AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° V 02-47.705 et W 02-47.706 ;
Attendu que M. X... et M. Y..., médecins salariés de l'Association interprofessionnelle de médecine du travail de la Martinique respectivement depuis le 1er septembre 1975 et le 21 septembre 1970, ont signé en décembre 1994 une "convention de sauvetage" prévoyant que les clauses financières de leurs contrats de travail étaient "suspendues à compter du 1er janvier 1995 " et que leurs salaires de base étaient diminués de 25 % ; que la convention disposait qu'elle était conclue pour une durée initiale de trois années et ferait l'objet d'une négociation au cours du dernier trimestre 1997 ; que les salariés ont reçu de leur employeur en mars 1998 un courrier fixant unilatéralement le montant de leur salaire à compter du 1er janvier 1998 ;
qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que pour débouter les salariés de leurs demandes en paiement de rappels de salaires à compter du 1er janvier 1998, la cour d'appel a retenu que, si la convention de sauvetage devenue caduque le 31 décembre 1997 prévoyait la suspension des clauses financières des contrats de travail, les parties n'ont pas pour autant convenu d'un rétablissement de plein droit des conditions antérieures à compter du 1er janvier 1998 puisqu'elles avaient prévu une négociation de sortie au cours du quatrième trimestre 1997 ; que cette clause, qui imposait une négociation individuelle, n'a pas été respectée, l'employeur ayant privilégié le dialogue avec les délégués du personnel ; que, néanmoins, les salariés, dès lors qu'ils étaient insatisfaits du résultat de la négociation collective, auraient dû rappeler à leur employeur cette obligation ; qu'ils ne rapportent pas la preuve d'une négociation individuelle ou d'une tentative de négociation individuelle ;
Attendu, cependant, que la rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait relevé que les parties avaient expressément convenu d'une suspension des conditions contractuelles de rémunération pour une durée limitée à trois années, ce dont il résultait qu'à l'expiration de ce délai , à défaut de nouvel accord, les conditions de rémunération convenues antérieurement à la convention étaient à nouveau applicables, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont débouté les salariés de leurs demandes tendant au paiement d'un rappel de salaires à compter du 1er janvier 1998, les arrêts rendus le 26 septembre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne l'Association interprofessionnelle de médecine du travail aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne l'Association interprofessionnelle de médecine du travail à payer la somme de 1 500 euros à M. X... et la même somme à M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille cinq.