AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 7 août 2003), que M. X..., qui avait été engagé le 2 juin 1999 par la société Bureau moderne informatique et négoce interprofessionnel en qualité de représentant, a été licencié le 15 juillet 2000 pour motif économique et a adhéré le 8 septembre 2000 à une convention d'allocation spéciale du Fonds national de l'emploi ;
Sur le moyen unique pris en sa première branche du pourvoi principal :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié une indemnité compensatrice de non concurrence, alors, selon le moyen, que la cour d'appel, qui condamne l'employeur à indemniser la clause de non concurrence d'un salarié, bien que celui-ci bénéficie d'une convention FNE, financée par l'employeur et fournissant un revenu de substitution au salarié, et qu'il ait volontairement renoncé en l'état à l'exercice d'une activité professionnelle, de sorte qu'il ne subit aucune restriction d'activité préjudiciable du fait de la clause de non concurrence, a violé l'article L. 121-1 du Code du travail ;
Mais attendu que le salarié n'ayant pas à justifier de l'existence d'un préjudice pour prétendre à la contrepartie pécuniaire de la clause de non concurrence et la convention d'allocation spéciale n'ayant pour effet que d'interrompre à titre temporaire le versement des prestations au salarié en cas de reprise d'une activité professionnelle, la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur n'avait pas prévenu le VRP dans les quinze jours de la notification de la rupture du contrat de travail, a retenu à bon droit que le salarié pouvait prétendre au cumul de l'allocation spéciale Fonds national de l'emploi et de l'indemnité compensatrice de la clause de non concurrence à laquelle l'employeur était tenu ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, que le fait de procéder, sans motif réel, au licenciement économique d'un salarié afin qu'il bénéficie d'une convention FNE constitue une fraude de l'employeur, permettant au salarié de contester le bien fondé de la rupture de son contrat de travail ; que la fraude est d'autant plus caractérisée lorsque l'employeur a fait espérer au salarié le paiement d'une indemnité de non concurrence et de clientèle pour ensuite refuser le paiement de ces indemnités et prétendre que toute contestation était devenue impossible à raison de la conclusion de la convention FNE ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir dans ses écritures d'appel qu'il avait été licencié par la société BMINI pour un motif économique fallacieux, assorti d'une priorité de réembauchage, et qu'il avait accepté de signer une convention FNE sur la foi de ce que lui seraient versées une indemnité de clientèle et la contrepartie pécuniaire de la clause de non concurrence ;
que l'employeur lui-même a admis dans ses conclusions d'appel que le licenciement était dénué de toute cause économique réelle et sérieuse et n'avait d'autre objet que de faire bénéficier le salarié de la conclusion d'une convention FNE ; que l'employeur n'a versé à M. X... ni indemnité de clientèle ni contrepartie pécuniaire de la clause de non concurrence ; qu'en n'expliquant pas en quoi ces éléments n'étaient pas susceptibles de caractériser une fraude de la part de la société BMINI à l'encontre de M. X..., peu important, compte tenu des circonstances dans lesquelles la convention FNE a été conclue, que ce dernier ait été " demandeur" de la conclusion d'une telle convention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 et 1133 du Code civil, du principe selon lequel la fraude corrompt tout , ainsi que des articles L. 322-2, L. 322-4, R 322-1 et R 322-7 du Code du travail et de l'article 2 de l'arrêté du 15 avril 1987 ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant souverainement retenu que le salarié ne rapportait pas la preuve d'une fraude, le moyen ne peut qu'être écarté ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi principal ni sur le second moyen du pourvoi incident, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission des pourvois :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
Condamne la société Bureau moderne informatique et négoce interprofessionnel aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Bureau moderne informatique et négoce interprofessionnel à payer à M. X... la somme de 1 500 euros et rejette la demande de cette société ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille cinq.