LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 18 septembre 2007), que Mme X... a été engagée par la société François Y... architecte et associés le 23 août 1991 en qualité de dessinateur projecteur ; qu' elle a été nommée en août 2003 chef de bureau, coefficient 450 de la convention collective des cabinets d'architecte, puis classée au coefficient 471 dans le cadre de la nouvelle convention collective nationale des entreprises d'architecture applicable à compter du 16 janvier 2004 ; que, contestant cette classification, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail et saisi la juridiction prud'homale afin de faire juger que cette rupture produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir un rappel de salaire fondé sur la classification revendiquée de niveau V position 1 ou à défaut de niveau IV position 2 de la convention collective ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la salariée devait être classée au niveau IV, position 2, en application de la nouvelle convention collective nationale des entreprises d'architecture, alors, selon le moyen :
1°/ que le non-respect d'une procédure applicable à un changement dans les modalités de classification par application d'une nouvelle convention collective ne peut se traduire que par l'allocation de dommages-intérêts dans l'hypothèse ou ce non-respect de la procédure a été source d'un préjudice spécifique ; qu'en statuant différemment et en affirmant que la salariée aurait dû être classée au niveau IV position 2 coefficient 541, points d'ancienneté compris, en application de la grille de classification de la nouvelle convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003, la cour d'appel ne justifie pas légalement son arrêt au regard de ladite convention collective, ensemble au regard de l'article 1134 du code civil ;
2°/ que pour affirmer que l'employeur n'a pas respecté les dispositions de l'article V-1-9 de la nouvelle convention collective qui précise que le nouveau classement ne doit entraîner aucune diminution de la rémunération, la cour d'appel relève qu'il ressort que le salaire de janvier 2004, complété par la prime d'ancienneté, est inférieur de 25,56 euros au salaire de février 2004, incluant la prime d'ancienneté ; que la diminution de rémunération a été compensée par l'incidence de l'augmentation de la valeur du point intervenu entre-temps ; qu'une telle affirmation, au demeurant paradoxale puisque le salaire de février 2004 a été globalement plus élevé que celui de janvier 2004, sans autres précisions et sans indication des éléments d'où ressortirait la méconnaissance des dispositions de l'article V-1-9 de la nouvelle convention collective, la cour d'appel ne justifie davantage son arrêt au regard de ladite convention collective, ensemble au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'il était soutenu dans les conclusions d'appel que la salariée, qui en avait la possibilité, n'a pas saisi la commission paritaire régionale de conciliation cependant que les dispositions conventionnelles lui en offraient la possibilité et que sans doute redoutait-elle l'appréciation des professionnels ; qu'en ne répondant pas à ce moyen de nature à avoir une incidence sur la solution du litige, la cour d'appel ne satisfait pas aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile, méconnu ;
4°/ que, dans ces mêmes conclusions, l'employeur insistait sur la circonstance que le niveau qui était accordé à la salariée, c'est-à-dire niveau IV position 1 était parfaitement conforme aux fonctions exercées dans la mesure où les esquisses avant projet et projet établis étaient toutes surveillées, et le cas échéant corrigées par M. Y..., étant de plus observé que cette salariée n'a jamais signé aucun projet ni aucun permis de construire, étant encore souligné qu'elle ne pouvait comparer les fonctions de l'appelante avec celles de M. Z... plus âgé, qui a suivi de nombreux chantiers et étant polyvalent ; qu'en ne répondant pas à ces aspects de la démonstration et en affirmant sans autre précision que M. Z... occupait le même emploi que Mme X... pour statuer comme elle l'a fait, la cour d'appel ne justifie pas légalement son arrêt au regard du texte cité au précédent élément de moyen ;
Mais attendu que c'est par une décision motivée, et sans encourir les griefs du moyen, que la cour d'appel, examinant les fonctions réellement exercées par la salariée, a estimé qu'elle devait être classée au niveau IV, position 2, de la grille de classification de la nouvelle convention collective des entreprises d'architecture ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société François Y... architecte et associés aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils pour la société François Y... architecte et associés.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé qu'une salariée aurait dû être classée au niveau IV, position II, coefficient 541, points d'ancienneté compris, en application de la grille de classification de la nouvelle convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003 et en conséquence, d'avoir condamné l'ancien employeur d'un salarié au paiement d'un rappel de salaire au titre d'une régularisation.
