Brigitte A..., épouse Z..., il convient de retenir, au titre de son préjudice moral, la même somme que pour son mari soit 4 175 euros ; que sur la demande de la société Serena venant aux droits de la société Chez Francis, il convient de confirmer la somme allouée au titre des honoraires d'expertise des dommages soit de 1 837,05 euros comme celle relative à la perte du stock soit 7 183,44 euros, ce qui aboutit à une somme totale de 9 720,49 euros" (arrêt attaqué p. 36, p. 37, 1, 2, 6, 7, 8 et 9, et p. 38, 1) ;
"alors que, premièrement, lorsqu'une partie participe à la création d'une situation illicite, elle ne peut ensuite obtenir réparation du préjudice qu'elle subit et qui trouve son origine dans la situation illicite à laquelle elle a concouru ; qu'à ce titre, ne saurait ouvrir droit à réparation le dommage causé à des occupants irréguliers du domaine public par les mesures prises en vue de mettre fin à leur occupation alors même que ces mesures seraient elles-mêmes irrégulièrement décidées ou exécutées ; qu'au cas d'espèce, en accueillant, pour partie, les demandes formées par les exploitants des paillotes alors qu'ils avaient constaté que celles-ci avaient été irrégulièrement construites sur le domaine public maritime et que dès lors leurs exploitants étaient des occupants irréguliers, les juges du fond n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations et ont violé les textes susvisés ;
"alors que, deuxièmement, en ne recherchant pas si les exploitants des paillotes n'avaient pas commis une faute ayant contribué à la réalisation de leur dommage et si, partant, Ieur droit à indemnisation ne devait pas être limité, les juges du fond ont en tout état de cause privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu que, faute d'avoir été proposé devant les juges du fond, ce moyen, mélangé de fait, est nouveau et, comme tel, irrecevable ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Tiffreau pour Yves Z..., Brigitte A..., épouse Z..., et la société Serena venant aux droits de la société "Chez Francis", pris de la violation des articles 1382 du Code civil, L. 28 du Code du domaine de l'Etat, 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, 1er du 1er Protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 593 du Code procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel, statuant sur l'action civile des demandeurs, "se déclare incompétente pour statuer sur les demandes de dommages- intérêts présentées à l'encontre de Gérard C..." et "Henri Y..." ;
"aux motifs que, "tous les prévenus appartiennent à la fonction publique civile ou militaire ; il convient d'examiner si leurs fautes pénales doivent entraîner leur responsabilité civile ;
en ce domaine, les juridictions judiciaires ne sont compétentes pour examiner celle-ci que s'il existe une faute personnelle dépourvue de tout lien avec le service ou une faute personnelle détachable du service ; les circonstances de fait exposées ci-dessus montrent que l'on ne se trouve pas dans la première situation, mais dans la seconde ; l'application la plus autorisée de la notion de faute détachable a été faite par une décision du tribunal des conflits du 19 octobre 1998 (préfet du Tarn, Rec. Dalloz, 1999, Jurisprudence, p. 127) qui, saisi de la situation d'un fonctionnaire ayant réalisé un faux à la demande de son supérieur hiérarchique, a considéré que la faute commise alors que l'intéressé n'était animé par aucun intérêt personnel, qu'il avait agi dans l'exercice de ses fonctions et avec les moyens du service, ne pouvait, quelle que soit sa gravité, être considérée comme une faute personnelle détachable du service ; il en résulte qu'est sans conséquence sur la mise en cause de la responsabilité civile de l'Etat que, pour l'exécution d'un ordre, l'agent public ait commis un délit dès lors qu'il est dans l'exercice de sa fonction et qu'est constatée l'absence d'intérêt personnel ; la réunion de ces trois critères correspond effectivement à ce qui caractérise l'action d'une personne comme fonctionnaire par rapport à ses activités privées ; la Cour considère cette