LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 19 décembre 1981 sous le régime de la séparation de biens ; que le 5 septembre 1986, ils ont acquis en indivision une maison d'habitation située à Nîmes ; qu'un jugement du 23 septembre 1996 a prononcé leur divorce et homologué leur convention définitive aux termes de laquelle les époux convenaient de laisser dans l'indivision pendant une durée de cinq ans l'immeuble indivis dont la gestion était confiée à Mme Y... ; que, par ailleurs, les époux étaient titulaires de deux comptes joints qui ont continué à fonctionner après le divorce ; que le 12 octobre 2001, M. X... a assigné Mme Y... en partage de l'immeuble indivis et en remboursement de la contre-valeur de vingt-trois parts de SICAV acquises en 1993 ; que Mme Y... a sollicité le partage des comptes bancaires et le paiement d'une indemnité de gestion ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Nîmes, 17 avril 2007) de l'avoir déboutée de sa demande d'indemnité au titre de la gestion de l'immeuble indivis, alors, selon le moyen :
1°/ que l'indivisaire gérant a droit à la rémunération de son activité qui, à défaut d'accord amiable, est fixée par le juge ; qu'en l'espèce, dans le silence de la convention des parties, Mme Y..., dont il n'est pas contesté qu'elle ait géré l'immeuble indivis, avait droit à une rémunération qu'il incombait au juge de fixer, de telle sorte que la cour d'appel a violé l'article 1873-10 du code civil ;
2°/ que l'obligation de reddition de comptes de l'indivisaire gérant n'est pas sanctionnée par la privation de sa rémunération, de sorte que la cour d'appel a violé ensemble les articles 1873-11, alinéa 1er, et 1873-10 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que Mme Y... n'avait pas régulièrement rendu compte de sa gestion et de la destination des fruits produits par le bien indivis, la cour d'appel a souverainement estimé que sa demande d'indemnisation au titre de son activité de gestion n'était pas justifiée ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à rembourser à M. X... la valeur de vingt-trois parts de SICAV achetées en 1993, alors, selon le moyen :
1°/ que la cour d'appel, qui n'a pas répondu au moyen déterminant de Mme Y... invoquant un don manuel des vingt-trois parts de SICAV achetées en 1993, a entaché sa décision d'un grave défaut de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que sous le régime de la séparation de biens, la propriété personnelle d'un bien résulte du titre d'acquisition sans avoir égard à l'origine des fonds qui ont servi à son acquisition ; qu'en l'espèce, les parts de SICAV ayant été acquises au nom de Mme Y..., la preuve de sa propriété personnelle était établie, de sorte que la cour d'appel, en statuant comme elle l'a fait, a violé l'article 1538, alinéa 1, du code civil, par refus d'application ;
Mais attendu que si sous le régime de séparation de biens, le bien appartient à celui dont le titre établit la propriété, sans égard à son financement, son conjoint peut obtenir le règlement d'une créance s'il prouve avoir financé tout ou partie de l'acquisition ; qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les titres litigieux avaient été achetés le 10 septembre 1993 par Mme Y... au moyen de fonds provenant du compte livret A de M. X... et du compte joint alimenté essentiellement par les salaires et indemnités de M. X... et que Mme Y... avait effectué le même jour un autre achat de parts de SICAV de même nature d'un montant équivalent, la cour d'appel a pu déduire de la concomitance entre la remise des fonds par M. X... et les deux achats individualisés effectués le même jour par Mme Y..., alors qu'il était loisible à celle-ci d'effectuer un seul achat comportant la totalité des titres acquis, l'existence d'un mandat verbal donné par M. X... à son épouse d'acquérir ces titres pour son compte et a répondu en l'écartant au moyen tiré de l'existence d'un don manuel au profit de Mme Y... ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Y... à payer à M. X... la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me LUC-THALER, avocat aux Conseils pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Madame Y... de sa demande en fixation d'indemnité au titre de sa gestion de l'immeuble indivis ;
AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE le principe de la rémunération du gérant est posée par l'article 1873-10 du Code civil mais il n'apparaît pas que cette possibilité ait été envisagée lors de la mise en place de l'indivision. En raison de la carence de la gérante qui n'a pas rendu compte régulièrement de sa gestion de l'immeuble indivis, il ne justifie pas de suppléer le silence des parties et d'allouer une telle indemnité ;
ALORS, d'une part QUE l'indivisaire gérant a droit à la rémunération de son activité qui, à défaut d'accord amiable, est fixée par le juge ; qu'en l'espèce, dans le silence de la convention des parties, Madame Y..., dont il n'est pas contesté qu'elle ait géré l'immeuble indivis, avait droit à une rémunération qu'il incombait au juge de fixer, de telle sorte que la Cour d'appel a violé l'article 1873-10 du Code civil ;
ALORS, d'autre part, QUE l'obligation de reddition de compte de l'indivisaire gérant n'est pas sanctionnée par la privation de sa rémunération, de sorte que la Cour d'appel a violé ensemble les articles 1873-11, alinéa 1, et 1873-10 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné Madame Y... à rembourser à Monsieur X... la valeur de 23 SICAV achetés en 1993 ;
AUX MOTIFS, adoptés du jugement OU' il est démontré en l'occurrence que le compte personnel de Madame Josette Y... (Caisse d'Epargne n° 043268237.29) a reçu deux sommes le 7 septembre 1993, l'une de 40.000 F par l'effet d'un virement interne qui ne peut provenir que du compte livret A de Monsieur Jean-Pierre X..., l'autre de 30.700 F en provenance du compte joint des époux alimenté essentiellement par les salaires et indemnités du demandeur. Selon toute vraisemblance, ces sommes ont été consacrées à l'achat de vingt trois Sicav EC Cap, le 10 septembre 1993 pour un montant pratiquement équivalent de 70.394,72 F qu'il convient de différencier d'un autre achat de 22 Sicav de même nature réalisé le même jour pour un montant de 66.667,48 F qui peut être rapproché de la vente antérieure le 9 septembre 1993 de Sicav EC Mon. pour 66.325,50 F ; Qu'à défaut de disposer d'un écrit matérialisant un contrat de mandat, ces éléments de contexte illustrent néanmoins une relation certaine entre les fonds remis par Monsieur Jean-Pierre X... et l'achat concomitant des vingt-trois Sicav et établissent suffisamment la réalité d'un mandat verbal entre deux époux unis par un lien d'affection et d'estime qui devait conduire Madame Josette Y... à acquérir ces titres pour le compte de son époux en procédant le même jour à deux achats individualisés alors qu'il lui était tout autant loisible d'effectuer un seul achat comportant la totalité des titres acquis ;
ALORS, d'une part OUE, la Cour d'appel, qui n'a pas répondu au moyen déterminant de Madame Y... invoquant un don manuel des 23 SICAV achetées en 1993, a entaché sa décision d'un grave défaut de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
ALORS, d'autre part, OUE sous le régime de la séparation de biens, la propriété personnelle d'un bien résulte du titre d'acquisitions ans avoir égard à l'origine des fonds qui ont servi à son acquisition ; qu'en l'espèce, les SICAV ayant été acquises au nom de Madame Y..., la preuve de sa propriété personnelle était établie, de sorte que la Cour d'appel, en statuant comme elle l'a fait, a violé l'article 1538, al. 1 du Code civil par refus d'application.