AU MOTIF QUE Madame X... bénéficiait du coefficient 450 prévu par l'ancienne convention collective qui correspondait, dans la catégorie « cadre », à la qualification de « chef du bureau des études » définie comme suit :
« Groupe sous son autorité l'ensemble du personnel du bureau d'études. Conduit des études et en discute la réalisation avec la clientèle ; entre autres, ont de plein droit accès à ce poste les titulaires du diplôme d'architecture délivré par l'Etat sur proposition de PROMOCA » ;
Qu'elle était classée au début de l'année 2004 au niveau IV, position I, coefficient 430 prévu par la nouvelle convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003, étendue par arrêté du 6 janvier 2004, entré en vigueur le 16 janvier 2004 ;
Que ce niveau de classification correspond aux fonctions suivantes :
« Les salariés de niveau IV, position I, réalisent et organisent sous la condition d'en rendre compte à leur direction, des missions à partir de directives générales.
Leur activité s'exerce dans le cadre d'une autonomie définie ponctuellement.
Ils sont, dans cette limite, responsables de l'accomplissement de leurs missions.
Les emplois de ce niveau comportent des missions nécessitant d'une part la maîtrise des outils nécessaires à leur réalisation, d'autre part la capacité à analyser les contraintes liées à leur activité acquise par :
- diplôme de niveau II ou de niveau I de l'Education Nationale,
- des formations continues ou autres,
- et / ou une expérience professionnelle acquise aux positions précédentes ».
AU MOTIF QUE le classement des salariés a été opéré en application de la nouvelle convention collective, selon les modalités suivantes :
« La classification doit être appliquée, après information des salariés, dans un délai maximum de quatre mois après l'extension de la convention collective.
L'information se fait au cours de réunions ou l'employeur et les salariés, et / ou les délégués du personnel (article II-5) échangent sur les principes de la classification et déterminent le processus de mise en application de celle-ci.
Préalablement au classement, des entretiens individuels seront organisés par l'employeur.
Au cours de ceux-ci, l'employeur et le salarié échangent sur la prise en compte des différents critères de la classification à l'aide de la grille jointe en annexe.
En suite, l'employeur informe le salarié de son classement et le lui notifie par écrit sous quinzaine.
La modification peut être faite sous forme de reçu contre décharge.
En cas de désaccord, le salarié peut demander, par écrit, à l'employeur un réexamen, sous un mois, après un nouvel entretien.
En cas de désaccord persistant, le salarié peut saisir par écrit la Commission Paritaire Régionale pour Conciliation, via le secrétariat de la Commission Paritaire Nationale de la Négociation Collective, 26 boulevard Raspail (75007) Paris. »
AU MOTIF AUSSI QUE la nouvelle grille de classification comportait les définitions générales des emplois répertoriés en six niveaux de qualification correspondant à onze positions hiérarchiques ;
Que le classement des salariés devait être effectué à partir des définitions générales de niveaux en tenant compte des critères suivants :
- compte tenu de l'activité,
- autonomie – initiatives,
- technicité,
- formation et / ou expérience.
