LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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X... Hans,
contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 19 novembre 2008, qui, sur renvoi après cassation, dans la procédure suivie contre lui du chef de transfert de capitaux sans déclaration, a ordonné la confiscation de la somme saisie ;
Vu les mémoires et observations complémentaires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et 34 de la Constitution, des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et 1er du premier protocole additionnel à cette convention, des articles 56 et 57 du Traité sur l'Union européenne et 4 de la directive n° 88/361 du 24 juin 1988, de l'article 40 de l'Accord sur l'espace économique européen, des articles 112-1 du code pénal, 464 et 465 du code des douanes, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation du principe de la liberté de circulation des capitaux et du principe de légalité, excès de pouvoirs ;
"en ce que la cour d'appel a ordonné la confiscation de la somme saisie ;
"aux motifs que la saisie était constituée, conformément aux textes alors applicables, par un acte de procédure unique produisant l'ensemble de ses effets immédiatement en ce qu'elle privait le détenteur de la somme d'argent du droit d'en disposer jusqu'à nouvelle décision, sur lequel la loi du 27 juillet 2007 (sic, en réalité le décret du 27 juillet 2004) ne pouvait avoir de conséquence rétroactive, et qu'il n'y avait donc pas lieu pour l'administration des douanes d'appliquer la procédure de consignation selon les modalités nouvelles ; que Hans X... a reconnu que le véhicule dans lequel il circulait lors du contrôle des douanes avait été spécialement aménagé, près de deux ans auparavant, par ajout d'une cachette dans le fond du coffre, afin de pouvoir transporter des objets précieux ; qu'il a également reconnu qu'il s'était rendu une fois de Zurich, où il habite, à Paris durant l'année précédant le déplacement durant lequel il a été interpellé ; que la possession d'un véhicule comportant une cache spécialement aménagée pour y dissimuler des objets laisse présumer la commission d'autres infractions au code des douanes ; que de plus l'existence de cette cache, ajoutée aux précédents voyages à l'étranger et au fait qu'une personne se soit adressée à lui pour assurer le transport d'une somme très importante à travers plusieurs frontières constituent des raisons plausibles de penser que Hans X... a commis antérieurement une ou plusieurs infractions au code des douanes ;
"et aux motifs adoptés qu'il est clairement établi que Hans X... n'a pas déclaré la somme de 1 000 040 euros aux douaniers français alors qu'il avait l'intention de transférer cet argent en Suisse ;
"alors que le juge ne peut, sans excéder ses pouvoirs, sanctionner un délit par une peine qui n'est pas prévue par la loi ; qu'aucune loi ne permet le prononcé de la peine de confiscation des sommes saisies en cas de délit de transfert de capitaux sans déclaration vers l'étranger, les dispositions de l'article 465-II prévoyant cette sanction étant issues d'un décret uniquement (décret n°2004-759 du 27 juillet 2004) ; qu'en sanctionnant le délit reproché au prévenu d'une peine de confiscation non prévue par la loi, la cour d'appel a violé l'article 111-2 du code pénal ainsi que le principe de légalité et a excédé ses pouvoirs ;
"alors subsidiairement que la condamnation de l'auteur d'un délit de transfert de capitaux sans déclaration à la confiscation des sommes saisies, en plus d'une amende douanière, constitue, sous le régime de la loi n°90-614 du 12 juillet 1990 dont sont issues les dispositions de l'article 465 du code des douanes avant leur modification par le décret du 27 juillet 2004, une sanction disproportionnée et entraîne une atteinte excessive au droit de propriété (CEDH, 26 février 2009, Grifhorst c. France, req. N° 28336/02) ; que Hans X... ayant déjà été condamné à une amende douanière, en ordonnant la confiscation des sommes saisies sur le fondement de la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ;
"alors, en toute hypothèse, que la sanction d'un manquement à l'obligation d'accomplir des formalités douanières, lorsque ces formalités portent sur des marchandises pouvant être importées librement et sans droits de douane, doit être nécessaire et proportionnée à la gravité de ce manquement sous peine de constituer une entrave à la liberté de circulation des capitaux consacrée par le Traité sur l'Union européenne, y compris pour les échanges avec les pays tiers, et par l'Accord sur l'espace économique européen, dont la Suisse est signataire, ainsi qu'une ingérence injustifiée dans le droit au respect des biens ; que ce rapport de proportionnalité doit être apprécié au regard du manquement effectivement réalisé et non au regard d'un manquement purement éventuel ; que la confiscation des sommes saisies, en sus d'une amende égale au quart de ces sommes, au seul motif qu'il existe des raisons plausibles de penser que l'auteur du manquement à l'obligation déclarative a commis une ou plusieurs infractions au code des douanes, est proportionnelle au regard d'un manquement éventuel uniquement et constitue une mesure disproportionnée au regard du seul manquement qui a été réalisé, le défaut de déclaration de transfert de capitaux ; qu'en ordonnant cette confiscation, au seul motif qu'il existe des raisons de penser que le prévenu, en sus du défaut de déclaration, aurait commis d'autres infractions au code des douanes, la cour d'appel a violé les articles 56 du Traité sur l'Union européenne et 40 de l'Accord sur l'espace économique européen, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme ;
"alors, en outre, qu'à supposer qu'elle puisse être prononcée en fonction d'un comportement éventuel du prévenu, la confiscation ne constitue une sanction proportionnée que s'il résulte de ce comportement éventuel que les sommes transférées sans déclaration auraient une origine illicite ou que le prévenu exercerait des activités illicites de nature à générer des revenus dont les sommes transférées seraient issues ; qu'en ordonnant la confiscation au motif qu'il existerait des raisons plausibles de penser que le prévenu aurait commis d'autres infractions au code des douanes, sans précision quant à la nature et à la gravité de ces infractions et quant au lien qu'elles auraient avec les sommes transférées, la cour d'appel, qui n'a pas constaté un comportement éventuel en lien avec une activité de blanchiment ou avec une activité d'une semblable gravité, a violé les articles 56 du Traité sur l'Union européenne et 40 de l'Accord sur l'espace économique européen, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme ;
"alors, enfin, que la seule circonstance que le véhicule du prévenu contienne une cachette aménagée, que ce même prévenu ait fait précédemment des voyages à l'étranger et se soit vu confier, dans le cadre de l'infraction poursuivie, une somme d'argent très importante ne constitue pas des raisons de penser que l'intéressé a précédemment commis des infractions au code des douanes" ;
Attendu que pour prononcer la confiscation de la somme saisie à l'encontre de Hans X... reconnu coupable de transfert de capitaux sans déclaration, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que l'article 465 du code des douanes, reprend les dispositions de l'article L. 152-4 du code monétaire et financier résultant de la loi du 9 mars 2004, la cour d'appel, qui a, sans insuffisance, caractérisé à la charge du prévenu la réunion de circonstances de fait prévues par les dispositions précitées, a, sans méconnaître les textes légaux et conventionnels invoqués, justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Bayet conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;