LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause le syndicat des copropriétaires Les Jardins de l'Eden ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 121-12 du code des assurances, ensemble les articles 2244 ancien du code civil, 126, 334 et 336 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 avril 2008, rendu sur renvoi de cassation, 3e Civ. 12 avril 2005, pourvoi n° 04-12. 403), que la société Ric investissement immobilier, devenue la société Cogedim, assurée selon police " dommages-ouvrage " par la société MGFA aux droits de laquelle se trouvent les sociétés Mutuelles du Mans IARD et MMA assurances mutuelles (Les Mutuelles du Mans), elles-mêmes aux droits de la société Mutuelle du Mans assurance (la société MMA), a fait édifier un immeuble constitué de plusieurs bâtiments, vendus par lots en l'état futur d'achèvement, et placés sous le régime de la copropriété, avec le concours, notamment, de M. X..., architecte, assuré par la société Mutuelle des architectes français (la société MAF), et la société Giorgi, aux droits de laquelle se trouve la société Immo Est, assurée par la société Generali assurance IARD, venant aux droits de la société La France ; que des désordres d'infiltrations étant apparus dans le bâtiment B- B1 postérieurement à la réception intervenue le 9 mai 1983, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Les Jardins d'Eden " (le syndicat) a, les 28 et 31 octobre 1988, assigné en référé aux fins d'obtenir la désignation d'un expert la société Ric investissement immobilier et la société MGFA, une ordonnance du 16 novembre 1988 désignant M. Y... et, sur assignation du 22 mars 1989 de la société MGFA, les opérations d'expertise étant rendues communes à M. X..., à la société Giorgi et à leurs assureurs par ordonnance du 26 avril 1989 ; qu'après dépôt du rapport de l'expert, le syndicat a, par acte du 3 mai 1993, assigné en réparation la société Ric investissement et la société MMA, qui a appelé en garantie, par acte des 2, 3, 9 et 15 juin 1993, M. X..., la société MAF, la société Giorgi et la société La France ;
Attendu que pour mettre hors de cause M. X..., les sociétés MAF, Immo Est, et Generali assurances IARD, sur les appels en garantie formés à leur encontre par l'assureur dommages-ouvrage du chef des condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat, l'arrêt retient que les citations en ordonnances communes délivrées par la société MMA ne pouvaient pas interrompre la prescription dès lors que cette société n'était pas titulaire du droit menacé, pour n'avoir pas été subrogée dans les droits du syndicat et qu'à la date à laquelle les ordonnances de référés ont été prononcées, la société MMA n'était toujours pas subrogée dans les droits du syndicat, de sorte que la cause de l'irrecevabilité de son action n'avait pas disparue au jour où le juge des référés a statué ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'une partie assignée en justice est en droit d'appeler une autre en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle, une telle action ne supposant pas que l'appelant en garantie ait déjà indemnisé le demandeur initial, qu'une assignation en référé qui tend à rendre commune une expertise ordonnée par une précédente décision constitue une citation en justice interrompant la prescription au profit de celui qui l'a diligentée, et qu'est recevable l'action engagée par l'assureur avant l'expiration du délai de forclusion décennale, bien qu'il n'ait pas eu au moment de la délivrance de son assignation la qualité de subrogé dans les droits de son assuré, dès lors qu'il a payé l'indemnité due à ce dernier avant que le juge du fond n'ait statué, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable les actions en garantie dirigées contre M. X..., les sociétés MAF, Immo Est et Generali assurance IARD par la société Mutuelles du Mans assurances du chef des condamnations mises à sa charge au profit du syndicat des copropriétaires Les Jardins d'Eden, l'arrêt rendu le 8 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes, autrement composée ;
Condamne M. X... et la MAF, la société Immo Est et la société Generali assurances IARD aux dépens sauf à ceux exposés par la mise en cause du syndicat qui resteront à la charge des Mutuelles du Mans ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. X... et de la MAF, de la société Immo Est et de la société Generali assurances IARD ; condamne M. X... et la MAF, la société Immo Est et la société Generali assurances IARD à payer, ensemble, la somme de 2 500 euros aux Mutuelles du Mans ; condamne les Mutuelles du Mans à payer au syndicat des copropriétaires Les Jardins de l'Eden la somme de 1 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit septembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société Mutuelle du Mans IARD et la société MMA IARD assurances mutuelles.