analyse comme pertinente substantiellement et adaptée au cas d'espèce pour les prévenus qui, sur ordre, ont agi dans le cadre même de leurs fonctions en utilisant les prérogatives, les pouvoirs et les moyens et, s'ils ont eu une vision erronée de leur mise en oeuvre et de l'intérêt public, n'ont jamais poursuivi un intérêt privé ; l'application de ces critères est également justifiée procéduralement puisqu'ils ont été définis par la juridiction suprême de départage entre les ordres judiciaire et administratif et que la Cour est saisie du même type de problématique ; en conséquence, il sera retenu que les délits établis à l'encontre des prévenus Henri Y..., Gérard C... (...) constituent des fautes non détachables du service ;
leurs conséquences civiles relèvent de la seule appréciation des juridictions administratives, l'Etat devant, dans ce cas, garantir les victimes des conséquences dommageables des actes de ses agents quitte à exercer contre ces derniers l'action récursoire dont il dispose ; il y a donc lieu de rejeter les demandes les concernant personnellement " ;
"alors que 1 ), en déclarant successivement que "les juridictions judiciaires ne sont compétentes (...) que s'il existe une faute personnelle dépourvue de tout lien avec le service ou une faute personnelle détachable du service, les circonstances de fait exposées ci-dessus montrent que l'on ne se trouve pas dans la première situation, mais dans la seconde", c'est-à-dire en présence d'une faute personnelle détachable du service, puisque "les délits établis à l'encontre des prévenus Henri Y..., Gérard C... (
... ) constituent des fautes non détachables du service", la cour d'appel s'est contredite et a violé les textes susvisés ;
"alors que 2 ), au surplus, il résulte des propres constatations de la cour d'appel que, "chef de la Légion de gendarmerie" (arrêt, p. 11), "Henri Y... a indiqué" (qu'il) "lui avait semblé, en outre, que l'Etat étant bafoué en permanence, ce pouvait être l'occasion de marquer un coup d'arrêt" (arrêt, p. 17), que, "ne voulant pas décevoir une nouvelle fois le préfet, comme après la première tentative, le colonel ne lui en disait rien" arrêt, p. 21), qu'il avait "incendié une première paillote" (arrêt, p. 15), "donné l'ordre de faire effectuer l'opération" sur la seconde paillote, (arrêt, p. 32), que "l'ordre de détruire un bien ( ... ) devient manifestement illégal lorsque des instructions sont données pour que la destruction se fasse de manière clandestine, avec utilisation d'un procédé dangereux et en l'absence de réquisition de la force publique pour assurer la sécurité des biens et des personnes ; le fait de laisser sur les lieux des tracts destinés à égarer les enquêteurs sur l'identité des auteurs (...) démontre que (...) l'illégitimité de l'action elle-même était évidente" (arrêt, p. 32) et que, "colonel de gendarmerie", il "ne pouva(it) ignorer le caractère manifestement illégal d'une destruction par incendie, de nuit, en laissant des tracts sur place" (arrêt, p. 33) ; qu'il en ressort que, d'initiative et sciemment, le prévenu est sorti du cadre de ses fonctions de commandement de la Légion de Gendarmerie pour accomplir deux actes de destruction volontaire pénalement répréhensibles et d'une gravité exceptionnelle, portant ainsi atteinte à l'autorité de l'Etat qui l'avait investi de sa confiance ; que dès lors, en écartant sa faute personnelle détachable du service, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"alors que 3 ), au surplus, il résulte des constatations de la cour d'appel que, "fonctionnaire expérimenté" (arrêt, p. 35), "sous-préfet" (arrêt, p. 16) et "directeur de cabinet" du préfet (arrêt, p. 12), Gérard C... avait "proposé la première opération" (arrêt, p. 18) et "incendié une première paillote" (arrêt, p. 15), qu'il avait "procédé à de nouvelles reconnaissances" (arrêt, p. 18) et à des "repérages" (arrêt, p. 32) en vue de la destruction de la seconde paillote, qu'il a ensuite participé à "la destruction de la photocopieuse de la préfecture" ayant servi à la confection des tracts laissés sur place après la destruction