AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux septembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller CORNELOUP, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Roland,
contre l'arrêt de la cour d'assises des BOUCHES-DU-RHONE, en date du 17 décembre 2004, qui, pour viols avec tortures ou actes de barbarie, séquestration avec tortures ou actes de barbarie, détention arbitraire illégale, l'a condamné à 30 ans de réclusion criminelle en fixant aux deux tiers de cette peine la durée de la période de sûreté et à l'interdiction définitive du territoire français, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation et fausse application des articles 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 14 de la Convention européenne d'extradition, préliminaire et 696-40 du Code de procédure pénale, des principes généraux du droit, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que la cour d'assises a déclaré Roland X... coupable de viols avec torture ou actes de barbarie, séquestration et arrestation avec torture ou actes de barbarie et, en répression, l'a condamné à trente ans de réclusion criminelle et à l'interdiction définitive du territoire français ;
"alors qu'en vertu du principe de spécialité, l'individu qui aura été livré ne pourra être poursuivi ou jugé contradictoirement pour aucune infraction autre que celle ayant motivé l'extradition ; qu'il n'est fait exception à ce principe qu'autant que la personne extradée a renoncé expressément après sa remise, au principe de spécialité dans les formes et conditions précisées à l'article 696-40 du Code de procédure pénale ; que la Cour de cassation est en mesure de constater, au vu de la procédure qui lui est soumise, d'une part, que l'autorisation d'extradition de Roland X... par la chambre pénale de l'audiencia nacional en date du 23 octobre 1998 ne visait pas les actes de torture et de barbarie qui ne sont pas incriminés par le Code pénal espagnol et, d'autre part, que Roland X... n'a pas renoncé dans les conditions et les formes prévues au texte susvisé au principe de spécialité et que, dès lors, la cour d'assises, qui est entrée en voie de condamnation pour des crimes punis de la réclusion criminelle à perpétuité cependant que Roland X... était extradé pour des faits respectivement punis de quinze ans et vingt ans de réclusion criminelle, a excédé ses pouvoirs" ;
Attendu que, la régularité de l'arrêt saisissant la cour d'assises du chef, notamment, de viols avec tortures ou actes de barbarie ne pouvant plus être contestée en raison de l'épuisement des voies de recours, le moyen est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 349 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Roland X... coupable de viols avec torture ou actes de barbarie ;
"alors qu'il résulte des dispositions de l'article 349 du Code de procédure pénale que la Cour et le jury doivent être interrogés sur les faits de l'accusation considérés en eux-mêmes et ne peuvent l'être sur des questions de droit ; que Roland X... était envoyé devant la cour d'assises pour avoir, par violence, contrainte, menace ou surprise, commis des actes de pénétration sexuelle sur la personne de Monica Y...
Z..., en l'espèce, en lui imposant des actes de sodomie, de pénétration vaginale et une fellation, avec cette circonstance que les faits ont été précédés, accompagnés ou suivis de tortures ou d'actes de barbarie, en l'espèce, en l'ayant frappée à de multiples reprises, menacée avec une arme, bâillonnée et entravée à l'aide de rubans adhésifs et de menottes, en ayant enfoncé de force une bouteille dans sa bouche, en lui ayant fait inhaler de l'acide et en ayant utilisé un pique-boeuf électrique au niveau de son sexe ; que la question n° 2 était ainsi rédigée : "le viol ci-dessus spécifié a-t-il été précédé, accompagné ou suivi de tortures ou actes de barbarie ?" ; qu'il s'agit d'une rédaction en droit et non en fait et donc irrégulière et qu'il en résulte que la déclaration de la Cour et du jury qui sert de support à la condamnation de Roland X... est nulle" ;
Attendu que la question critiquée n'encourt pas les griefs allégués dès lors que la Cour et le jury ont été interrogés sur une circonstance de fait dans les termes de la loi, laquelle ne définit pas autrement les tortures ou actes de barbarie ;
Qu'ainsi, le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6.3.a de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, excès de pouvoir, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que la Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question spéciale n° 9 posée d'office par le président : "La séquestration spécifiée et qualifiée aux questions n° 7 et 8 a-t-elle été précédée ou accompagnée de tortures ou actes de barbarie ? ;
"alors que l'article 350 du Code de procédure pénale qui autorise le président à poser une ou plusieurs questions spéciales relatives à des circonstances aggravantes non mentionnées dans l'arrêt de renvoi est incompatible avec les dispositions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales selon lesquelles tout accusé a droit à être informé, dans le plus court délai, d'une manière détaillée de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui" ;
Attendu qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats qu'après la plaidoirie du conseil de la partie civile, le réquisitoire du ministère public et la plaidoirie de la défense, "le président a annoncé qu'il poserait, comme pouvant résulter des débats, des questions spéciales relatives à la circonstance de tortures ou actes de barbarie susceptibles d'aggraver les faits d'enlèvement, arrestation ou séquestration arbitraire dont la Cour était saisie" ;
Attendu que les parties et l'accusé en dernier ont eu la parole pour s'expliquer sur cette nouvelle qualification ;
Que le procès-verbal constate également que le président, après avoir prononcé la clôture des débats, a donné lecture des questions auxquelles la Cour et le jury auraient à répondre ;
Attendu qu'en cet état, il n'a été commis aucune violation des textes visés au moyen dès lors que le demandeur a été mis en mesure de présenter ses observations et moyens de défense au regard de la question spéciale posée par le président et d'élever, s'il le jugeait utile, un incident contentieux à ce sujet comme le permet l'article 352 du Code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Corneloup conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;