AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 8 octobre 2004), que M. X..., directeur général de la société par actions simplifiée Garonor services, appartenant au groupe de sociétés Garonor et sous-filiale à 100 % de la société Prologis, société mère du "groupe Prologis", a été révoqué par la société Garonor services ; qu'il a fait assigner cette société, ainsi que la société Prologis, en paiement de diverses sommes dont, un complément d'indemnité de révocation de son mandat et une indemnité correspondant au montant de souscriptions d'actions qui lui auraient été refusées en faisant valoir, s'agissant de l'indemnité de rupture, que son contrat prévoyait que si sa révocation devait intervenir "dans le cadre de la cession du groupe Garonor par le groupe Prologis" l'indemnité qui lui était due serait doublée ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de condamnation de la société Garonor services à lui verser une somme de 457 347 euros à titre de complément d'indemnité de révocation de son mandat de directeur général de cette société, alors, selon le moyen :
1 / que la cession est un transfert de propriété ; que le transfert de plus de la moitié du capital social d'une société entraîne cession de celle-ci ; que la notion de contrôle d'une société est indifférente à la détermination du propriétaire du capital de celle-ci ; qu'il faisait valoir que la condition de cession du groupe Garonor était remplie car la société Prologis avait cédé plus de 50 % de ses parts de la société Garonor, principale société du groupe du même nom, à un fonds d'investissement dont elle ne détenait que 40 % du capital ; qu'en écartant l'existence d'une cession du groupe Garonor pour la raison que le groupe Prologis aurait conservé le contrôle du fonds d'investissement, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles 1582 du code civil et L. 233-1 du code de commerce ;
2 / que la notion de contrôle définie à l'article L. 233-3 du code de commerce a pour seul champ d'application les dispositions relatives aux notifications et informations sur les participations significatives ainsi que les participations réciproques et la réglementation de l'autocontrôle ; que les mentions de l'article L. 233-16 du même code sont applicables aux seules dispositions relatives aux comptes consolidés ; qu'en faisant application des conditions fixées par ces deux articles et notamment de la présomption de contrôle par la société qui détient au moins 40 % des droits de vote pour résoudre un litige relatif à l'existence d'une cession de groupe et donc de transfert de capital social, la cour d'appel a violé par fausse application les deux articles susvisés ;
3 / qu'à supposer même que la notion de contrôle puisse être retenue pour déterminer l'existence d'une cession du groupe Garonor par le groupe Prologis, les articles L. 233-3 et L. 233-16 du code de commerce imposent, pour l'application de la présomption de contrôle, qu'une société détienne une fraction des droits de vote supérieure à 40 % ; qu'en retenant que le groupe Prologis détiendrait 40 % des parts sociales du fonds d'investissement, propriétaire à plus de 50 % de la société Garonor, sans constater qu'il détiendrait des droits de vote supérieurs à 40 %, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et ainsi privé sa décision de base légale au regard des deux articles précités ;
4 / qu'il est de principe que "nul ne peut se constituer de preuve à lui-même" ; qu'en retenant, pour trancher le litige opposant M. X... à la société Garonor services détenue à 100 % par le groupe Prologis, que le "Private Placement Memorandum" établirait la preuve du fait que ce dernier se serait réservé l'exercice de la gestion du fonds d'investissement qui possède le groupe Garonor et aurait conçu les règles d'organisation et de fonctionnement de ce fond, après avoir relevé que cet acte avait été établi par le groupe Prolo gis lui-même, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
