AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Helvétia asurances de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en tant que dirigé contre la société Aon SGEA ;
Met sur sa demande la société Swiss Life, hors de cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Kermene a confié le transport de machines-outils à la société Atlantique de logistique et de transport (le transporteur) ; que le transporteur a souscrit une police auprès de la société Helvétia (l'assureur) garantissant les marchandises transportées lorsqu'elles ont été confiées à l'assuré avec ordre d'assurer ;
quà la suite du renversement accidentel d'une thermoformeuse, la société Kermene a engagé une action en responsabilité à l'encontre du transporteur et de son assureur ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à garantir le transporteur de la condamnation prononcée à son encontre jusqu'à due concurrence de 136 362,75 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2002, alors, selon le moyen, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que l'article 2-2 des conditions générales de la police française d'assurance des marchandises transportées par voie de terre, relatif aux dommages et pertes garantis, stipulait que l'assureur garantit les dommages et pertes matériels par suite de la réalisation de l'un des évènements limitativement énumérés, dont notamment destruction, déraillement, renversement, chute, rupture d'essieu, de roue, d'attelage ou de châssis, du véhicule de transport ; que la cour d'appel a retenu que le renversement de la thermoformeuse, posée sur trois porteurs directionnels et tractée par un chariot automoteur à conducteur porté, la roue de l'un des porteurs s'étant coincée dans le joint de fractionnement de la dalle au sol, était constitutif d'un accident au sens de l'article 2, 2 , survenu au cours de la première phase de l'opération de transport ; qu'en statuant ainsi, bien que le renversement et la chute de la charge ne corresponde pas à l'un des évènements limitativement énuméré par l'article 2, 2 , la cour d'appel, qui a méconnu la loi des parties et dénaturé la police, a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que le contrat porte sur une assurance de chose souscrite au bénéfice de l'expéditeur garantissant les dommages matériels subis par les marchandises transportées notamment par suite de "destruction, déraillement, renversement, chute, rupture d'essieu, de roue, d'attelage ou de châssis du véhicule de transport" ; que la thermoformeuse, posée sur trois porteurs directionnels et tractée par un chariot automoteur à conducteur porté, s'est renversée alors que la roue d'un des porteurs s'est coincée dans le joint de fractionnement de la dalle du sol ; que le renversement du chargement au cours de la première phase de l'opération de transport constitue un accident caractérisé au sens de l'article 2-2 des conditions générales de l'assurance ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit, sans dénaturer la clause claire et précise du contrat, que l'assureur devait sa garantie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour condamner l'assureur à garantir le transporteur de la condamnation prononcée à son encontre jusqu'à due concurrence de 136 362,75 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2002, l'arrêt retient que les dispositions de l'article 5-6 des conditions générales excluent la garantie des dommages "résultant des obstacles apportés à l'exploitation ou à l'opération commerciale de l'assuré" ; que ni le coût de la location provisoire d'une machine durant le délai de fabrication d'une nouvelle thermoformeuse, ni la perte résultant de l'impossibilité de réutiliser le stock de films de conditionnement, ne sont visés par cette clause d'exclusion de garantie ;
Qu'en statuant ainsi, les juges du fond ont dénaturé les termes clairs et précis de la clause d'exclusion ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Helvétia à garantir la société Alt des condamnations prononcées à son encontre jusqu'à due concurrence de 136 362,75 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2002, l'arrêt rendu le 18 novembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;
Condamne la société Helvétia assurances et la société Atlantique de logistique et de transport aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette toutes les demandes présentées de ce chef ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille six.