Vu la connexité joint les pourvois n° W 07-41. 792 et U 07-42. 020 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 février 2007), que Mme X... a été engagée suivant contrat à durée indéterminée à compter du janvier 1986 par le Centre scientifique et technique du bâtiment en qualité d'ingénieur ; que la salariée a été licenciée par lettre du 8 avril 2004 ; qu'estimant son licenciement abusif, elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le moyen unique du pourvoi de la salariée qui est préalable :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'avoir dit que son licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1° / que l'existence d'une cause réelle et sérieuse s'apprécie au jour du licenciement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé que le licenciement de Mme X... avait été prononcé le 8 avril 2004 et qu'il reposait sur une cause réelle et sérieuse " en raison des répercussions qu'entraînent ces faits sur l'activité de son employeur et des troubles objectifs caractérisés créés au sein du CSTB " ; qu'en statuant ainsi quand les agissements litigieux n'avaient eu, selon les propres constatations des juges du fond, des conséquences dommageables caractérisées qu'à partir de juillet 2004, soit bien après le licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du code du travail ;
2° / que le juge prud'homal doit apprécier le bien fondé du licenciement en s'en tenant aux seuls griefs énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 8 avril 2004 se bornait à reprocher à Mme X... de ne pas avoir informé et consulté sa hiérarchie sur le lancement, début février 2004, d'une association HQE2R visant à regrouper plusieurs de leurs partenaires européens ; qu'en reprochant à Mme X... d'avoir créé en mars 2004 une association HQE2R destinée exploiter la méthodologie développée dans le cadre de son travail, d'avoir ainsi concurrencé l'association préexistante HQE créée par son employeur et abusé de ses fonctions pour tenter de favoriser son activité propre au détriment de son employeur en créant une confusion dans l'esprit des partenaires sur la finalité de ses projets, ce qui constituerait un manquement à son obligation de loyauté, la cour d'appel qui s'est fondée sur des motifs non invoqués dans la lettre de licenciement a violé les articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du code du travail ;
3° / que Mme X... faisait valoir sans être contestée, que M. Y..., directeur de la recherche et du développement du CSTB, avait non seulement approuvé dès le 1er février 2004 l'idée de la création de l'association HQE2R mais qu'il y avait adhéré personnellement le 11 septembre 2004 et que le CSTB y avait lui-même adhéré dès le 20 mars 2004 ; qu'en reprochant dès lors à la salariée d'avoir dissimulé à sa hiérarchie le lancement d'une association HQE2R concurrente de celle du CSTB sans s'expliquer sur ces éléments de nature à contredire l'existence d'une activité dissimulée concurrentielle et préjudiciable à son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail ;
4° / que le juge prud'homal doit apprécier le bien fondé du licenciement en s'en tenant aux seuls griefs énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 8 avril 2004 se bornait à reprocher à Mme X... d'avoir déposé à l'INPI en son nom la marque HQE2R alors qu'il s'agissait du sigle d'un programme européen sur lequel elle travaillait au CSTB ; qu'en disant le licenciement justifié par le fait que Mme X... aurait tenté de détourner une partie de l'activité du CSTB en s'appuyant sur la confusion de la marque HQE2R avec l'association HQE à laquelle appartenait son employeur et qui détenait la licence exclusive de la marque HQE en France, ce qui constituerait un manquement à son obligation de loyauté, la cour d'appel qui s'est fondée sur des motifs non invoqués dans la lettre de licenciement a violé les articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du code du travail ;
5° / que Mme X... faisait valoir dans ses écritures, que son employeur avait connaissance dès 1998 des liens familiaux existants entre la société La Calade et elle-même ; qu'elle justifiait de ce que son supérieur hiérarchique M. Z...savait non seulement que la société La Calade avait son siège social à son domicile mais connaissait également ses filles dont la qualité d'actionnaires de la société La Calade apparaissait clairement sur Infogreffe ; qu'en affirmant que M. Z...n'avait pas connaissance de ces liens familiaux sans prendre en considération ces éléments, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail ;
6° / que les jugements doivent être motivés ; que dans ses conclusions d'appel, Mme X... soulignait que sa prétendue dissimulation des membres de sa famille comme actionnaire de la société " La Calade " constituait un fait antérieur au 17 mai 2002 qui était couvert par la loi d'amnistie du 6 août 2002 et ne pouvait donc donner lieu à sanction disciplinaire ; qu'en retenant ce grief à l'appui du licenciement sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu d'abord que, s'agissant d'un licenciement prononcé à titre disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de la rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués ;
Et attendu que la cour d'appel a retenu qu'en déposant à titre personnel le sigle HQE2R à l'institut national de la propriété intellectuelle, en annonçant la création d'une association chargée de poursuivre le programme HQE2R au cours d'une conférence organisée par son employeur sans avoir obtenu l'accord de celui-ci ni même l'avoir avisé, puis en créant le 16 mars 2004 l'association intitulée HQE2R dont elle était la présidente et dont l'objet était l'exploitation de la méthodologie développée dans le cadre de son activité salariée, Mme X... avait utilisé les moyens obtenus dans le cadre de son travail pour mettre en place une structure destinée à concurrencer son employeur, manquant ainsi à son obligation de loyauté ; qu'ayant décidé dans l'exercice du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 phrase 1, devenu L. 1235-1, du code du travail que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer une certaine somme au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, alors selon le moyen, que l'article 15 de la convention collective des ingénieurs et cadres du bâtiment prévoit que le montant de l'indemnité de licenciement se calcule en nombre de mois de rémunération conformément au barème fixé qui prend notamment en compte l'ancienneté totale du salarié ; que des modalités de calcul différentes sont précisées pour une ancienneté dans l'entreprise " de cinq à dix années " et " au-delà de dix ans ", aucune indemnité n'étant prévue pour une ancienneté " de zéro à cinq ans " ; que l'article 15 de la convention collective n'établit pas des tranches mais un barème en fonction de seuils d'ancienneté qui imposent de calculer l'indemnité de licenciement en totalité au taux correspondant à l'ancienneté globale acquise par le salarié au jour de la rupture ; qu'en retenant que la convention collective prévoyait des tranches d'ancienneté et qu'il y avait lieu d'appliquer successivement à chaque tranche d'ancienneté le taux correspondant, la cour d'appel a violé l'article 15 de la convention collective des ingénieurs et cadres du bâtiment ;
Mais attendu, d'abord, que selon le barème fixé par l'article 15 de la convention collective des ingénieurs et cadres du bâtiment, l'indemnité de licenciement, calculée en fonction de la rémunération mensuelle moyenne du salarié, est égale, pour une ancienneté dans l'entreprise de cinq à dix ans, à un mois et 20 % de mois par an au dessus de cinq ans de présence et pour une ancienneté dans l'entreprise au delà de dix ans, à deux mois plus 50 % de mois par an au dessus de dix ans de présence ; qu'il en résulte que le calcul de l'indemnité doit se faire par tranches et non par seuils ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a retenu pour le calcul de l'indemnité de licenciement qu'il y avait lieu d'appliquer successivement à chaque tranche d'ancienneté le taux correspondant, a fait une exacte application du texte susvisé ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille huit.