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08/11/2005 | FRANCE | N°03-19570

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 novembre 2005, 03-19570


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Jean-Pierre X... est décédé le 6 août 1996, laissant pour lui succéder son épouse, Mme Jocelyne Y..., et leurs enfants, M. Dominique X... et Mmes Catherine, Béatrice et Isabelle X... (les consorts X...) ; que Mme Jocelyne Y... et M. Dominique X... ont chacun reçu notification d'un redressement de droits de mutation à titre gratuit fondé sur l'omission de biens immobiliers dans la déclaration d

e succession et sur l'existence d'une récompense due par la communauté à ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Jean-Pierre X... est décédé le 6 août 1996, laissant pour lui succéder son épouse, Mme Jocelyne Y..., et leurs enfants, M. Dominique X... et Mmes Catherine, Béatrice et Isabelle X... (les consorts X...) ; que Mme Jocelyne Y... et M. Dominique X... ont chacun reçu notification d'un redressement de droits de mutation à titre gratuit fondé sur l'omission de biens immobiliers dans la déclaration de succession et sur l'existence d'une récompense due par la communauté à la succession à la suite de l'encaissement par celle-ci du prix de vente de biens immobiliers appartenant en propre au défunt et de liquidités, le tout provenant des successions des parents de Jean-Pierre X... ouvertes après son mariage ; que des avis de mise en recouvrement ont été notifiés à Mme Jocelyne Y... et à M. Dominique X... et suivis de mises en demeure ; que les autres cohéritiers n'ont pas été destinataires d'avis de mise en recouvrement ; qu'après le rejet de leur réclamation, les consorts X... ont fait assigner le directeur général des impôts devant le tribunal de grande instance afin que soit constatée l'irrégularité de la procédure de recouvrement et prononcée la décharge totale des droits ;

Sur le second moyen :

Attendu que les consorts X... reprochent à l'arrêt d'avoir dit qu'il y avait lieu à redressement fiscal au titre de la récompense "due à la communauté" des époux Z... à la suite de la vente des immeubles appartenant à Jean-Pierre X..., alors, selon le moyen :

1 ) qu'il incombe à l'administration fiscale, lorsqu'elle prétend réintégrer dans la succession d'un époux décédé une récompense à la charge de la communauté, pour des ventes d'immeubles propres, de rapporter la preuve de l'encaissement par la communauté du prix des ventes, ainsi que de la réalité et de l'étendue du profit tiré par la communauté des produits de chacune des ventes d'immeubles propres ;

qu'en estimant qu'il existait une "présomption" d'encaissement par la communauté du prix des ventes des immeubles appartenant en propre à M. Jean-Pierre X..., cependant que c'est à l'administration fiscale qu'incombait la charge d'établir cet encaissement du produit des ventes de biens propres par la communauté, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil ;

2 ) qu'il incombe à celui qui demande récompense à la communauté d'établir, par tous moyens laissés à l'appréciation souveraine des juges du fond, que les deniers provenant du patrimoine propre de l'un des époux ont profité à la communauté ; qu'en se bornant, pour estimer que la communauté devait récompense à la succession de M. Jean-Pierre X..., à retenir l'existence des ventes de biens propres intervenues et l'encaissement par la communauté du produit de ces ventes, sans caractériser l'existence d'un profit subsistant pour la communauté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1433 du Code civil ;

3 ) qu'en se bornant à indiquer, pour justifier la récompense due par la communauté à la succession, qu'au jour du décès de M. Jean-Pierre X..., l'actif brut de la communauté s'élevait à un total immobilier de 2 500 000 francs, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si les acquisitions immobilières de la communauté ne pouvaient avoir été financées par des prêts souscrits par la communauté ou par les revenus provenant de l'activité professionnelle de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1433 du Code civil ;

4 ) que la preuve de l'encaissement du prix de vente des biens propres par la communauté et de l'existence du profit subsistant doit être rapportée vente par vente et non pas globalement ; qu'en envisageant de manière globale les ventes réalisées par M. Jean-Pierre X..., sans examiner individuellement les transactions en cause, la cour d'appel a violé l'article 1433 du Code civil ;

