AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que Mme X..., employée de la société Lever Fabergé, a été victime le 28 novembre 1994 d'un accident du travail, dont la consolidation a, dans un premier temps, été fixée au 27 avril 1999 ; que la caisse primaire d'assurance maladie, après avoir fait procéder, à la demande de Mme X..., à une expertise médicale, a fixé au 31 octobre 1999 la date de consolidation de celle-ci ; que l'employeur a contesté l'opposabilité de cette décision ; que la cour d'appel (Amiens, 20 mai 2003) a rejeté la demande de la société ;
Attendu que celle-ci fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1 / que la décision d'une caisse primaire d'assurance maladie rendue après expertise n'est opposable à une partie que si celle-ci a été appelée ou représentée dans le cadre de la procédure d'instruction ; qu'en l'espèce, la société Lever Fabergé n'ayant pas été appelée à l'expertise médicale diligentée à la demande de Mme X..., la décision de la Caisse qui a fait suite à cette expertise et fixé la date de consolidation au 31 octobre 1999 était donc inopposable à l'employeur ;
qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L.141-1 et R.141-1 du Code de la sécurité sociale et les articles 6-1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2 / qu'en toutes hypothèses, l'expertise technique étant inopposable à l'employeur qui n'y a pas été appelé, il appartient au juge judiciaire, au besoin d'office, de solliciter une expertise médicale pour trancher la contestation de l'employeur ; qu'il n'incombe pas spécialement à l'employeur qui n'est pas débiteur de la preuve de demander une expertise judiciaire ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil, les articles L.141-1 et R.141-1et suivants du Code de la sécurité sociale et les articles 6-1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que si la procédure d'expertise médicale technique à laquelle donnent lieu les contestations relatives à l'état de santé du malade ou à l'état de la victime, notamment à la date de la consolidation en cas d'accident du travail mise en oeuvre dans les seuls rapports de la Caisse et de l'assuré, n'est pas opposable à l'employeur, cette inopposabilité n'entraîne pas celle de la décision de la Caisse prise à la suite de cette expertise ;
Et attendu qu'il appartenait à l'employeur de rapporter la preuve que l'incapacité de travail de Mme X... indemnisée par la Caisse au-delà du 27 avril 1999 n'avait pas pour origine l'accident du travail survenu à son service ; qu'ayant constaté qu'une telle preuve n'était pas rapportée, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'ordonner une mesure d'expertise qui ne lui était pas demandée, a débouté la société de sa demande ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Lever Fabergé aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Lever Fabergé ; la condamne à payer à la CPAM de Beauvais la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille quatre.