de la seconde paillote (arrêt, p. 31), que "l'ordre de détruire un bien (...) devient manifestement illégal lorsque des instructions sont données pour que la destruction se fasse de manière clandestine, avec utilisation d'un procédé dangereux et en l'absence de réquisition de la force publique pour assurer la sécurité des biens et des personnes ; le fait de laisser sur les lieux des tracts destinés à égarer les enquêteurs sur l'identité des auteurs (... ) démontre que (...) l'illégitimité de l'action elle-même était évidente" (arrêt, p. 32) et que, "colonel de gendarmerie", il "ne pouva(it) ignorer le caractère manifestement illégal d'une destruction par incendie, de nuit, en laissant des tracts sur place" (arrêt, p. 33) et "ne pouvait pas ne pas comprendre la gravité des sollicitations dont il faisait l'objet de la part du préfet ; au lieu d'y résister, il a proposé la première opération et réalisé lui-même un incendie alors qu'il était l'un des principaux représentants de l'Etat (...) il a poursuivi sa collaboration pour la seconde opération" (arrêt, p. 35) ; qu'il en ressort que, d'initiative et sciemment, le prévenu est sorti du cadre de ses fonctions de haut fonctionnaire préfectoral pour accomplir trois actes de destruction volontaire pénalement répréhensibles et d'une gravité exceptionnelle, portant ainsi atteinte à l'autorité de l'Etat qui l'avait investi de sa confiance ; que dès lors, en écartant sa faute personnelle détachable du service, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu que, pour retenir à l'encontre de Gérard C... et Henri Y... une faute de service dont les conséquences civiles ressortissent à la seule compétence des juridictions administratives, les juges relèvent que les prévenus ont agi sur ordre, dans le cadre de leurs fonctions, en usant des prérogatives, pouvoirs et moyens en résultant et sans poursuivre d'intérêt personnel ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Tiffreau pour Yves Z..., Brigitte A..., épouse Z..., et la société Serena venant aux droits de la société "Chez Francis", pris de la violation des articles 1382 du Code civil, L. 28 du Code du domaine de l'Etat, 1er du 1er Protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 593 du Code procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel déboute Yves Z... de sa demande en réparation de son préjudice matériel consécutif à la destruction de sa paillote par l'effet de l'incendie volontaire imputable aux gendarmes et dont Bernard X... a été déclaré complice ;
"aux motifs qu' "il a été déjà été indiqué que la paillote n'était pas une propriété privée, mais celle de l'Etat ; la position prise par une compagnie d'assurance dans un cadre contractuel propre aux parties ne saurait modifier cette situation ; il en va de même d'une mesure administrative relative à la disposition des lieux" (arrêt attaqué, p. 37) ; que "par jugement, en date du 4 mai 1995, le tribunal administratif de Bastia a condamné Yves Z... à remettre dans leur état primitif les lieux qu'il occupait sans titre sur le domaine public maritime au lieudit plage Cala d'Orzu ; en ses motifs, la juridiction administrative a considéré que l'emplacement servant d'assiette au bar restaurant était situé sans autorisation sur le domaine public maritime en visant l'ensemble des pièces du dossier et non seulement le procès-verbal de grande voirie dressé en 1992 mais aussi constaté que l'établissement d'Yves Z... est édifié sans autorisation sur le domaine public maritime ; aucune des parties au procès n'établit l'existence d'un fait nouveau intervenu entre le prononcé de cette décision et la commission des faits permettant de remettre en cause l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 4 mai 1995 en ce qui concerne la situation du domaine public maritime ;
