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02/12/2009 | FRANCE | N°08-88043

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 décembre 2009, 08-88043


Statuant sur les pourvois formés par :
- Y... Alessandrino,- X...Jack,

contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7e chambre, en date du 13 novembre 2008, qui a condamné le premier, pour faux, usage, recel de détournement de fonds publics et corruption active, à deux ans d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis et mise à l'épreuve, 50 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction de gérer, le second, pour usage de faux, détournement de fonds publics et corruption passive, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, 30 000 euros d'amende, cinq

ans d'inéligibilité, et a prononcé sur les intérêt civils ;

Joign...

Statuant sur les pourvois formés par :
- Y... Alessandrino,- X...Jack,

contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7e chambre, en date du 13 novembre 2008, qui a condamné le premier, pour faux, usage, recel de détournement de fonds publics et corruption active, à deux ans d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis et mise à l'épreuve, 50 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction de gérer, le second, pour usage de faux, détournement de fonds publics et corruption passive, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, 30 000 euros d'amende, cinq ans d'inéligibilité, et a prononcé sur les intérêt civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Baraduc et Duhamel pour Alessandrino
Y...
, pris de la violation des articles 111-4 et 441-1 du code pénal, 1134 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alessandrino
Y...
coupable de faux et d'usage de faux et l'a condamné ;
" aux motifs que l'argumentation développée dans les conclusions des prévenus
Y...
et X..., selon laquelle le document incriminé, à savoir une étude réalisée par un architecte intitulée « travaux réalisés – budget global de l'opération », indiquant comme montant total TTC de l'opération 11 385 920 francs (1 735 772 26 euros), aurait seulement valeur d'information pour la commune de Chassieu et ne constituerait pas un titre, support d'un faux en écriture, ne résiste pas à l'examen dès lors que ce document n'énonce pas le mot « prévisionnel », ne distingue pas entre les travaux déjà réalisés et ceux restant à accomplir, que des aveux ont été passés concernant l'établissement de ce document, et que celui-ci a été établi et utilisé par Alessandrino
Y...
pour se conformer aux obligations nées du dernier bail, lequel conditionnait la gratuité des loyers au montant des investissements effectivement réalisés ; que le bail fixe la date du 30 juin 2001 pour que soit apportée la preuve des investissements à la charge du preneur (Alessandrino
Y...
) ; que le non-respect de ses obligations par le preneur était de nature à entraîner des conséquences juridiques, à savoir la possibilité pour la commune de demander la résiliation du bail ; que c'est suivant la volonté de
Y...
que le document a été produit au notaire, dans le cadre contractuel du bail ; que le maire Jack X...a reconnu que ce document avait valeur contractuelle ; qu'il savait que les 11 000 000 de francs TTC ne correspondaient pas à la totalité des travaux réalisés mais a affirmé le contraire aux conseillers municipaux et à la population de Chassieu ;
" alors que seuls les documents ayant pour objet ou pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques peuvent servir de support à une altération de la vérité ; que le document établi le 28 janvier 2002 par l'architecte d'Alessandrino
Y...
pour la société Alma restauration, décrivant ensemble les « travaux réalisés et le budget global de l'opération » de rénovation, à le supposer mensonger, ne pouvait constituer un écrit susceptible d'entraîner des conséquences juridiques dès lors qu'aucune des clauses de l'avenant au bail du 15 septembre 2000 accordant la gratuité du montant de loyers pendant une durée de dix-sept ans ne prévoyait expressément que cette gratuité était soumise à la condition de réalisation de travaux dans un temps donné (cf concl. p. 10 à 12) ; qu'en conséquence, ce document, dépourvu de valeur probatoire, n'était pas susceptible de donner lieu à une altération frauduleuse de la vérité caractéristique du délit de faux " ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Baraduc et Duhamel pour Alessandrino
Y...
