LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles R. 165-1 et R. 332-3 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon le second de ces textes, que les soins dispensés aux assurés sociaux dans un autre Etat membre de l'Union européenne sont remboursés dans les mêmes conditions que s'ils avaient été reçus en France ; que, selon le premier, les frais d'optique sont remboursés sur prescription médicale ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X... a sollicité auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de Dieppe (la caisse) la prise en charge de frais d'optique exposés par lui même et par son épouse lors d'un séjour en Belgique ; que la caisse ayant rejeté sa demande, il a saisi d'un recours la juridiction de la sécurité sociale ;
Attendu que, pour faire droit à la demande de M. X..., le jugement retient, après avoir rappelé les termes de l'article R. 332-3 du code de la sécurité sociale, que la position de la caisse porte atteinte à la libre prestation de service en exigeant une prescription médicale, alors qu'elle ne fait pas état, ni ne justifie d'un risque pour l'équilibre financier du système de sécurité sociale, ni de motifs tirés de la protection de la santé publique ;
Qu'en statuant ainsi, assimilant à tort à des conditions administratives de prise en charge des soins la nécessité d'une prescription médicale, dont M. X... ne justifiait ni pour lui, ni pour son épouse, le tribunal a violé les textes susivsés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 18 décembre 2007, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale du Havre ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour la CPAM de Dieppe
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir fait droit à la demande de Monsieur Alexander X..., et condamné ainsi la CPAM de DIEPPE à prendre en charge les frais de renouvellement d'optique exposés par cet assuré en Belgique pour un montant de 1.053,73 ;
AUX MOTIFS QUE selon les dispositions de l'article R 332-3 du Code de la sécurité sociale, les caisses d'assurance maladie procèdent au remboursement des frais de soins dispensés aux assurés sociaux et à leurs ayants droit dans un état membre de L'Union Européenne ou partie à l'accord sur l'Espace Économique Européen, dans les mêmes conditions que si les soins avaient été reçus en France … et sous réserve des adaptations prévues aux articles R 332-4 à R 332-6 ; qu'ainsi la distinction faite par l'organisme social selon que l'assuré est titulaire ou non d'une carte européenne d'assurance maladie et selon le type de réclamation du remboursement de la prestation litigieuse ne résulte pas de la disposition invoquée par la défenderesse ; que la position de la caisse porte atteinte à la libre prestation de service en ce qu'elle exige une prescription médicale pour procéder au remboursement des frais d'optique sollicités par Mr X... alors qu'elle ne fait pas état et a fortiori ne justifie pas d'un risque d'atteinte grave à l'équilibre financier du système de sécurité sociale ni de motifs tirés de la protection de la santé publique ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en statuant ainsi, sans répondre au moyen de la caisse qui faisait valoir qu'en application des articles L 165-1 et R 165-1 du Code de la sécurité sociale, les soins, même reçus en France, ne pouvaient être remboursés par l'assurance maladie que sur prescription médicale, le Tribunal a violé l'article 455 du CPC ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en se déterminant de la sorte, tout en admettant expressément que les soins reçus à l'étranger doivent être remboursés dans les mêmes conditions que s'ils avaient été reçus en France, le Tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et violé ainsi par fausse application les articles L 165-1, R 165-1 et R 332-3 du Code de la sécurité sociale ;
ALORS, ENFIN, QU'en retenant subsidiairement que la caisse ne ferait pas état pas d'un risque d'atteinte grave à l'équilibre financier du système de sécurité sociale ni de motifs tirés de la protection de la santé publique, sans rechercher lui-même si ces risques d'atteintes à l'équilibre financier du système et à la santé publique ne résultaient pas nécessairement d'un risque, en cas d'absence de l'examen médical exigé par la législation, de prise en charge d'appareillages qui ne seraient plus adaptés à l'état médical de l'assuré tout en occasionnant à la caisse des dépenses inutiles, le Tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 49 et 50 du Traité CE.