Mais attendu qu'il incombe à l'administration des impôts, lorsqu'elle fonde un redressement de droits de mutation par décès sur l'existence d'une récompense due à la succession par la communauté, d'établir que les deniers provenant du patrimoine propre du défunt ont profité à celle-ci ; que, sauf preuve contraire, le profit résulte notamment de l'encaissement de deniers propres par la communauté, à défaut d'emploi ou de remploi ;

Attendu qu'en retenant qu'il était établi que Jean-Pierre X... avait reçu des immeubles lui appartenant en propre des successions de ses père et mère décédés au cours de son mariage, que ces biens avaient été revendus, ainsi qu'il ressortait des actes de vente mentionnant Jean-Pierre X... en qualité de vendeur, et que la communauté avait encaissé le produit de ces ventes, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches invoquées par les troisième et quatrième branches, que ses constatations rendaient inopérantes, a, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l' article L. 256 du Livre des procédures fiscales ;

Attendu que l'obligation solidaire de paiement des droits de mutation par décès à laquelle sont tenus les cohéritiers ne dispense pas l'administration des impôts de son obligation légale de notifier à celui des cohéritiers contre lequel elle exerce son droit de poursuite un avis de mise en recouvrement préalable ;

Attendu que, pour déclarer régulière la procédure de recouvrement suivie à l'égard de Mmes Catherine et Béatrice X..., l'arrêt retient que les cohéritiers étant solidaires en matière de droits de mutation par décès, l'avis de mise en recouvrement peut être émis au nom de l'un quelconque des débiteurs solidaires de l'imposition ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré régulière la procédure de recouvrement suivie à l'égard de Mmes Catherine et Béatrice X..., l'arrêt rendu le 26 juin 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande formée par les consorts X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 03-19570
Date de la décision : 08/11/2005
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Mutation à titre gratuit - Succession - Biens imposables - Récompense due à la succession par la communauté - Preuve - Charge - Détermination.

1° COMMUNAUTE ENTRE EPOUX - Liquidation - Récompenses - Récompenses dues à l'un des époux - Conditions - Profit tiré des biens propres par la communauté - Cas - Encaissement par la communauté - Portée 1° COMMUNAUTE ENTRE EPOUX - Liquidation - Récompenses - Récompenses dues à l'un des époux - Conditions - Profit tiré des biens propres par la communauté - Défaut - Preuve - Charge - Détermination - Portée.

1° Il incombe à l'administration des impôts, lorsqu'elle fonde un redressement de droits de mutation par décès sur l'existence d'une récompense due à la succession par la communauté, d'établir que les deniers provenant du patrimoine propre du défunt ont profité à celle-ci. Sauf preuve contraire, le profit résulte notamment de l'encaissement de deniers propres par la communauté, à défaut d'emploi ou de remploi.

2° IMPOTS ET TAXES - Recouvrement (règles communes) - Avis de mise en recouvrement - Contenu - Mention du cohéritier contre lequel s'exercent des poursuites - Solidarité du paiement des droits de mutation - Portée.

2° L'obligation solidaire de paiement des droits de mutation par décès à laquelle sont tenus les cohéritiers ne dispense pas l'administration des impôts de son obligation légale de notifier à celui des cohéritiers contre lequel elle exerce des poursuites un avis de mise en recouvrement préalable.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 26 juin 2003

Sur le n° 1 : Sur la charge de la preuve en cas de contestation du droit à récompense du chef des deniers propres encaissés par la communauté, dans le même sens que : Chambre civile 1, 2005-02-08, Bulletin 2005, I, n° 65, p. 57 (cassation partielle) ; Chambre civile 1, 2005-02-08, Bulletin 2005, I, n° 66, p. 58 (rejet), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 nov. 2005, pourvoi n°03-19570, Bull. civ. 2005 IV N° 221 p. 239
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 IV N° 221 p. 239

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot.
Avocat général : M. Feuillard.
Rapporteur ?: M. Truchot.
Avocat(s) : Me Balat, la SCP Thouin-Palat.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.19570
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