, pris de la violation des articles 121-1, 321-1 et 432-15 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alessandrino
Y...
coupable de recel de détournement de fonds publics et l'a condamné ;
" aux motifs que les accords secrets passés en 2001 avec l'entrepreneur
Y...
et les maires successifs Z...et X...ne sauraient constituer un engagement s'imposant à la municipalité, mais s'analysent comme le souci d'assurer des avantages supplémentaires à Alessandrino
Y...
au détriment de la commune de Chassieu ; que, par ailleurs, dans la procédure de prise en charge par la municipalité de travaux effectués sur le site loué par la société Alma restauration, une procédure inhabituelle a été appliquée au traitement des devis et factures puisque la quasi-totalité des documents lui arrivaient directement par le canal du maire, certains bons de commande ne supportant même que la signature du maire Jack X..., et systématiquement l'adjoint aux travaux se trouvait écarté ; qu'il est bien évident que par ce procédé, on tenait à garder la plus grande confidentialité sur ces interventions de la commune ; que de plus, et de façon tout à fait exceptionnelle, les services de la mairie n'ont jamais été en mesure de choisir les entreprises, de les mettre en concurrence et de suivre les travaux ; que c'est le locataire
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qui, alors qu'il ne procédait pas au financement, a assumé les choix, le suivi des chantiers et visé les factures pour permettre leur règlement ; que c'est la raison pour laquelle le directeur des services techniques de la mairie, concerné au premier chef par de tels travaux, a refusé d'être impliqué d'une quelconque manière dans ces opérations ; qu'en outre, la plupart des devis dont la mairie était destinataire lui parvenaient bien après que les travaux aient déjà été réalisés, de sorte que les bons de commande émis par les maires ne correspondaient plus qu'à un habillage, censé apporter une certaine conformité de façade à la procédure ; que s'agissant d'Alessandrino
Y...
, en ayant sciemment profité des sommes obtenues au moyen de détournements de fonds publics, sa culpabilité du chef de recel est établie puisqu'il n'ignorait pas que la prise en charge des travaux lui incombait selon les engagements contractuels et qu'il n'ignorait en rien l'origine des fonds ayant servi à financer illégalement ces travaux ; que contrairement à ce qui est soutenu par son conseil, les travaux ont bien bénéficié, au sens de l'article 321-1 du code pénal, à la société Alma restauration ;
" 1°) alors que, le délit de détournement de fonds publics, commis par un dépositaire de l'autorité publique au préjudice de la commune qu'il administre, n'est consommé que si les travaux engagés ne lui bénéficient pas directement ; qu'en l'espèce, les travaux litigieux, effectués sur un ensemble immobilier appartenant à la commune, bien que temporairement loué, profitaient directement à celle-ci puisqu'à l'issue du bail ils lui revenaient et apportaient une plus-value à cet ensemble immobilier ; qu'en outre, seuls certains travaux d'aménagement déterminés devaient contractuellement être réalisés par le locataire ; qu'ainsi, en se fondant de façon inopérante sur les modalités de décision et de paiement des travaux litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 2°) alors que, nul n'est responsable que de son fait personnel ; que le recel n'est répréhensible que si le prévenu a personnellement bénéficié du produit d'origine frauduleuse ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que la société Alma restauration avait bénéficié des travaux payés par la commune de Chassieu, puisque cette société avait profité des sommes ainsi économisées ; que, dès lors, Allessandrino
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ne pouvait personnellement être condamné pour recel " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Baraduc et Duhamel pour Alessandrino
Y...
, pris de la violation des articles 433-1 du code pénal, 1341 et 1348 du code civil, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alessandrino
Y...
coupable de corruption active et l'a condamné ;
" aux motifs que la volonté de Jack X..., maire de Chassieu, d'avantager Alessandrino
Y...
, et de désavantager dans les mêmes proportions la commune dont pourtant il a reçu mandat de défendre les intérêts, en acceptant de lui céder la moitié du terrain d'une superficie de 6 305 m ² au prix de 500 000 euros et de lui louer le reste, soit 5 551 m ², ayant perdu toute valeur marchande au regard du découpage défavorable pratiqué, au prix global de 50 000 euros à répartir sur quatorze années, trouve sa contrepartie dans les largesses consenties en sens inverse, par Alessandrino
Y...