il importe peu sur ce point qu'une procédure de délimitation du domaine ait été entreprise sur la plage de Cala d'Orzu depuis lors, cette procédure ne pouvant remettre en cause la chose jugée au moment des faits (...) " ; par ailleurs, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'accord intervenu le 9 avril 1999 entre les exploitants et l'autorité préfectorale ne constitue pas une autorisation d'occupation temporaire dont la forme et le contenu sont définis expressément par les articles L. 28 et R. 57-1 du Code du domaine de l'Etat, mais un simple sursis à exécution ne pouvant constituer une autorisation de jouissance et encore moins un titre de propriété ; il apparaît en conséquence que la paillote chez Francis était au moment des faits édifiée sur le domaine public maritime (...)" ; (arrêt attaqué, p. 28) ;
"alors que 1 ), la délimitation du domaine public maritime est la constatation d'une situation de fait à un moment déterminé et portant sur des faits résultant de l'observation de phénomènes naturels susceptibles de changements ultérieurs ; que, dans ses conclusions d'appel, Yves Z... faisait valoir que, "dans un courrier, en date du 21 juin 2001 adressé par Bruno K..., secrétaire général de la préfecture de Corse du Sud, à l'avocat conseil d'Yves Z... dans le cadre d'une instance pendante (requête en délimitation du DPM) devant le tribunal administratif de Bastia, il est clairement écrit que l'Administration procédera à la délimitation du domaine public maritime à Cala d'Orzu en 2002 ; que, par ailleurs, le 12 août 1999, le directeur régional et départemental de l'Equipement répondait par courrier à l'avocat d'Yves Z... "suite à votre lettre, je vous informe qu'aucun arrêté de délimitation du DPM n'existe pour les secteurs de (...) Cala d'Orzu" ; qu'il appartenait donc à la cour d'appel de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de la procédure administrative de délimitation précitée ou d'instituer une expertise à l'effet de trancher la question préjudicielle de l'appartenance ou non au domaine public maritime du terrain d'implantation de la paillote lors de sa destruction volontaire par autrui ;
que dès lors, en écartant ces conclusions tendant à la réparation du préjudice causé par la destruction volontaire de la paillote dans la nuit du 19 au 20 avril 1999, au seul motif pris de l'autorité de la chose jugée attachée à un jugement du 4 mai 1995 du tribunal administratif de Bastia, qui n'avait d'ailleurs pas statué sur la délimitation du domaine public maritime à dires d'expert, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
"alors que 2 ), à supposer par hypothèse que la paillote appartînt par accession à l'Etat par l'effet de son implantation sur une parcelle appartenant au domaine public maritime, Yves Z... n'en avait pas moins rappelé dans ses conclusions d'appel qu'il "s'était engagé par courrier, en date du 10 avril 1999, à démonter son bâtiment au plus tard le 30 octobre 1999" et "qu'en conséquence, les matériaux de construction ne devaient en aucun cas être démolis, mais démontés ; que l'Etat n'a jamais revendiqué la propriété des matériaux de construction (...) que l'incendie a ravagé le restaurant lui faisant perdre la totalité des matériaux de construction ; qu'en l'absence de cet incendie Yves Z... aurait récupéré sa matière première qui est toujours restée sa propriété" ; qu'ainsi, Yves Z... faisait valoir que l'incendie lui avait causé un préjudice matériel qu'il n'aurait pas subi s'il avait simplement démonté sa paillote, comme il s'y était engagé par écrit quelques jours plus tôt, qu'en omettant de s'en expliquer, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu que, pour rejeter la demande en réparation du préjudice matériel des parties civiles, l'arrêt attaqué énonce que la paillotte "Chez Francis", construite sur le domaine public maritime, était devenue propriété de l'Etat, même si un sursis à exécution avait été accordé à l'occupant des lieux pour en entreprendre la destruction ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision dès lors qu'au surplus, la démolition n'étant pas intervenue à la date des faits, les matériaux de construction, immeubles par destination, demeuraient également propriété de l'Etat ;
Qu'il s'ensuit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le treize octobre deux mille quatre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;