La Commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Gueudet, président, M. Breillat, conseiller, Mme Gailly, conseiller référendaire, en présence de M. Charpenel, avocat général et avec l'assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
Statuant sur le recours formé par :
- M. Dominique De X...,
contre la décision du premier président de la cour d'appel d'Amiens en date du 1er février 2005 qui lui a alloué une indemnité de 41.100 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité ;
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 21 octobre 2005, le demandeur et son avocat ne s'y étant pas opposé ;
Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;
Vu les conclusions de M. Bouly, avocat au Barreau d'Amiens, représentant M. De X... ;
Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de Cassation ;
Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur, à son avocat, à l'agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l'audience ;
Sur le rapport de M. le conseiller Breillat, les observations de M. Combes, avocat assistant M. De X..., celles de M. De X... comparant et de Mme Couturier-Heller, avocat représentant l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Charpenel, le demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION ,
Attendu que par décision du 1er février 2005, le premier président de la cour d'appel d'Amiens a alloué à M. De X... la somme de 41.100 euros en indemnisation de son préjudice moral à raison d'une détention de 3 ans et 19 jours effectuée du 9 janvier 2001 au 28 janvier 2004, et a rejeté les demandes formulées au titre des "débours occasionnés par l'incarcération" et des frais irrépétibles ;
Que M. De X... a régulièrement formé un recours contre cette décision tendant à obtenir 56.101,24 euros au titre du préjudice moral, 3.048,98 euros au titre des frais de justice, et 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Vu les articles 149 et 150 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'une indemnité est accordée , à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive; que cette indemnité répare intégralement le préjudice personnel, moral et matériel directement lié à la privation de liberté ;
Sur le préjudice moral :
Attendu qu' à l'appui de sa demande, M. De X... fait valoir le caractère fragile de sa santé, le fait qu'il a toujours clamé son innocence et qu'il n'a pu se rendre à l'enterrement d'un proche parent en raison de son incarcération; qu'il fait grief à la décision déférée d'avoir distingué arbitrairement les 24 premiers mois de détention des mois suivants, pour en minorer les effets dans la fixation du montant de son indemnisation ;
Qu' il n'est toutefois nullement démontré que le requérant n'ait pas eu les soins requis par son état de santé durant sa détention, que son état se soit aggravé du fait de cette mesure, ou que celle-ci ait été la cause d'une altération à ce sujet ;
Que par ailleurs, les dénégations du requérant au cours de l'enquête préliminaire et de l'instruction préparatoire sur les faits qui ont entraîné sa mise en examen sont sans portée sur le principe et le montant de la réparation ;
Qu'enfin, abstraction faite de motifs surabondants distinguant deux périodes dans la durée de la détention pour en moduler les effets, la somme allouée en première instance constitue une exacte réparation du préjudice moral souffert par le requérant en tenant compte de son âge ( 45 ans ) lors de son incarcération, de la durée celle-ci et de ses répercussions psychologiques sur M. De X... qui notamment n' a pu assister à l'enterrement de son frère; que le recours doit être rejeté de ce chef ;
Sur les frais d'avocat :
Attendu que les pièces versées par le requérant devant la commission, et notamment la facture d'honoraires produite, établissent que son conseil a accompli des diligences se rapportant directement à la détention provisoire et aux procédures engagées pour y mettre un terme ; que la somme de 3.048,98 euros sollicitée à ce titre est ainsi justifiée ;
Sur les frais irrépétibles :
Attendu que l'équité commande de faire bénéficier M. De X... de la somme de 1.000 euros au titre de chacune des deux instances, en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
ACCUEILLE le recours en ce qui concerne les frais d'avocat et les frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau ;
ALLOUE à M. Dominique De X... la somme de 3.048,98 (trois mille quarante huit euros quatre vingt dix huit centimes) au titre des frais d'avocat, outre 1.000 (mille euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au titre de la première instance ;
REJETTE le recours pour le surplus ;
ALLOUE à M. Dominique De X... la somme de 1.000 (mille euros) au titre des frais irrépétibles de la présente instance ;
LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le 5 décembre 2005 par le président de la Commission nationale de réparation des détentions,
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier présent lors des débats et du prononcé.