qui, au cours du mois de juin 2003, a remis trois chèques d'un montant total de 15 000 euros à Jack X..., correspondant prétendument à un prêt dont l'existence n'a pu être établie ; que, pour faire croire à l'existence d'un véritable prêt, il est fait état de l'absence de caractère occulte de l'opération et du fait que la somme de 15 000 euros a été versée par la remise de trois chèques et non en numéraire ; que, toutefois le manque de prudence dans la réalisation d'opérations délictueuses n'est pas la preuve de l'innocence de leurs auteurs et ne saurait constituer une sorte de fait exonératoire de responsabilité ; que le remboursement par Jack X...n'est intervenu qu'après l'ouverture de l'enquête préliminaire et la révélation des agissements délictueux ; que les 15 000 euros versés par Alessandrino
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à Jack X...ne sont que la rémunération, convenue et négociée entre eux, versée par l'entrepreneur corrompant ainsi le maire pour que ce dernier amène le conseil municipal à adopter la délibération du 30 septembre 2003 dont l'économie favorisait outrageusement Alessandrino
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au détriment de la commune de Chassieu ; que c'est donc antérieurement à la délibération qui réalise la corruption qu'entre les deux prévenus s'est noué le pacte de corruption dont les chèques sont à la fois le signe et l'effet ;
" alors que, lorsqu'un délit est subordonné à l'existence ou à l'absence d'un contrat civil, celui-ci peut être prouvé selon les règles du code civil, dont les articles 1347 et 1348 disposent qu'en cas de commencement de preuve par écrit ou d'impossibilité morale de se préconstituer une preuve par écrit, la preuve par tous moyens est admissible ; qu'ainsi, c'est à tort que la cour d'appel a refusé de prendre en compte la photocopie des trois chèques d'un montant total de 15 000 euros, le document manuscrit conservé par Jack X...portant mention de l'existence du prêt, et la justification du remboursement de ladite somme, peu important sa date " ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Thomas-Raquin et Bénabent pour Jack X..., pris de la violation des articles 111-4, 121-3 et 441-1 du code pénal, 1134 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jack X...coupable d'usage de faux et l'a condamné ;
" aux motifs que l'argumentation développée dans les conclusions des prévenus
Y...
et X...selon laquelle le document incriminé aurait seulement valeur d'information pour la commune de Chassieu et ne constituerait pas un titre support d'un faux en écriture, ne résiste pas davantage à l'examen ; qu'en effet, il est constant que ce document a été établi et utilisé par Alessandrino
Y...
pour se conformer aux obligations détaillées du dernier bail, lequel conditionnait la gratuité des loyers au montant des investissements effectivement réalisés ; que le bail fixe la date du 30 juin 2001 pour que soit apportée la preuve des investissements à la charge du preneur (Alessandrino
Y...
) et il est bien évident que le non-respect de ses obligations par le preneur est de nature à entraîner des conséquences juridiques, à savoir la possibilité pour la commune de demander la résiliation du bail ; que la cour confirme donc la décision de culpabilité d'Alessandrino
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des chefs de faux et d'usage de faux puisque c'est suivant sa volonté que le document a été produit au notaire dans le cadre contractuel du bail ; que s'agissant de Jack X..., poursuivi pour usage de ce faux, il reconnaissait que c'était lui qui avait demandé à Alessandrino
Y...
de produire le document, en indiquant : « c'est moi qui ai sollicité ce document de
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qui ne l'avait toujours pas produit ; j'ai fait cette demande pour que soit en effet appliqué le bail de septembre 2000, car cet estimatif était prévu par ce bail " ; que cette déclaration démontre que le prévenu a reconnu que le document avait valeur contractuelle, et que, par conséquent, sa production pouvait avoir des conséquences juridiques ; que, du dossier de la procédure, il résulte :- qu'il était le maire en place au début de l'année 2002, à la date où ce document a été communiqué par la société Alma restauration,- que, selon les déclarations d'Alessandrino
Y...
, Jack X...savait que les 11 000 000 de francs TTC ne correspondaient pas aux travaux réalisés,- que par ailleurs, le bilan de la société Alma restauration avait été adressé à Jack X..., de sorte qu'il ne pouvait donc pas ignorer le montant réel des sommes immobilisées par la société Alma restauration au titre des travaux de réhabilitation (soit 422 265 euros),- que Jack X...a cependant conforté les conseilleurs municipaux dans l'idée que Alessandrino
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avait bien réalisé un financement à hauteur de 11 000 000 de francs, car c'est le chiffre qu'il a repris lors de la séance du conseil municipal du 30 septembre 2003 et c'est l'information qu'il a donné dans un tract diffusé à l'intention de la population de Chassieu ; qu'enfin, malgré les dénégations de Jack X...à l'audience de la cour, sa culpabilité ne fait pas le moindre doute si on veut bien se rappeler ses propos devant les enquêteurs : « j'avais conscience effectivement que le montant annoncé par Alessandrino
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ne correspondait pas aux investissements réellement engagés pour la restauration et l'amélioration du site » ; que l'enquête permet donc d'établir que Jack X...a eu connaissance du caractère mensonger du document qui lui a été adressé par Alessandrino
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, et qu'il a non seulement dissimulé la réalité au conseil municipal, mais qu'il a, en outre, accrédité le contenu de ce document ; que Jack X...a ainsi fait siens les intérêts de son ami
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(qu'il tutoie et avec lequel il entretient des liens d'amitié) contre les intérêts de la commune ;

" 1°) alors que, seuls les documents ayant pour objet ou pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques peuvent servir de support à une altération de la vérité ; que le document établi le 28 janvier 2002 par l'architecte d'Alessandrino
Y...
