AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze janvier deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GAILLY, les observations de la société civile professionnelle DELAPORTE, BRIARD, et TRICHET, de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS et de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Elda,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème chambre, en date du 28 novembre 2003, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de blessures involontaires et infraction au Code de la route, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 470-1, 512 et 591 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a statué sur les intérêts civils et condamné cette dernière à verser à Elisa Y... une provision de 4 000 euros ;
"aux motifs que, "d'après les déclarations de David Z... et de son passager, A...
B..., qui ne sont pas parties à l'instance, ni liés aux parties, le véhicule Fiat Punto, qui roulait avenue Charles Vaillant dans le même sens que le véhicule Renault 11 à bord duquel ces deux témoins se trouvaient, s'est engagé dans l'intersection alors que le feu était au vert ; qu'il résulte des constatations des enquêteurs, des auditions des protagonistes et du plan qui a été établi par les fonctionnaires de police qu'en réalité le véhicule Fiat Punto roulait sur le même axe que le véhicule Renault 11, mais arrivait en sens inverse ;
que cette circonstance n'est pas de nature à contredire l'affirmation des témoins selon laquelle le véhicule Fiat Punto, conduit par M. C..., est passé alors que le feu était vert pour les véhicules empruntant l'avenue Charles Vaillant, et rouge pour les véhicules abordant l'intersection par l'avenue Henri Barbusse ;
qu'aucun élément du dossier ne fait, en effet, état d'un décalage entre les feux équipant ce carrefour ;
qu'il en résulte qu'Elda X... a franchi un feu rouge et a commis une faute qui est à l'origine des blessures d'Elisa Y... lesquelles résultent d'un certificat médical constatant une incapacité totale de travail de 15 jours ; que les éléments constitutifs des infractions reprochées à la prévenue sont donc réunis ;
qu'elle sera déclarée entièrement responsable des conséquences de l'accident" (arrêt p. 6, alinéas 2 à 5) ;
"alors que, les juges ne peuvent, en cas de relaxe, condamner la partie civile au paiement de dommages et intérêts en application des règles du droit civil, s'ils n'ont pas été saisis d'une demande en ce sens avant la clôture des débats ; qu'en se prononçant sur les intérêts civils, sans constater que les parties civiles avaient formé, avant la clôture des débats, une demande tendant à ce qu'en cas de relaxe, elles puissent néanmoins obtenir la réparation de leur préjudice, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'Elisa Y..., victime d'un accident de la circulation, a seule interjeté appel du jugement relaxant Elda X... des chefs de blessures involontaires et inobservation d'un feu de signalisation ;
Attendu qu'en statuant sur l'action civile en l'absence de demande de la partie civile fondée sur l'article 470-1 du Code de procédure pénale, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet, la faculté donnée à la partie civile, par l'article 497 dudit code, d'interjeter appel dans l'instance pénale quant à ses intérêts civils est un droit spécifique, général et absolu auquel l'article 470-1 précité n'apporte aucune limite ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-20-1 du Code pénal, L. 232-2 du Code de la route, R. 412-30 du Code de la route, 485, 512, 591, 593 du Code de procédure pénale, de l'article préliminaire du Code de procédure pénale et de la présomption d'innocence ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué, statuant sur les seuls intérêts civils, a dit que les éléments constitutifs des infractions de blessures involontaires et de non respect d'un feu rouge reprochées à Elda X... étaient réunis et a condamné cette dernière à verser à Elisa Y... une provision de 4 000 euros ;
"aux motifs que, "d'après les déclarations de David Z... et de son passager, A...
B..., qui ne sont pas parties à l'instance, ni liés aux parties, le véhicule Fiat Punto, qui roulait avenue Charles Vaillant dans le même sens que le véhicule Renault 11 à bord duquel ces deux témoins se trouvaient, s'est engagé dans l'intersection alors que le feu était au vert; qu'il résulte des constatations des enquêteurs, des auditions des protagonistes et du plan qui a été établi par les fonctionnaires de police qu'en réalité le véhicule Fiat Punto roulait sur le même axe que le véhicule Renault 11, mais arrivait en sens inverse ;
que cette circonstance n'est pas de nature à contredire l'affirmation des témoins selon laquelle le véhicule Fiat Punto, conduit par M. C..., est passé alors que le feu était vert pour les véhicules empruntant l'avenue Charles Vaillant, et rouge pour les véhicules abordant l'intersection par l'avenue Henri Barbusse ;
qu'aucun élément du dossier ne fait, en effet, état d'un décalage entre les feux équipant ce carrefour ;
qu'il en résulte qu'Elda X... a franchi un feu rouge et a commis une faute qui est à l'origine des blessures d'Elisa Y... lesquelles résultent d'un certificat médical constatant une incapacité totale de travail de 15 jours ; que les éléments constitutifs des infractions reprochées à la prévenue sont donc réunis ;
qu'elle sera déclarée entièrement responsable des conséquences de l'accident" (arrêt p. 6, alinéas 2 à 5) ;
"alors que les constatations et auditions faites par les services de la police ne comportaient que des déclarations contradictoires sur le point de savoir si les véhicules de MM. Z... et C... roulaient dans le même sens de circulation ou en sens opposé ; que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, relever qu'il résultait des constatations des enquêteurs et des auditions des protagonistes que les véhicules de M. Z... et de M. C... roulaient en sens inverse ;
"alors, en tout état de cause et à supposer que la circonstance que les deux véhicules circulaient en sens inverse ait pu être déterminée, qu'en affirmant que cette circonstance ne remettait pas en cause l'affirmation de David Z... et de son passager sur la couleur des feux tricolores lorsque les trois véhicules impliqués dans l'accident se sont engagés dans l'intersection, sans s'interroger sur les raisons pour lesquelles David Z... et son passager auraient toujours menti sur leur sens de circulation et sans rechercher si ce mensonge n'était pas de nature à jeter le discrédit sur l'ensemble de leurs déclarations, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, après avoir répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a estimé, sans insuffisance ni contradiction, que les éléments du délit de blessures involontaires étaient réunis à la charge d'Elda X..., justifiant ainsi l'octroi à Elisa Y... d'une indemnité provisionnelle à valoir sur la réparation de son préjudice ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme qu'Elda X... devra payer à Elisa Y... au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Farge conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Gailly conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;