LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en 1984 par la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) en qualité d'inspecteur de comptabilité ; qu'il a été mis en garde à vue le 12 novembre 1998 puis placé en détention provisoire ; qu'une mise en demeure de justifier de son absence et une mise à pied qualifiée de conservatoire lui ont été notifiées le 30 novembre 1998 ; que l'employeur a été informé le 14 décembre 1998 des raisons de son absence ; que M. X... a été licencié pour faute grave le 4 janvier 1999 ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident formé par le salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement prononcé pour faute grave ayant un caractère disciplinaire, les juges du fond qui écartent la faute grave ne peuvent déclarer le licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse qu'en relevant une faute à la charge du salarié ; qu'en retenant que le licenciement de M. X..., prononcé pour faute grave, était justifié par une cause réelle et sérieuse après avoir pourtant constaté que le deuxième motif de licenciement qui pouvait seul être retenu n'avait pas de caractère fautif, la cour d'appel a violé les articles L. 122-40 et L. 122-14-3 du code du travail ;
2°/ qu'en cas de licenciement motivé par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, l'employeur doit se prévaloir dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, d'une part, de la perturbation du fonctionnement de l'entreprise, et, d'autre part, de la nécessité du remplacement du salarié ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt que la lettre de licenciement ne mentionnait pas la nécessité de procéder au remplacement de M. X... ; qu'en déboutant cependant le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du code du travail ;
3°/ que si un salarié peut être licencié en raison de la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, c'est à condition que ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif ; qu'en jugeant le licenciement de M. X... justifié, sans constater que son absence prolongée rendait son remplacement définitif nécessaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du code du travail ;
Mais attendu que l'employeur, à condition de respecter les règles de procédure applicables à chaque cause de licenciement, peut invoquer dans la lettre de licenciement des motifs différents de rupture, inhérents à la personne du salarié, dès lors qu'ils procèdent de faits distincts ; que la cour d'appel, qui a fait ressortir que l'absence prolongée de M. X... causait un trouble objectif dans l'entreprise et rendait nécessaire son remplacement définitif, en a exactement déduit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Vu les articles L.122-6 et L.122-8 du code du travail ;
Attendu que pour juger que le licenciement n'était pas fondé sur une faute grave, la cour d'appel a retenu que l'employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire en notifiant au salarié le 30 novembre 1998 une mise à pied disciplinaire fondée sur son absence injustifiée depuis le 12 novembre 1998 ;
Qu'en statuant ainsi sans vérifier si ce manquement reproché au salarié ne s'était pas poursuivi après la notification de cette mesure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le second moyen du pourvoi incident :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande en paiement d'une indemnité en réparation du préjudice causé par les circonstances vexatoires alléguées de son licenciement, la cour d'appel s'est bornée à énoncer que celui-ci sera en revanche débouté de ses prétentions indemnitaires pour licenciement abusif et pour préjudice moral distinct ;
Qu'en statuant ainsi sans motif la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la CRPCEN à payer à M. X... une indemnité conventionnelle brute de préavis, les congés payés y afférents et une indemnité conventionnelle de licenciement ainsi qu'en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre des circonstances vexatoires de son licenciement, l'arrêt rendu le 19 octobre 2006, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille huit.