pour la société Alma restauration, décrivant les « travaux réalisés et le budget de l'opération » de rénovation, à le supposer mensonger, ne pouvait constituer un écrit susceptible d'entraîner des conséquences juridiques dès lors qu'aucune des clauses de l'avenant au bail du 15 septembre 2000, accordant la gratuité du montant de loyers pendant une durée de dix-sept ans, ne prévoyait que cette gratuité était soumise à la condition de réalisation de travaux dans un temps donné ; que ce document, dépourvu de valeur probatoire, n'était, en conséquence, pas susceptible de donner lieu à une altération frauduleuse de la vérité ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors que, l'élément intentionnel du délit d'usage de faux résulte de la conscience de l'agent de l'altération de la vérité dans un document susceptible d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques, ce qui exclut toute erreur, d'appréciation ou d'interprétation sur la réalité d'un fait ; que Jack X...faisait expressément valoir dans ses écritures qu'il n'avait eu aucune conscience ni aucune volonté d'user d'un document altérant la vérité dès lors qu'il avait légitimement été amené à penser que le montant de 11 millions de francs d'investissement mentionné dans le document établi le 28 janvier 2002 par l'architecte d'Alessandrino
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concernait le « budget global » de l'opération, à savoir les travaux déjà réalisés et ceux restant à réaliser s'agissant de la réhabilitation toute entière du site, nécessairement étalée dans le temps ; qu'en se bornant à relever que Jack X...aurait « eu connaissance » du caractère mensonger, à la date du 28 janvier 2002, du contenu du document adressé par Alessandrino
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sans rechercher si Jack X...n'avait pas entretenu la croyance légitime que le document argué de faux mentionnait le coût global des investissements passés et futurs, et si, en conséquence, il ne s'était pas mépris dans l'interprétation qu'il avait faite du document litigieux, la cour d'appel, qui s'est abstenue de caractériser l'élément intentionnel du délit a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
3°) alors que, et en tout état de cause, l'infraction de faux suppose la conscience chez le faussaire de ce que l'altération de la vérité était susceptible de porter préjudice à autrui ; qu'en l'espèce, le document établi le 28 janvier 2002, à le supposer mensonger, ne portait pas préjudice à la commune de Chassieu dès lors que celle-ci demeurait bénéficiaire des investissements réalisés ; que Jack X...faisait ainsi valoir qu'en produisant ce document lors de la séance du conseil municipal, il n'avait eu d'autre dessein que d'informer le conseil sur le projet entrepris, qui avait notamment pour but de moderniser la zone de travaux et d'attirer un plus grand nombre d'entreprises ; qu'en s'abstenant, dès lors, de caractériser la conscience qu'aurait eu Jack X...de ce que la fausseté des informations contenues dans le document litigieux pouvait porter préjudice à la commune, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Thomas-Raquin et Bénabent pour Jack X..., pris de la violation des articles 121-3 et 432-15 code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jack X...coupable de détournement de fonds publics et l'a condamné ;
" aux motifs qu'en plus de la gratuité des loyers qui n'étaient pas compensée par les travaux réalisés, l'enquête a permis de découvrir que la municipalité de Chassieu avait assumé le règlement d'un certain nombre de travaux au seul bénéfice d'Alessandrino
Y...
