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11/05/2005 | FRANCE | N°03-17494

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 mai 2005, 03-17494


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 mai 2003), d'une part, qu'un accord collectif du 21 octobre 1998 a mis en place au sein de la société Nestlé Waters et notamment sur le site d'Issy-les-Moulineaux un système d'horaires individualisés permettant aux salariés, dans le cadre d'une amplitude horaire comprise entre 7 heures 30 et 20 heures, de déterminer leur temps de travail journalier, avec possibilité d'un report de 5 heures d'une semaine sur l'autre et de 8 heures par

mois sur le mois suivant ; que faisant valoir que si la loi prévoit l...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 mai 2003), d'une part, qu'un accord collectif du 21 octobre 1998 a mis en place au sein de la société Nestlé Waters et notamment sur le site d'Issy-les-Moulineaux un système d'horaires individualisés permettant aux salariés, dans le cadre d'une amplitude horaire comprise entre 7 heures 30 et 20 heures, de déterminer leur temps de travail journalier, avec possibilité d'un report de 5 heures d'une semaine sur l'autre et de 8 heures par mois sur le mois suivant ; que faisant valoir que si la loi prévoit la possibilité d'un report des heures d'un mois sur l'autre, cette règle de report ne peut avoir pour objet ou pour effet de faire disparaître l'enregistrement et le décompte des heures de travail effectuées par chaque salarié, que la pratique dite de l'écrêtage qui consiste en un non-enregistrement des heures effectuées par les salariés au-delà des huit heures mensuelles reportées, constitue une violation des articles D. 212-21 et L. 212-1-1 du Code du travail, que la mise en place d'un second contrôle manuel du temps de travail à la seule initiative de l'employeur et en l'absence d'une information-consultation du comité d'entreprise et de négociations avec les organisations syndicales est illicite dès lors qu'elle permet à l'employeur de se faire juge du paiement des heures supplémentaires, la Fédération générale agroalimentaire de la CFDT, le syndicat CFDT Perrier-Vittel France, le comité d'établissement Nestlé Waters France, le comité d'établissement Perrier-Vittel France, MM. X... et Y... ont saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir ordonner qu'il soit procédé, sous astreinte, à la mise en place d'un système d'enregistrement automatique fiable et infalsifiable des heures de travail ;

Que, d'autre part, le 10 mars 1999 a été conclu, dans le cadre de la Convention collective nationale des activités de production des eaux embouteillées et boissons rafraîchissantes sans alcool et de bière, un accord collectif relatif à la réduction du temps de travail ; qu'il prévoit en son article 8 que les personnels affectés aux forces de vente, du fait de la nature et de l'autonomie de leur activité, bénéficieront des mêmes dispositions que celles prévues à l'article 7 qui, s'agissant des cadres, organise un temps de travail en jours ; que soutenant que la plupart des commerciaux, n'étant pas cadres, ne pouvaient se voir appliquer un forfait en jours, les demandeurs au pourvoi ont sollicité de la juridiction prud'homale de dire inapplicable aux salariés concernés l'accord de branche du 10 mars 1999 et de voir qualifier de temps de travail effectif le temps consacré par les commerciaux à leurs travaux administratifs effectués à leur domicile et aux déplacements entre leur domicile et le premier client d'une part, leur dernier client et leur domicile d'autre part ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré conforme aux dispositions légales le dispositif de décompte des heures de travail instauré par l'employeur alors, selon le moyen :

1 / que "la pratique de l'écrêtage" relevée, qui consiste, selon les demandeurs à l'action, en la disparition de toute trace de l'enregistrement du travail du salarié d'un mois sur l'autre, au-delà des 8 heures mensuelles reportées, procède nécessairement d'une falsification du système d'enregistrement, en violation de l'article L. 212-1-1 du Code du travail ; qu'en s'abstenant de définir cette pratique de l'écrêtage, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de ces dispositions ;

2 / que les demandeurs faisaient valoir que cette pratique empêche tout contrôle sur la durée quotidienne et hebdomadaire de travail, en violation de l'article D. 212-21 du Code du travail ; qu'en ne se prononçant pas de ce chef, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de ces dispositions ;

