AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... a été engagé par la société GE Capital IT solutions à compter du 4 décembre 1989, en qualité de pupitreur ; qu'il exerçait, depuis le 1er décembre 1999, les fonctions "de support technique" ; qu'il a été licencié pour motif personnel par lettre recommandée datée du 27 juillet 2001 et distribuée le 28 juillet, avec dispense d'exécuter le préavis de deux mois ; que deux transactions ont été conclues entre les parties, la première le 26 juillet 2001 et la seconde, née d'un litige relatif à la date du premier accord, le 12 octobre 2001 ;
que, le 6 novembre 2001, l'employeur a informé le comité d'entreprise d'un projet de licenciement collectif pour motif économique concernant 134 salariés, avec mise en oeuvre d'un plan social ; qu'estimant avoir été victime d'une fraude et contestant les deux transactions, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal formé par la société GE Capital IT solutions :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 26 octobre 2004) d'avoir dit le licenciement de M. X... nul et de l'avoir condamné à payer une somme en sus de l'indemnité transactionnelle, alors, selon le moyen :
1 / qu'est licite la transaction conclue pour régler les conséquences d'un licenciement nul ; qu'une telle transaction a toujours pour objet d'interdire au salarié de contester judiciairement la nullité de son licenciement pour que le litige soit réglé contractuellement ; qu'en posant en principe que la transaction consécutive à un licenciement nul aurait une cause illicite en ce qu'elle aurait pour objet d'interdire au salarié de contester la nullité de son licenciement, la cour d'appel a méconnu l'objet et la nature même d'une transaction et violé l'article 2044 du code civil ;
2 / que le juge ne peut, pour apprécier la validité d'une transaction, rechercher si le licenciement sur lequel les parties ont transigé, était réel et sérieux ; qu'en l'espèce la cour d'appel pour annuler la transaction a été amené à rechercher la cause prétendument réelle du licenciement, à dire que celui-ci n'était pas fondé, et à requalifier le licenciement individuel en licenciement collectif pour motif économique ;
qu'ainsi la cour d'appel qui a été obligée de trancher le litige que la transaction avait précisément pour objet de régler, a violé les articles 2052 et 2053 du code civil ;
3 / que l'erreur d'une des parties sur l'étendue de ses droits n'est pas une cause d'annulation de la transaction ; qu'en l'espèce, le salarié qui a conclu une transaction sur l'illicéite de son licenciement sans savoir qu'il aurait pu conclure une transaction sur la nullité de celui-ci ne commet qu'une erreur sur l'étendue de ses droits ; que cette erreur du salarié pourrait d'autant moins justifier une annulation de la transaction qu'en ne demandant pas sa réintégration, son droit à réparation est sensiblement identique ; qu'en affirmant que l'ignorance du salarié de ce que le licenciement était nul et non pas seulement illicite justifie la nullité de la transaction, la cour d'appel a violé les articles 2052 et 2053 du code civil ;
4 / que la fraude ne se présume pas et suppose une volonté consciente de se soustraire à l'application d'une règle obligatoire ; que l'obligation d'information de l'employeur suppose qu'il connaissait ou aurait du connaître l'information ignorée par le salarié ; qu'en affirmant que l'employeur avait fraudé aux droits du salarié en ne lui donnant pas les informations qui auraient pu lui permettre de constater que son licenciement était nul, sans impliquer en quoi l'employeur avait sciemment caché l'information litigieuse à son salarié, la cour d'appel a violé les articles 1133, 1315, 2262 du code civil et L. 120-4 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que la véritable cause de la rupture du contrat de travail du salarié était la suppression de son poste consécutive à des difficultés économiques, a estimé que l'employeur avait commis une fraude à la loi sur les licenciements économiques qui avait privé l'intéressé des droits qu'il tenait d'une telle cause ; qu'elle en a exactement déduit que les transactions étaient nulles ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par M. X... :
Attendu que le salarié reproche à l'arrêt d'avoir limité la somme devant lui être allouée à titre de dommages-intérêts, déduction faite de la somme correspondant à l'indemnité transactionnelle, alors, selon le moyen, que M. X... sollicitait dans ses écritures non seulement l'indemnisation du préjudice résultant de la privation des dispositions du plan social mais encore du préjudice résultant de la date à laquelle son licenciement avait été prononcé ; qu'en se bornant à indemniser le salarié à hauteur du préjudice résultant de la privation du bénéfice des dispositions du plan social sans aucunement rechercher si en le licenciant 7 mois avant la mise en oeuvre de ce plan social, l'employeur n'avait pas causé au salarié un second préjudice qu'il lui appartenait d'indemniser, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que le juge apprécie souverainement les divers chefs de préjudice qu'il retient et les modalités propres à en assurer la réparation intégrale ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille six.