; qu'il est bien évident que ces travaux ne devaient pas être pris en charge par la mairie dans la mesure où, au contraire même, le loyer était modulé en fonction de leur prise en charge par le preneur ; que chacun des trois prévenus a donné son accord pour la prise en charge par la commune de ces travaux ; (….) que la commune de Chassieu a dû acquitter le règlement de sept factures pour un total de 187 198 euros hors taxes soit 223 983 euros TTC (1 468 517 francs) ; que deux de ces factures ont été émises sous le mandat de Jacques Z...(…) ; que cinq factures ont été émises sous le mandat de Jack X...: facture Girardot du 15 juillet 2001 : 63 547 83 francs TTC (pose de quatre portails), facture Chazal du 10 octobre 2001 : 187 443, 10 francs TTC (installation d'une clôture et de portails) – facture Perdrix du 25 novembre 2001 : 203 320 francs TTC (travaux d'électricité) – facture Lemaire du 15 mai 2002 : 49 411, 15 euros TTC (construction d'un petit bâtiment à usage de bureau) – facture Perdrix du 2 mai 2002 : 30 995, 93 euros TTC. (…) ; que la défense de Jack X...soutient à tort que celui-ci doit être relaxé en l'absence d'intention malveillante de sa parte et du fait qu'il s'agit d'opérations menées dans l'intérêt de la commune de Chassieu ; qu'en effet, le tribunal, par une motivation que la cour adopte expressément, a considéré à bon escient-que l'accord de prise en charge des factures par la commune se trouve en contradiction avec les termes du bail, ce que n'ignorait pas Jack X...qui, néanmoins et en toute connaissance de l'illégalité du procédé, a consenti à les faire supporter à la commune ;- que les agissements de Jack X..., en sa qualité de maire de la commune, sont de l'ordre des « petits arrangements entre amis » étant observé que l'affectation des fonds en question, qui profite au prévenu
Y...
au détriment des finances communales, en contradiction flagrante avec les termes d'un bail officiel, et à l'insu du conseil municipal, ne saurait être qualifié de conforme à l'intérêt général ; qu'au vu des éléments ci-dessus rappelés, la cour déclare Jacques Z...et Jack X...coupables du délit de détournement de fonds publics, (…) le second pour un montant de 149 666, 30 euros ;
" alors que le délit de détournement de fonds publics commis par un dépositaire de l'autorité publique au préjudice de la commune qu'il administre, matérialisé par le paiement, au moyen de deniers publics, de travaux entrepris sur un bien immobilier, ne peut être consommé que dans la mesure où ces travaux ne bénéficient pas à la personne publique ; qu'en l'espèce, les travaux litigieux ont été effectués sur un ensemble immobilier appartenant à la commune et temporairement loué, et lui profitaient donc directement puisqu'ils lui revenaient à l'issue du bail et apportaient une plus-value à cet ensemble, en sorte qu'ils présentaient un intérêt certain pour celle-ci ; qu'en décidant néanmoins que l'affectation des fonds aurait « profité au prévenu Alessandrino
Y...
au détriment des finances communales », la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Thomas-Raquin et Bénabent pour Jack X..., pris de la violation des articles 121-3 et 433-1 du code pénal, 388, 512 591 et 593 du code de procédure pénale, 1341, 1347 et 1348 du code civil, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jack X...coupable de corruption passive et l'a condamné ;
" aux motifs que l'implication du maire de Chassieu, Jack X..., est démontrée par l'ensemble des déclarations de témoins qui s'accordent pour dire que celui-ci a présenté et défendu le dossier d'Alessandrino
Y...
jusqu'à son acceptation par le conseil municipal le 30 septembre 2003 ; que pour ce faire, il fallait que l'offre du moins en apparence, paraisse conforme à l'estimation des domaines, d'où le recours au découpage qui pouvait laisser croire que 500 000 euros pour l'achat de la moitié du terrain se rapprochait de l'estimation des domaines (1 150 000 euros divisés par 2) (…) ; que la volonté de Jack X...de favoriser Alessandrino
Y...
réside dans le fait qu'il est opposé au principe de la demande d'une nouvelle estimation réalisée conformément aux conditions réelles de vente, sachant fort bien que le résultat d'une telle requête aurait conduit à un chiffrage rendant l'opération inaccessible pour Alessandrino
Y...
; qu'en conséquence, bien qu'il s'en défende, Jack X...est passé outre les conseils de son directeur des services, M. A...qui, lorsqu'il a eu connaissance des nouvelles conditions de vente, a immédiatement prévenu le maire de la nécessité de réclamer une nouvelle estimation, sous peine de problèmes ultérieurs pouvant entacher la vente ; que les enquêteurs de police, au terme de leur investigations, peuvent à juste titre conclure ainsi : « il a été parfaitement démontré que les conditions de vente de la parcelle BY 133 n'ont pas été négociées dans l'intérêt de la commune, par son représentant mais qu'au contraire, ce dernier avait défendu une offre volontairement minorée et tout mis en oeuvre pour dissimuler aux conseillers municipaux les anomalies qu'elle pouvait receler ; qu'en conséquence, Jack X...a permis le vote, par le conseil municipal de la ville de Chassieu, de la vente à Alessandrino
Y...
du tènement de l'avenue Montgolfier, opération conférant à ce dernier, un avantage chiffré à 517 500 euros, par rapport à un prix de vente négocié dans des conditions normales " ; qu'il est bien évident que cette volonté de Jack X...d'avantager Alessandrino
Y...
et de désavantager, dans les mêmes proportions, la commune dont, pourtant, il a reçu mandat de défendre les intérêts, trouve sa contrepartie dans les largesses consenties, en sens inverse, par Alessandrino
Y...