3 / que, dans leur conclusions, les demandeurs à l'action faisaient valoir que cette pratique avait pour effet de faire disparaître environ 160 heures travaillées par mois, ce qui pouvait être apparenté, selon l'Inspection du Travail, à du travail clandestin ; que faute d'avoir répondu à ce chef déterminant des conclusions, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / qu'un système de contrôle du travail, même exceptionnel, doit être soumis à l'information et à la consultation tant du comité d'établissement que du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et doit être négocié avec les organisations syndicales, que les demandeurs à l'action faisaient valoir qu'il n'en avait rien été ; qu'en ne se prononçant pas, de ce chef, tout en relevant un double procédé de décompte collectif, effectivement mis en oeuvre, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 423-3, L. 236-2 et L. 132-27 du Code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le sytème d'enregistrement par badgeage instauré par l'accord collectif du 21 octobre 1998 retient le début et la fin du travail de chaque salarié de sorte que toutes les heures effectuées sont enregistrées, que toutefois ne sont prises en compte que celles accomplies dans la limite de l'amplitude horaire fixée par l'accord et que les heures réalisées au-delà du seuil horaire conventionnel, avec l'autorisation du supérieur hiérarchique -lesquelles sont rémunérées au titre des heures supplémentaires- font l'objet d'un décompte manuel, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les demandeurs au pourvoi dans le détail de leur argumentation, a pu décider que le système de décompte de la durée du travail ainsi mis en place répond aux exigences de fiabilité et infalsifiabilité requises par l'article L. 212-1-1 in fine du Code du travail ;

Et attendu qu'ayant constaté que le contrôle manuel des heures supplémentaires n'est qu'un élément de la mise en oeuvre du système d'enregistrement institué par l'accord collectif susvisé, la cour d'appel n'avait pas à répondre à des conclusions inopérantes ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir dit applicable au personnel commercial itinérant non cadre un forfait en jours et d'avoir débouté celui-ci de sa demande de prise en compte, en tant que travail effectif, du temps consacré aux travaux administratifs à domicile et aux temps de trajet, alors, selon le moyen :

1 / que la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 ne prévoit aucune possibilité de recours à un forfait jours ; que, par suite, en se fondant sur l'article 8 de l'accord de branche du 10 mars 1999 dont il résulte que les personnels affectés aux forces de vente, du fait de la nature et de l'autonomie de leur activité, bénéficieront des mêmes dispositions que celles prévues à l'article 7 qui fait référence aux cadres et au recours au forfait jours pour cette catégorie, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de ladite loi n° 98-461 du 13 juin 1998 ;

2 / qu'en statuant au regard des seules dispositions conventionnelles du 29 juillet 1999 prévoyant une réduction du temps de travail sous forme de jours de repos, sans répondre aux conclusions des demandeurs selon lesquelles les commerciaux étaient soumis aux règles du forfait jours, la cour d'appel n'a pas derechef légalement justifié sa décision au regard des dispositions de la loi du 13 juin 1998 susvisées ;

3 / qu'en l'état des dispositions conventionnelles du 29 juillet 1999, l'accord d'entreprise du site d'Issy-les-Moulineaux, qui prévoit une réduction du temps de travail en jours de repos et non un forfait pour le personnel commercial non cadre, la cour d'appel, qui n'a pas pris en compte les horaires quotidiens et hebdomadaires effectués par ce personnel et a affirmé que leurs demandes relatives à la prise en compte du temps consacré aux travaux administratifs et au temps de trajet se trouvaient sans objet, a violé les dispositions susvisées ;

4 / qu'à admettre que la cour d'appel eût jugé que le forfait jours aurait résulté de l'accord du 29 juillet 1999, elle aurait ainsi violé tant ledit accord qui ne prévoit rien de tel que la loi du 13 juin 1998 susvisée ;

Mais attendu, d'abord, que l'article 8 de l'accord de branche du 10 mars 1999, étendu par arrêté ministériel du 25 mai 1999, qui instaure au profit du personnel commercial itinérant non cadre un décompte de la durée du travail en jours, n'est nullement contraire aux dispositions de la loi du 13 juin 1998 dite "Aubry I", lesquelles n'interdisent à aucun moment la mise en place d'une telle convention de forfait ;

Et attendu que c'est par une exacte interprétation des dispositions conventionnelles du 29 juillet 1999 prises en application de l'accord de branche susvisé, ainsi que du protocole d'accord du 8 novembre 1999 relatif aux jours de congés supplémentaires liés à la spécificité des métiers du personnel commercial qui se déplace en clientèle que la cour d'appel a pu décider que leurs signataires avaient entendu instaurer pour celui-ci un forfait de travail en jours de sorte que la demande en paiement des heures consacrées aux travaux administratifs et aux trajets était sans objet ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les demandeurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03-17494
Date de la décision : 11/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), 27 mai 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 mai. 2005, pourvoi n°03-17494


Composition du Tribunal
Président : Président : M. FINANCE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.17494
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