AU MOTIF ENCORE QUE Madame X... soutient, d'une part, que l'employeur n'a respecté ni la procédure, ni les différents critères de classement prévus par la nouvelle convention collective et d'autre part, qu'elle aurait été classée à la position II du niveau IV, coefficient 500 de la nouvelle grille de classification ;
Que, dès lors que la contestation de la salariée porte sur la régularisation de la mise en oeuvre par l'employeur de la nouvelle classification conventionnelle, il n'appartient pas seulement à la salariée d'établir que ses fonctions correspondaient au niveau de qualification revendiqué, mais il incombe également à l'employeur de prouver qu'il a respecté la procédure de classement prévue par la convention collective et que le classement de la salariée est en adéquation avec ses fonctions et ses compétences professionnelles au regard des différents critères professionnels classants ;
Qu'il convient de relever que l'employeur ne rapporte aucun élément de preuve de nature à établir qu'il a respecté la procédure conventionnelle prévue pour la mise en place de la nouvelle classification ;
Qu'il ne justifie pas avoir organisé des réunions avec son personnel pour assurer cette mise en application ni avoir eu des entretiens individuels avec ses salariés ;
Qu'en particulier, il ne justifie pas avoir fait le bilan de compétences de Madame X... en se conformant à la grille de critères prévue par l'ex B guide de la classification, selon laquelle il devait évaluer son poste et ses fonctions sur la base de quarante normes d'appréciation dans les quatre domaines suivants : « contenu de l'activité », « autonomie et initiative », « technicité » et « formation et / ou expérience » ;
Qu'il ne justifie pas davantage avoir demandé à l'intéressée de procéder dans les mêmes conditions à l'évaluation de ses compétences afin de confronter leurs évaluations au cours d'un entretien, comme le préconise le guide de classification ;
Que l'employeur s'est borné à mentionner un coefficient « 471 » niveau « IV » sur les bulletins de salaire de février et mars 2004 sans avoir procédé à la notification préalable du nouveau classement ;
Qu'il a ultérieurement remplacé sur le bulletin de salaire d'avril 2004 la mention « chef du bureau des études » par la mention « IV-I ».
AU MOTIF AU SURPLUS QUE ce n'est qu'à la suite des réclamations insistantes de Madame X... à compter du 11 juin 2004 qu'il a procédé, le 2 juillet 2007, à l'égard de tous les salariés de l'entreprise à la notification de leur nouvelle position, cependant que cette notification aurait dû intervenir au plus tard dans les quatre mois suivant l'entrée en application de la nouvelle convention collective, soit avant le 16 mai 2004 ;
Qu'il s'avère ainsi qu'au lieu de réaliser dans la transparence et le dialogue voulus par les signataires de la nouvelle convention collective, l'employeur a procédé de manière unilatérale, au classement d'une salariée sans procéder à une évaluation contradictoire de ses fonctions et de ses compétences en la privant ainsi de la possibilité d'exercer utilement un recours contre ce classement ;
Qu'en procédant ainsi, alors qu'en raison de son caractère exceptionnel, le passage d'une grille de qualification à une autre nécessitait que soit respectée scrupuleusement la méthodologie préconisée par les signataires de la nouvelle convention collective, l'employeur a manqué à ses obligations ;
AU MOTIF AUSSI QUE la société François Y... ARCHITECTE et ASSOCIES soutient à tort que le nouveau classement de la salariée était conforme à sa situation professionnelle dès lors qu'il n'en est résulté aucune perte de salaire ;
Que cette affirmation n'est pas exacte dès lors qu'il ressort que le salaire de janvier 2004, complété par la prime d'ancienneté, est inférieur de 25,56 au salaire de février 2004, incluant la prime d'ancienneté et que la diminution de rémunération était compensée par l'incidence de l'augmentation de la valeur du point intervenue entre-temps ;
Que l'employeur n'a donc pas respecté les dispositions de l'article V-1-9 de la nouvelle convention qui précise que le nouveau classement ne doit entraîner aucune diminution de la rémunération ;
Que, selon les bulletins de salaire versés aux débats, à l'exception de la secrétaire technique dont l'emploi ne peut être comparé à celui qu'occupait Madame X..., aucun des employés de la société François Y... ARCHITECTE et ASSOCIES n'a vu sa rémunération baisser lors du changement de classification ;
Qu'en particulier, Monsieur Z..., qui occupait le même emploi de chef du bureau des études que Madame X... et qui avait le même coefficient 450, était classé à une rang hiérarchique supérieur en étant placé à compter du 1er février 2004 au niveau IV, position II, coefficient 500, alors qu'il avait moins de deux ans et demi d'ancienneté et que Madame X... en comptait près de treize ;