5 / qu'en retenant qu'il ne démontrerait pas que sa révocation était intervenue consécutivement à la mise en place du fonds d'investissement, sans répondre aux conclusions de celui-ci faisant valoir que sa révocation ne pouvait s'expliquer autrement que par l'arrivée de nouveaux actionnaires, la société Prologis l'ayant, pour sa part, reconduit dans ses fonctions de mandataire social le 15 avril 1999, soit six mois auparavant, et lui ayant octroyé au titre de l'exercice de ses fonctions durant l'année 1999, tant des stock-options que le maximum de la prime d'objectif à laquelle il pouvait prétendre, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que selon les registres des mouvements des titres des diverses sociétés appartenant au "groupe" Prologis il apparaît que la SAS Garonor services est détenue à 100 % par la société Prologis BV, elle-même détenue à 100 % par la société Prologis services SARL, elle-même détenue à 100 % par PLD International incoporated, elle-même détenue à 100 % par la société Prologis ; qu'il relève que la SAS Garonor services est toujours filiale à 100 % de la société Prologis et qu'aucune cession du "groupe" Garonor par le "groupe" Prologis n'est intervenue ; qu'il ajoute que si M. X... invoque l'existence d'un fonds commun de placement, force est de constater que celui-ci fait partie intégrante du groupe Prologis qui en détient 40 % des parts et se trouve géré, avec droit exclusif de le faire, par une société Prologis management SARL qui est détenue aussi par la société Prologis ; que la création de ce fonds, sa conception, son organisation et ses règles de fonctionnement le placent inéluctablement sous la dépendance du "groupe" Prologis et ce selon les dispositions du "Private Placement Memorandum" qui l'a organisé ; qu'en l'état de ces seules constatations et appréciations, la cour d'appel qui ne s'est pas fondée exclusivement sur un document établi par le "groupe" Prologis et qui n'était pas tenue de répondre au simple argument invoqué par la cinquième branche a justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir juger qu'il dispose de droits acquis à l'encontre de la société Prologis Trust de lever les options de souscriptions d'actions qui lui ont été allouées par son contrat de mandataire social alors, selon le moyen :
1 / qu'en retenant que M. X... aurait entendu se prévaloir de droits nés de l'existence du plan, bien qu'il ait soutenu dans ses écritures d'appel que ses droits procédaient non du plan, mais de son contrat de mandataire social, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du nouveau code de procédure civile ;
2 / que l'article 4 du contrat de mandataire social de M. X... énonçait, en des termes clairs et précis, que ce dernier pourrait "souscrire des options à hauteur d'une contre-valeur de réalisation des actions auxquelles lesdites options donneront droit de l'ordre de : deux millions de francs attribués ce jour, au titre de l'année 1998, un million cinq cent mille francs en cas de réalisation de 100 % des objectifs, au titre de l'année 1999 et des années ultérieures (les options étant généralement attribuées en décembre de l'année concernée)" ; qu'en retenant que les droits au bénéfice de stock-options de M. X... n'auraient été accordés que dans le cadre du plan bien que ces droits soient parfaitement déterminés par les termes du contrat de mandataire social de ce dernier, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire de cet acte en violation de l'article 1134 du code civil ;
3 / que l'acceptation ne peut porter que sur ce qui a été porté à la connaissance de l'acceptant ; que n'ont pas force contractuelle les documents annexes qui n'ont pas été communiqués au cocontractant ;
qu'en déclarant les dispositions du plan opposables à M. X..., bien qu'il ait été constant que ces dispositions n'aient jamais été portées à la connaissance de ce dernier, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1134 du code civil ;
4 / qu'un usage ne peut être un complément supplétif du contrat qu'à la condition que son contenu soit précis et connu des deux parties ; que les premiers juges ont retenu, en des termes imprécis, qu'il aurait été d'usage que les options "ne puissent être levées qu'après certains délais et deviennent caduques en cas de départ de la société qui les octroie" ; que l'imprécision de ces termes ne permettait pas de caractériser l'existence d'un usage opposable à M. X... et de faire application, sous couvert de cet usage, des conditions précises affectant le contrat de mandataire social qui lui octroyait des stock-options ; qu'en prétendant néanmoins lui opposer un tel usage, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles 1134, 1135 et 1160 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui, hors toute dénaturation, a relevé que le mandat social stipulait que les options sur titre attribuées à M. X... l'étaient dans le cadre du plan de souscription d'actions mis en place dans l'entreprise et estimé par une appréciation souveraine des éléments soumis à son examen que celui-ci avait eu connaissance des dispositions de ce plan, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un février deux mille sept.