Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 17 mai 2006), que le District de Bastia a confié à l'établissement public à caractère industriel et commercial Office d'équipement hydraulique de Corse (OEHC), à compter du 1er janvier 2002, la gestion du service public de la distribution d'eau potable et de traitement des eaux usées, antérieurement concédée à la société Compagnie générale des eaux, devenue la société Vivendi ; que les contrats d'affermage conclus le 26 décembre 2001 contenaient des clauses obligeant la société fermière à maintenir "la totalité des contrats des agents de l'ancien fermier en poste à la date de la délibération du conseil de District", intervenue le 3 décembre 2001, et à maintenir à ces salariés tous les avantages collectifs dont ils bénéficiaient, "notamment les dispositions relatives aux grilles, indices, à l'avancement et aux primes applicables au personnel en vertu de l'accord d'entreprise ou de la convention collective lui étendant le bénéfice de certaines dispositions du statut EDF" ; que soutenant que des salariés engagés par l'OEHC en 2003, 2004 et 2005 devaient aussi bénéficier de ces avantages, l'Union départementale CGT de Haute-Corse (UD-CGT) a saisi à cet effet la formation de référé du conseil de prud'hommes ;
Attendu que l'OEHC fait grief à l'arrêt d'avoir retenu l'existence d'un trouble manifestement illicite et de lui avoir ordonné d'appliquer à tous les salariés affectés au service eau-assainissement de l'agglomération de Bastia les dispositions conventionnelles applicables aux salariés issus de la société Vivendi alors, selon le moyen :
1°/ que ne constitue pas une discrimination illicite et un trouble manifestement illicite justifiant la compétence du juge des référés le seul fait qu'en l'absence d'un accord d'adaptation, les salariés embauchés postérieurement à la reprise de l'activité ne bénéficient pas du statut collectif contractuellement maintenu aux salariés transférés ; qu'en l'espèce, il incombait à l'UD-CGT de rapporter la preuve et à la juridiction des référés d'établir que l'OEHC se serait engagé, par la voie d'un accord d'adaptation à un accord collectif ou à une convention collective, non applicable de plein droit à l'entreprise, à faire bénéficier les salariés embauchés postérieurement à la reprise de l'activité, du statut collectif contractuellement maintenu aux salariés transférés ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que l'OEHC "s'était engagée, aux termes de l'article 27 du contrat conclu, à maintenir les avantages collectifs dont bénéficie le personnel (de l'ancien fermier) et notamment les dispositions applicables en vertu de l'accord d'entreprise et de la convention collective lui étendant le bénéfice de certaines dispositions du statut EDF", ce qui ne pouvait concerner que les salariés transférés et non ceux embauchés postérieurement à la reprise de l'activité, la juridiction d'appel de référé n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et, par suite, violé les articles 1134 du code civil, L. 122-12, L. 132-8 et R. 516-31 du code du travail ;
2°/ qu'à supposer par hypothèse que la juridiction des référés ait interprété les stipulations des articles 25 et 27 des contrats d'affermage comme étendant aux salariés embauchés postérieurement à la reprise de l'activité le statut collectif contractuellement maintenu aux salariés transférés, quand ces stipulations énonçaient que l'OEHC s'engageait à "reprendre et à maintenir la totalité des contrats de travail des agents de l'ancien fermier, en poste à la délibération du conseil de District autorisant le président à conclure la présente convention, à maintenir les avantages collectifs dont bénéficie le personnel visé à l'alinéa précédent", la juridiction des référés a dénaturé ces stipulations et violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'en tout état de cause, en omettant de dire en quoi les salariés embauchés postérieurement se seraient trouvés dans une situation identique à celle des salariés repris, la juridiction d'appel des référés a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 122-12, L. 132-8 et R. 316-31 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas dit que les contrats d'affermage obligeaient le nouveau fermier à étendre les avantages collectifs dont bénéficiait le personnel repris à tous les salariés de l'entreprise, a fait ressortir que l'engagement pris par l'OEHC, à l'intention du seul personnel en fonction au jour du changement d'employeur, ne résultait pas de l'application de la loi, qu'il n'était pas destiné à compenser un préjudice spécifique à cette catégorie de salariés et qu'il avait pour seul objet de maintenir des avantages à caractère collectif ; qu'elle en a exactement déduit que l'inégalité de traitement résultant du refus du nouveau fermier d'en faire bénéficier les salariés engagés par la suite et affectés dans la même entité, pour y exercer des travaux de même valeur, n'était pas justifiée par des raisons objectives et constituait ainsi un trouble manifestement illicite ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'OEHC aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, le condamne à payer à l'Union départementale CGT la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille sept.