Que par rapport aux salariés de niveau IV, position I qui exercent leur activité « dans le cadre d'une autonomie définie ponctuellement », les salariés classés à la position II du même niveau de classement se distinguent par le fait qu'ils remplissent leur fonction « dans le cadre d'une autonomie partielle » ;
Que sur ce point, il n'est fourni explication ni aucun élément qui permettraient de justifier objectivement la différence de classement entre Madame X... et Monsieur Z... ;
Que dès lors que, pour la conduite des études et la discussion de leur réalisation avec la clientèle, son ancien emploi de chef du bureau des études nécessitait un degré d'indépendance au moins équivalent au niveau d'autonomie « partielle » dont bénéficie un salarié de niveau IV, position II, coefficient 500, il est justifié d'attribuer à Madame X... ce niveau de qualification majoré de 41 points d'ancienneté non contestés, observation étant faite que le coefficient 550 réservé aux salariés disposant d'une autonomie « totale » doit être écarté en raison de l'absence d'autonomie totale de la salariée au sein d'une petite structure ;
Qu'il convient en conséquence d'accorder à l'intéressée un rappel de salaire de 7.642,38 , indemnité de congés payés comprise, pour la période ayant couru du 1er février 2004 au 5 juin 2005 ;
ALORS QUE D'UNE PART le non respect d'une procédure applicable à un changement dans les modalités de classification par application d'une nouvelle convention collective ne peut se traduire que par l'allocation de dommages et intérêts dans l'hypothèse ou ce non respect de la procédure a été source d'un préjudice spécifique ; qu'en statuant différemment et en affirmant que la salariée aurait dû être classée au niveau IV position 2 coefficient 541, points d'ancienneté compris, en application de la grille de classification de la nouvelle convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003, la Cour ne justifie pas légalement son arrêt au regard de ladite convention collective, ensemble au regard de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE D'AUTRE PART pour affirmer que l'employeur n'a pas respecté les dispositions de l'article V – 1 – 9 de la nouvelle convention collective qui précise que le nouveau classement ne doit entraîner aucune diminution de la rémunération, la Cour relève qu'il ressort que le salaire de janvier 2004, complété par la prime d'ancienneté, est inférieur de 25,56 au salaire de février 2004, incluant la prime d'ancienneté que la diminution de rémunération a été compensée par l'incidence de l'augmentation de la valeur du point intervenu entre temps ; qu'une telle affirmation au demeurant paradoxale puisque le salaire de février 2004 a été globalement plus élevé que celui de janvier 2004, sans autres précisions et sans indication des éléments d'où ressortirait la méconnaissance des dispositions de l'article V – 1 – 9 de la nouvelle convention collective, la Cour ne justifie davantage son arrêt au regard de ladite convention collective, ensemble au regard de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE DE TROISIEME PART ET EN TOUTE HYPOTHESE il était soutenu dans les conclusions d'appel (cf p. 4 avant dernier alinéa) que la salariée, qui en avait la possibilité, n'a pas saisi la commission paritaire régionale de conciliation cependant que les dispositions conventionnelles lui en offraient la possibilité et que sans doute redoutait-elle l'appréciation des professionnels ; qu'en ne répondant pas à ce moyen de nature à avoir une incidence sur la solution du litige, la Cour ne satisfait pas aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile, méconnu ;
ET ALORS ENFIN QUE dans ces mêmes conclusions (cf p. 5) l'employeur insistait sur la circonstance que le niveau qui était accordé à la salariée, c'est à dire niveau IV position 1 était parfaitement conforme aux fonctions exercées dans la mesure où les esquisses avant projet et projet établis étaient toutes surveillées, et le cas échéant corrigées par Monsieur Y... étant de plus observé que cette salariée n'a jamais signé aucun projet ni aucun permis de construire étant encore souligné qu'elle ne pouvait comparer les fonctions de l'appelante avec celles de Monsieur Z... plus âgé, qui a suivi de nombreux chantiers et étant polyvalent (cf. page 10), qu'en ne répondant pas à ces aspects de la démonstration et en affirmant sans autre précision que Monsieur Z... occupait le même emploi que Madame X... pour statuer comme elle l'a fait, la Cour ne justifie pas légalement son arrêt au regard du texte cité au précédent élément de moyen.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir jugé qu'en raison des manquements de l'employeur, la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'être prononcée sur le fondement du premier moyen, entraînera pas voie de conséquence l'annulation du chef du dispositif de l'arrêt relatif au licenciement et aux condamnations prononcées par rapport à ce licenciement et ce en application des dispositions de l'article 624 du Code de procédure civile.