AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois mai deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BOCCON-GIBOD ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Thierry,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 22 novembre 2006, qui, dans la procédure suivie contre lui pour vol avec arme et tentative de meurtre aggravé, a rejeté ses demandes de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 148-1, 148-2, et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la chambre de l'instruction, saisie de demandes de mise en liberté présentées par un détenu sur le fondement des articles 148-1 et 148-2 du code de procédure pénale, a statué sans procéder à l'audition de l'intéressé ou de son conseil ;
"alors qu'il résulte des dispositions combinées des articles 148-1 et 148-2 du code de procédure pénale que la chambre de l'instruction, appelée à statuer en application de l'article 148-1 précité, se prononce après audition du ministère public, de l'accusé ou de son avocat, ce qui implique la comparution personnelle de l'accusé ou la présence de son avocat, celui-ci étant, au besoin, commis d'office ; qu'ainsi les exigences des textes susvisés ont été méconnues" ;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que Thierry X... a refusé d'être extrait le jour de l'audience, au motif que sa comparution n'était pas obligatoire ; que son avocat, régulièrement convoqué, a indiqué ne plus assurer sa défense ; qu'en conséquence, l'intéressé ne saurait se faire un grief de ce que la chambre de l'instruction ait statué sans procéder à son audition ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 148-7, 198, 199, alinéa 5, et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt de la chambre de l'instruction ne fait pas mention de la lettre de sept pages jointe par l'accusé à sa demande de mise en liberté, faite conformément aux dispositions de l'article 148-7 du code de procédure pénale, et ne permet pas de savoir si cette pièce de la procédure a été soumise à l'examen des juges et, en conséquence, si ceux-ci ont eu connaissance des moyens qu'elle contient" ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune pièce de la procédure que Thierry X... ait déposé des conclusions régulières, à l'appui de ses demandes de mise en liberté ; qu'il n'importe, dès lors, que la chambre de l'instruction n'ait pas fait mention, dans sa décision, d'une lettre jointe à sa demande de mise en liberté ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5.3, 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 144, 144-1, 181, 215 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté les demandes de mise en liberté formées par Thierry X... et dit que celui-ci restera provisoirement détenu ;
"aux motifs que Thierry X..., renvoyé devant la cour dassises de Seine-et-Marne pour vol à main armée et tentative de meurtre concomitante à un autre crime, a interjeté appel de sa condamnation à quinze ans de réclusion criminelle prononcée par la cour d'assises de Melun ; que, par arrêt du 29 mai 1991 de la chambre de l'instruction de Paris, il a été renvoyé devant la cour d'assises de Seine-et-Marne pour vol à main armée et tentative de meurtre ; qu'il a été condamné par la cour d'assises par contumace, le 25 septembre 2001, à la réclusion criminelle à perpétuité, qu'il a été interpellé le 14 novembre 2003 à l'occasion d'autres faits criminels ; qu'il a été condamné le 5 mai 2006 à 15 ans de réclusion criminelle par la cour d'assises de Melun ; que la procédure a été allongée du fait de la condamnation par contumace et de son interpellation tardive ; que compte tenu de la nature des faits, de l'exercice des recours, certes légitimes, qui génèrent des délais supplémentaires, la durée de la détention provisoire n'a pas excédé une durée raisonnable et notamment depuis l'arrêt de la cour d'assises en date du 5 mai 2006 ; que des charges résultent de l'ordonnance de renvoi ; que, compte tenu des nombreuses et lourdes condamnations prononcées contre lui, dont certaines par contumace et pour évasion, et du quantum de la peine encourue, et alors que
l'intéressé a déjà fui au Portugal, son maintien en détention apparaît l'unique moyen d'assurer sa représentation en justice dans l'attente de sa comparution devant la cour d'assises d'appel, et d'éviter la réitération des faits reprochés à Thierry X... ; que les obligations du contrôle judiciaire sont, au regard des exigences ci-dessus rappelées, insuffisantes dans leurs fonctions définies à l'article 137 du code de procédure pénale ;
"alors que, d'une part, toute personne arrêtée ou détenue a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure ; que les seuls motifs énoncés par l'arrêt attaqué ne constituent pas en l'espèce des causes pertinentes et suffisantes, susceptibles de justifier au regard de l'article 5.3 de la Convention européenne des droits de l'homme le caractère raisonnable du maintien en détention, au cours d'une procédure relative à des faits commis le 22 mars 1988, dès lors que l'accusé avait été extradé le 11 juillet 1988, à la demande de la France et placé en détention du 11 juillet 1988 au 8 avril 2002 et qu'une condamnation par contumace avait été prononcée à son encontre depuis le 25 septembre 2001, après un arrêt de renvoi devant la juridiction de jugement du 29 mai 1991, notifié le 18 juin 1991 ;
"alors que, d'autre part, la procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties ; qu'en décidant que Thierry X... restera provisoirement détenu, sans fixer aucun terme à cette détention, la chambre de l'instruction a porté une atteinte au principe de la présomption d'innocence et a méconnu les textes susvisés" ;
Attendu que, pour refuser de faire droit aux demandes de mise en liberté présentées par Thierry X..., l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que le terme de la détention de l'accusé est fixé par l'article 367, alinéa 2, du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Le Gall conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Sassoust conseiller rapporteur, M. Pelletier conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;