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables les actions en garantie dirigées par la MMA IARD contre Gérard X... et la MAF, la S. A. S IMMO EST et la Compagnie GENERALI ASSURANCES IARD, mis hors de cause ces locateurs d'ouvrage et leurs assureurs, dit que les MMA supporteraient seules, à titre définitif, la charge des condamnations prononcées par le jugement déféré au profit d'Alain Z..., condamné les MMA à payer au Syndicat des copropriétaires " Les Jardins de l'Eden " les sommes de 70 888, 79, valeur septembre 1994, 60 616, 63, valeur septembre 1991, et 2 395, 74 à titre de dommages et intérêts, 6 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE " la reconnaissance de la SA RIC INVESTISSEMENTS IMMOBILIER, au cours des premières opérations d'expertise, d'avoir fait procéder à des travaux sur le lot de Jacqueline A... courant septembre ou octobre 1984 ne constitue pas une reconnaissance de responsabilité susceptible d'avoir interrompu la prescription du délai à l'égard de la SA GIORGI ou de Gérard X... ou de leurs assureurs respectifs ;
QUE la citation en justice n'interrompt un délai pour agir que si elle émane de celui qui a qualité pour exercer le droit menacé par la prescription et n'a d'effet qu'à l'égard du destinataire de la citation ;
QU'en l'espèce, si Gérard X..., la SA GIORGI et leurs assureurs ont été cités en référé par la Société d'assurances mutuelles MMA pour leur voir déclarer communes les ordonnances organisant les mesures d'expertise, ces citations ne pouvaient pas interrompre le délai dès lors que la Société d'assurances mutuelle MMA n'était pas titulaire du droit menacé, pour n'avoir pas été subrogée dans les droits du Syndicat et que dès lors le véritable titulaire n'agissait pas contre eux ;
QUE la Société d'assurances mutuelle MMA oppose en défense à la fin de non recevoir la jurisprudence selon laquelle l'assureur des dommages-ouvrage qui a introduit son action avant l'expiration du délai de garantie décennale sans avoir été subrogé dans les droits du titulaire de l'action demeurait recevable dès lors qu'il avait payé ce dernier avant que le juge n'ait statué sur le fond ; que (cependant) à la date à laquelle les ordonnances de référé ont été prononcées, la Société d'assurances MMA n'était toujours pas subrogée dans les droits du Syndicat, de sorte que la cause de l'irrecevabilité n'ayant pas disparu au jour où le Juge des référés a statué, le moyen est inopérant ;
QUE plus de dix années s'étaient écoulées à la date à laquelle la Société d'assurances MMA a assigné le maître d'oeuvre, l'entrepreneur et leurs assureurs devant le juges du fond, de sorte que, l'action étant prescrite à leur égard, aucune régularisation n'était plus possible ; que la forclusion étant acquise, le Syndicat, dans l'hypothèse où son représentant aurait été régulièrement habilité, ne pouvait plus intervenir utilement par voie de conclusions contre les constructeurs ou leurs assureurs, ni les personnes mises en cause exercer leurs actions en garantie contre eux ;
QU'il s'ensuit que les constructeurs et leurs assureurs sont fondés dans leurs fins de non recevoir et à obtenir leur mise hors de cause " ;
1°) ALORS QU'une partie assignée en justice est en droit d'en appeler une autre en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle, une telle action ne supposant pas que l'appelant en garantie ait déjà indemnisé le demandeur initial ; que par ailleurs, la citation en référé expertise interrompt la prescription ; qu'en l'espèce, il ressort des propres énonciations de l'arrêt attaqué (p. 5) qu'assignée en référé expertise par le Syndicat des copropriétaires par exploits des 28 et 31 octobre 1988, la MMA avait elle-même, par acte du 22 mars 1989, assigné en référé les différents intervenants à la construction et leurs assureurs aux fins de leur voir déclarer commune l'expertise ordonnée par ordonnance du 16 novembre 1988, que cette demande avait été accueillie par ordonnance du 26 avril 1989 ; que par la suite les MMA, assignées au fond par le Syndicat des copropriétaires suivant exploits du 3 mai 1993, avaient elles mêmes appelé en garantie Monsieur X..., la SA GIORGI et leurs assureurs respectifs par exploits des 2, 3, 9 et 15 juin 1993 ; qu'en déclarant cette action irrecevable, et en mettant les locateurs d'ouvrage hors de cause, au motif que la citation en référé du 26 avril 1989 n'avait pu interrompre la prescription " dès lors que la MMA n'était pas titulaire du droit menacé ", la Cour d'appel a violé les articles 334 et 336 du Code de procédure civile, ensemble l'article 2244 (ancien) du Code civil ;
2°) ALORS QU'est recevable l'action engagée par l'assureur dommages ouvrage avant l'expiration du délai de forclusion décennale, bien qu'il n'ait pas eu, au moment de la délivrance de son assignation, la qualité de subrogé dans les droits de son assuré, dès lors qu'il a payé l'indemnité due à ce dernier avant que le juge du fond n'ait statué ; qu'en déclarant irrecevable l'action en garantie intentée par les MMA, assureur dommages-ouvrage contre les locateurs d'ouvrage au motif qu'elle n'était pas subrogée dans les droits du maître de l'ouvrage " à la date à laquelle les ordonnances de référé avaient été prononcées ", la Cour d'appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble les articles 126 du Code de procédure civile et L. 124-3 du Code des assurances.