LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 545 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 12 février 2008), que les époux X... ont acquis une maison avec un terrain attenant le 10 mai 2002, jouxtant la propriété des époux Y... ; que ceux-ci ayant, courant 1999, procédé à des travaux d'enrochement et de décaissement , les époux X... les ont assignés afin de voir les lieux remis en état, les travaux d'aménagement empiétant sur leur propriété ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient qu'il est acquis par les pièces du dossier et le rapport de l'expert judiciaire que le terrassement et l'enrochement sont situés au-delà de la ligne séparative et donc sur le fonds des époux X..., qu'il ne peut en être déduit que les époux Y... empiètent sur la partie décaissée qu'ils n'utilisent pas, qu'aucune atteinte à la propriété du fonds d'autrui n'est caractérisée ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les travaux réalisés par les époux Y... étaient situés sur la propriété des époux X..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer aux époux X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des époux Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP BACHELLIER et POTIER DE LA VARDE, avocat aux Conseils pour les époux X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. et Mme Eric X... de leurs demandes tendant à voir condamner M. et Mme Pierre Y... à remettre les lieux en état avant le décaissement actuel et à leur payer des dommages intérêts pour résistance abusive. ;
AUX MOTIFS QUE les époux X... ont acheté leur bien selon acte du 10 mai 2002 aux époux Z..., Mme B... étant la soeur de Mme Y..., eux-mêmes l'ayant acheté par acte du 11 mars 1999, le jour même où les époux Y... faisaient l'acquisition auprès du même vendeur de leurs parcelles C 1007 et 1009, ces quatre parcelles étant issues de la division des parcelles C n° 617 et C n° 618 ; que Pierre Y..., terrassier de profession, a procédé courant 1999 sur le fonds B... à des travaux de décaissements et d'enrochement pour soutenir le talus, il est ainsi acquis par les pièces du dossier et le rapport de l'expert judiciaire que ce terrassement et cet enrochement sont situés au-delà de la ligne séparative et donc sur le fonds des époux X... ; il ne peut pour autant être déduit de ces éléments que les époux Y... empiètent sur la partie décaissée qu'ils n'utilisent pas ; aucune atteinte à la propriété du fonds d'autrui n'étant caractérisé à leur encontre, les époux X... doivent être déboutés de leur action en revendication comme étant non fondée et injustifiée ; l'emplacement du terrassement et de l'enrochement a certes fait perdre aux époux X... une partie de leur surface utile, ils ont cependant constaté, lors de leur acquisition en 2002, cet état des lieux qui remonte à 1999 et qui n'avait en son temps, suscité aucune protestation ni réserve de leurs auteurs dont les attestations, qui se contredisent entre elles, sont écartées des débats ; le jugement entrepris doit être infirmé en toutes dispositions et les époux X... déboutés de l'intégralité de leur demande ;
ALORS QUE d'une part nul ne pouvant être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour une cause d'utilité publique, la démolition d'une construction reposant sur le fonds voisin doit être ordonnée quand le propriétaire de ce fonds l'exige, quelle que soit l'importance de cet empiètement ; que dès lors en affirmant, pour débouter les époux X... de leurs demandes de remise des lieux en l'état avant décaissement et de dommages intérêts, qu'aucune atteinte à la propriété du fonds d'autrui n'était caractérisée à l'encontre des époux Y... qui n'utilisaient pas la partie décaissée, la cour d'appel, qui a elle-même relevé qu'il était acquis que le terrassement et l'enrochement réalisés par M. Y... sont situés au-delà de la ligne séparative sur le fonds des époux X... et que l'emplacement de ce terrassement et de cet enrochement leur avait fait perdre une partie de leur surface utile, n'a pas tiré de ses constatations, d'où ressort un empiètement caractérisé, les conséquences légales qui s'imposaient et a violé l'article 545 du code civil ;
ALORS QUE d'autre part il appartient à l'auteur d'un empiètement, même partiel sur la propriété immobilière d'autrui de justifier d'un titre l'y autorisant ou d'un accord amiable du propriétaire ; dès lors en ajoutant, pour débouter les époux X... de leur demande, qu'ils avaient constaté lors de leur acquisition en 2002 l'état des lieux qui remontait à 1999 et n'avait suscité aucune protestation de leurs auteurs, la cour d'appel qui n'a relevé aucun accord exprès des époux X... ou de leurs auteurs, qui était contesté, au terrassement et à l'enrochement réalisés sur leur fonds, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 545 du code civil.