AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme Jacqueline X..., à M. Tristan Y..., à Mme Joëlle Z... et à Mme A... de ce qu'ils reprennent l'instance, ès qualités d'ayants droit de Patrice Y... et de Michel B... ;
Sur le moyen unique :
Attendu que les demandeurs au pourvoi font grief au jugement attaqué (conseil de Prud'hommes de Villefranche-sur-Saône, 28 juin 2002) statuant sur renvoi d'un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation rendu le 28 mars 2001 de les avoir déboutés de leur demande de rappel d'indemnité compensatrice de salaire correspondant à une période de chômage technique alors, selon le moyen :
1 / que dès lors que des salariés invoquent l'existence d'une discrimination en soumettant au juge des éléments de fait susceptibles de démontrer une disparité, celui-ci doit vérifier l'existence de cette disparité et, si elle est démontrée, exiger de l'employeur qu'il établisse qu'elle est justifiée par des critères objectifs étrangers à toute volonté discriminatoire ; qu'en ne s'expliquant aucunement sur les conclusions des salariés, qui soutenaient qu'ils avaient été victimes d'une sélection discriminatoire fondée sur leur appartenance à la catégorie des ouvriers, dès lors que les agents de maîtrise et les techniciens avaient continué de travailler, qu'une partie de leur activité avait été confiée à la sous-traitance, et que leur travail avait repris immédiatement après la fin de la grève, ce qui établissait l'absence de contrainte en ce qui concernait leur cas individuel, le conseil de prud'hommes, qui n'a pas rempli son office, a violé, par refus d'application, l'article L. 122-45 du Code du travail ;
2 / que l'employeur n'est dégagé de son obligation de payer qu'en établissant l'existence d'une situation contraignante revêtant les caractères imprévisible, irrésistible et inévitable de la force majeure ; qu'en ne s'expliquant pas sur les conclusions des salariés qui soutenaient, en premier lieu, que la direction de l'entreprise avait annoncé, en même temps, le retrait de ses propositions de négociations et les mesures de chômage technique et, en second lieu, qu'elle ne pouvait invoquer l'existence d'un piquet de grève, alors qu'elle n'avait sollicité aucune intervention judiciaire à ce titre, et qu'en outre elle avait refusé la mise en place d'une procédure de médiation sollicitée par les organisations syndicales, le conseil de prud'hommes a violé, par refus d'application, l'article 1134 du Code civil ;
3 / que l'employeur n'est exonéré de son obligation de fournir du travail et de payer un salaire aux salariés non grévistes qu'à la condition que la grève ait entraîné une paralysie effective de l'entreprise à la date de la mise en oeuvre de la mesure de mise au chômage technique ; que la simple perspective d'une paralysie éventuelle ne constitue pas une situation contraignante justifiant une mise en chômage technique ; qu'en constatant de façon inopérante que l'arrêt des unités de production ne pouvait qu'entraîner la paralysie progressive des autres secteurs une fois les possibilités de travail épuisées, sans relever qu'à la date de la mise en oeuvre du chômage technique, l'épuisement des possibilités de travail et la paralysie de l'entreprise étaient établies, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que le conseil de prud'hommes, qui a constaté, répondant aux conclusions prétendument délaissées, que la grève du secteur de production, qui était totale, avait progressivement entraîné la paralysie du secteur "travaux", empêchant le maintien des tâches d'exécution et que l'employeur avait attendu que le fonctionnement de l'entreprise soit bloqué pour recourir à la mise en chômage technique, a pu, par ces seuls motifs, décider que la société Atofina s'était trouvée, du fait de la grève, dans une situation contraignante, qui ne lui était pas imputable et qui rendait impossible la fourniture de travail aux salariés non grévistes ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Atofina ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille cinq.