LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 622-16, L. 622-17, L. 622-18 et L. 623-5 du code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et les principes régissant l'excès de pouvoir ;
Attendu que l'auteur d'une offre d'acquisition de gré à gré d'un actif d'un débiteur en liquidation judiciaire, n'ayant aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du code de procédure civile, n'est pas recevable à exercer un recours contre la décision du juge-commissaire autorisant ou ordonnant la vente au profit de l'auteur d'une offre concurrente ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, qu'après la mise en liquidation judiciaire de la société Collange auto (la société), la SAS Cambacauto (la SAS) et la ville de Levallois-Perret (la Ville) ont déposé des offres d'acquisition de ses actifs et, notamment, de son droit au bail ; que le juge-commissaire a, le 16 décembre 2005, ordonné la cession de ce droit au profit de la Ville ; que la SAS ayant formé un recours contre cette décision, un jugement du 30 mai 2006 a déclaré irrecevable l'offre de la Ville et rejeté les demandes des parties ; que cette dernière a interjeté appel-nullité ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel-nullité de la Ville, l'arrêt retient qu'en sa qualité de tiers intéressé la société Cambacauto avait la possibilité de former un recours contre l'ordonnance sur le fondement de l'article 25 du décret du 27 décembre 1985 et que le tribunal n'a commis aucun excès de pouvoir en déclarant recevable ce recours ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le tribunal avait excédé ses pouvoirs en déclarant recevable un recours qui n'était pas ouvert et en statuant sur le fond, la cour d'appel a violé les textes et les principes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel-nullité de la ville de Levallois-Perret contre le jugement rendu le 30 mai 2006, par le tribunal de commerce de Nanterre, l'arrêt rendu le 25 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare recevable l'appel de la ville de Levallois-Perret ;
Y faisant droit, annule le jugement rendu le 30 mai 2006 par le tribunal de commerce de Nanterre ;
Déclare irrecevable le recours de la société Cambacauto contre l'ordonnance du 16 décembre 2005 ;
Condamne la société Cambacauto aux dépens, y compris ceux afférents audit recours exposés devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour la ville de Levallois-Perret.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel-nullité interjeté par la Ville de Levallois-Perret contre le jugement du Tribunal de Commerce de Nanterre du 30 mai 2006 ;
Aux motifs que : « l'appel nullité n'est recevable que si les trois conditions suivantes sont cumulativement réunies :
- il a été interjeté dans le délai de l'article 157 du décret du 27 décembre 1985,
- il a été interjeté par une partie à l'instance,
- il se fonde sur un excès de pouvoir ;
… qu'il suffit que l'une seule de ces conditions ne soit pas remplie pour que l'appel nullité soit irrecevable ;
… que la SAS CAMBACAUTO et la SCP OUIZILLE – DE KEATING, ès qualités, contestent la recevabilité de l'appel nullité interjeté par la VILLE DE LEVALLOIS-PERRET à l'encontre du jugement rendu le 30 mai 2006 au motif qu'aucun excès de pouvoir n'a été commis ;
… que la VILLE DE LEVALLOIS-PERRET voit un excès de pouvoir dans le fait que le Tribunal de commerce s'est contredit en déclarant le 30 mai 2006 le recours de la SAS CAMBACAUTO recevable, et en déclarant le 24 janvier 2007 son recours, pourtant identique, irrecevable ; qu'en violant le principe d'égalité entre les candidats repreneurs, les premiers juges ont commis un excès de pouvoir ; qu'elle ajoute qu'elle ne peut être qualifiée de « repreneur évincé » puisqu'au contraire, son offre a été retenue par l'ordonnance du juge-commissaire en date du 16 décembre 2005 ; que lui refuser tout recours dans ces conditions reviendrait à ignorer son droit à un procès équitable au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
… que par ordonnance en date du 16 décembre 2005 le juge-commissaire a retenu l'offre de reprise de la VILLE DE LEVALLOIS-PERRET ; que ce faisant il a statué dans la limite de ses attributions et n'a commis aucun excès de pouvoir ;
… qu'en sa qualité de tiers intéressé, la SAS CAMBACAUTO avait la possibilité de former un recours contre l'ordonnance sur le fondement de l'article 25 du décret du 27 décembre 1985 ; que le Tribunal de commerce n'a commis aucun excès de pouvoir en déclarant recevable ce recours ;
… que, sur le fond, le Tribunal de commerce avait le pouvoir de vérifier la régularité de l'offre présentée par la VILLE DE LEVALLOIS PERRET et de rejeter les deux offres ; qu'il n'a donc commis aucun excès de pouvoir en constatant que la VILLE DE LEVALLOIS PERRET n'avait pas respecté les conditions fixées dans le dossier du dépôt des offres, en déclarant cette offre irrecevable, et en déboutant les parties de leurs demandes ;
… qu'en l'absence d'excès de pouvoir, l'appel nullité formé par la VILLE DE LEVALLOIS PERRET à l'encontre du jugement du 30 mai 2006 est irrecevable » ;
Alors que : par un jugement du 24 janvier 2007, le Tribunal de Commerce de Nanterre avait jugé irrecevable le recours exercé par la ville de Levallois Perret contre l'ordonnance du Juge Commissaire du 2 novembre 2006 : que le recours ayant abouti à ce jugement d'irrecevabilité était identique en tous points à celui, exercé contre l'ordonnance du 16 décembre 2005, qui avait abouti au jugement du 30 mai 2006 ; qu'il en résulte que ce premier recours était, lui aussi, nécessairement irrecevable, de sorte qu'en en connaissant au fond, le Tribunal de Commerce avait statué au-delà de sa compétence ; qu'en jugeant toutefois qu'il n'avait commis aucun excès de pouvoir et que, partant, l'appel-nullité interjeté contre le jugement du 30 mai 2006 ne pouvait être accueilli, le la Cour d'appel a violé l'article L. 623-4 du Code de Commerce, ensemble l'article 25 du décret n° 85-1.388 du 27 décembre 1985 dans sa version applicable en l'espèce.