LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Mylène, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 7 août 2007, qui, dans la procédure suivie contre Muriel Y... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de la victime tendant à l'indemnisation des frais d'assistance de tierce personne pour les périodes passées à la maison ;
"aux motifs que l'expert Z... a conclu que Mylène X... doit être assistée en permanence et ne peut vivre qu'en milieu protégé ; (…) ; qu'il n'est pas nécessaire d'envisager des soins d'auxiliaire médicale, pas d'assistance spécialisée, mais une surveillance non spécialisée qui doit être régulière ; que le degré d'autonomie est nul ; qu'il résulte de ce qui précède que l'ensemble des experts exclut le besoin de l'assistance d'une tierce personne ; qu'en ce qui concerne des périodes passées à la maison, en dehors de la prise en charge dans l'établissement spécialisé, qu'en l'absence d'un besoin d'une assistance tierce personne, il n'y a pas lieu d'indemniser la surveillance régulière, et non pas permanente, telle que préconisée par l'expert ; qu'en effet, il n'est pas démontré que cette surveillance dépasserait le devoir parental d'assister leur fille qui est apte à faire tous les gestes quotidiens, même si elle est lente dans leur exécution ; qu'il n'est d'ailleurs pas justifié d'une interruption d'activité pour l'entourage familial pour la période antérieure à l'accueil de Mylène X... au foyer médicalisé ni depuis lors ; que la demande à ce titre est rejetée comme non fondée, étant observé que Mylène X... perçoit une indemnisation pour le déficit fonctionnel temporaire et permanent ;
"alors que la réparation du préjudice doit être intégrale ; que le montant de l'indemnité au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être réduit en cas d'assistance familiale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui pour écarter l'indemnisation du préjudice économique pour les périodes passées à la maison retient qu'il n'est pas démontré que cette surveillance dépasserait le devoir parental d'assister leur fille qui est apte à faire tous les gestes quotidiens et qu'il n'est pas justifié d'une interruption d'activité pour l'entourage familial, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, saisis de la réparation du préjudice patrimonial permanent causé à Mylène X... par un accident de la circulation dont Muriel Y..., reconnue coupable de blessures involontaires, a été déclarée entièrement responsable, les juges du second degré qui constatent, d'une part, que la victime, atteinte d'un déficit fonctionnel permanent caractérisé par les séquelles d'un grave traumatisme crânien rendant notamment le déshabillage extrêmement difficile et lent et laissant persister une déficience intellectuelle majeure, doit être assistée en permanence dans un foyer médicalisé, dont ils mettent les frais du séjour à la charge de l'auteur de l'accident, énoncent, d'autre part, pour refuser toute indemnisation, au titre de cette assistance, pour les périodes passées à la maison avant son placement dans ce foyer et pour les périodes qu'elle y passera, dans l'avenir, de façon intermittente, qu'il n'est pas démontré que cette surveillance dépasserait, pour l'entourage familial, le devoir parental d'assister leur fille qui est apte à faire tous les gestes quotidiens même si elle est lente dans leur exécution ; que les juges ajoutent qu'il n'est pas justifié, pour cet entourage, d'une interruption d'activité ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs empreints de contradiction, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Montpellier, en date du 7 août 2007, mais en ses seules dispositions relatives à l'assistance familiale, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nîmes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
FIXE à 2 000 euros la somme que Muriel Y... devra payer à Mylène X... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
DÉCLARE IRRECEVABLE la demande au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale dirigée contre la société Groupama Sud ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Le Corroller conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;