AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 05-40.918 et J 05-41.083 ;
Attendu que Mme X..., engagée le 11 novembre 1999 en qualité de chef de publicité par la Société des bonnes tables, s'est trouvée en congé de maternité du 6 septembre 2000 au 10 janvier 2001 ;
qu'elle a été licenciée pour "divergence de vue profonde avec la direction sur la poursuite de l'exploitation du site" sur lequel elle travaillait, et ce à une date contestée ; que les parties ont signé par ailleurs une transaction non datée, qui a été annulée par l'arrêt attaqué ;
Sur le premier moyen du pourvoi de la salariée :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'avoir jugé que son licenciement n'était pas nul mais dénué de cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamnée à rembourser les sommes perçues en exécution de la transaction et de la décision de référé, alors, selon le moyen, qu'un employeur ne peut résilier le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit en application de l'article L. 122-26 ainsi que pendant les quatre semaines qui suivent l'expiration de ces périodes ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a tenu pour acquis que, malgré l'attestation contraire du comptable de l'entreprise, la date du 16 janvier 2001 avait été spontanément portée sur l'attestation Assedic et le certificat de travail établis par l'employeur, ce dont il s'évinçait que la rupture était acquise à cette date ; que les juges du fond ont, par ailleurs, constaté que la période de protection dont bénéficiait la salariée à raison de sa grossesse avait duré jusqu'au 11 février 2001 ; qu'en jugeant, cependant, que le licenciement de celle-ci était simplement sans cause réelle et sérieuse quand il résultait de ses propres constatations que la rupture était nulle comme intervenue au cours de la période de protection, la cour d'appel a violé l'article L. 122-25-2 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, que si la transaction avait été conclue le 16 janvier 2001, date d'établissement des documents sociaux, le licenciement était intervenu au plus tôt le 15 février 2001 selon la date figurant sur la lettre de licenciement, soit après l'expiration de la période de protection ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi des sociétés et les deuxième et quatrièmes moyen du pourvoi de la salariée :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen du pourvoi de la salariée, qui n'est pas nouveau :
Vu l'article L. 122-6 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu que, pour limiter les sommes allouées à la salariée à titre de rappels de salaires et congés payés afférents et infirmer le jugement en ce qu'il avait accordé à l'intéressée une indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, l'arrêt retient que la salariée, licenciée sans cause réelle et sérieuse, a droit à son salaire jusqu'à l'expiration de la période de protection, soit jusqu'au 11 février 2001 ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que la salariée ne s'était pas tenue à la disposition de son employeur pour la période postérieure au 11 février 2001 et que l'inexécution du préavis lui était imputable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité les sommes allouées à la salariée à titre de rappels de salaires et congés payés afférents et décidé n'y avoir lieu au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt rendu le 15 décembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la Société des bonnes tables et la société Co Spirit Group aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la Société des bonnes tables et la société Co Spirit Group à payer à Mme X... la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille six.