à son ami Jack X...; que le cadeau de 517 500 euros consenti par Jack X...au profit d'Alessandrino
Y...
ne constitue pas une erreur ou la marque de l'incompétence du maire de l'époque ; qu'il trouve son explication dans les avantages personnels retirés par Jack X...consécutivement aux largesses d'Alessandrino
Y...
à son égard ; que, si dans la prévention retenue contre Alessandrino
Y...
et Jack X...des chefs respectivement de corruption active et corruption passive, ne figure que la remise d'une somme de 15 000 euros, le dossier de la procédure révèle l'existence d'autres avantages consentis par l'entrepreneur au maire ; que c'est ainsi que, selon plusieurs témoignages recueillis, le couple X...avait « table ouverte » au restaurant « Le Montgolfier », ce fait étant attesté par la découverte d'éléments matériels retrouvés lors de perquisitions (notes-agendas) ; que les intéressés d'ailleurs ne contestaient pas réellement ces faits, Alessandrino
Y...
précisant même que la fréquence de ses invitations à déjeuner ou à dîner au restaurant adressés à Jack
X...
, était de une ou deux fois par mois ; qu'en deuxième lieu, Jack X..., entrepreneur en retraite, possèdait à Chassieu un bâtiment industriel grevé d'une lourde hypothèque, qu'il essayait de vendre ; que courant mai 2002, la SCI Monod, dont le gérant est Alessandrino
Y...
, a acheté ce bien au prix de 243 918 euros pour le revendre au mois de décembre 2003 ; qu'au-delà du questionnement que suscite une telle transaction au plan éthique (est-il sain que le maire d'une commune traite des affaires personnelles avec un industriel en négociation avec la municipalité ?) il convient de relever qu'au bilan de la SCI Monod, les comptes de clôture affichent un déficit de 70 000 euros ; que la cour ne peut que s'interroger sur le fait qu'un professionnel avisé comme l'est Alessandrino
Y...
et qui a fait la preuve, dans ses relations avec le maire de Chassieu, de ce qu'il ne surpaye pas les biens qu'il acquiert, puisse réaliser une moins valeur aussi importante, pour une opération banale et dans une période faste pour l'immobilier ; que s'agissant toujours de cette opération immobilière, qu'aucune explication satisfaisante n'est donnée au fait qu'Alessandrino
Y...
a accepté, au travers de la SCI Monod, de payer, en lieu et place de son vendeur, Jack X..., un arriéré d'impôts, d'un montant de 3 664, 57 euros au titre de la taxe foncière 2001 ; qu'enfin, les investigations entreprises au cours de l'enquête ont permis d'établir qu'Alessandrino
Y...
a, dans le courant du mois de juin 2003, remis trois chèques de 5 000 euros chacun à Jack X...; que Jack X...et Alessandrino
Y...
ont prétendu, tous deux, que l'émission de ces trois chèques correspondait à un prêt ; que cependant, ni l'un ni l'autre n'ont été en mesure de présenter aux enquêteurs et au magistrat instructeur le moindre contrat de prêt, la moindre reconnaissance de dette ou la moindre correspondance évoquant l'existence d'un tel « prêt » ; qu'ils n'ont pas été capables d'évoquer un taux d'intérêt qui aurait été discuté ou fixé ; qu'ils n'ont pas plus été capables de citer les échéances de remboursement précisément convenues autrement qu'en prétendant que le prêt était de « deux années » (…) ; que, pour faire croire à l'existence d'un véritable prêt et rejeter l'idée d'une gratification, la défense d'Alessandrino
Y...
et de Jack X...fait état de l'absence de caractère occulte de l'opération, du fait que la somme de 15 000 euros a été remise à Jack X...non pas en numéraire mais à l'aide de trois chèques bancaires ; qu'à ces explications simplistes il convient d'objecter que le manque de prudence dans la réalisation d'opérations délictueuses n'est pas la preuve de l'innocence de leurs auteurs et ne saurait constituer une sorte de fait exonératoire de culpabilité ; que le remboursement des 15 000 euros par Jack X...l'a été après l'ouverture de l'enquête préliminaire et la révélation de ses agissements délictueux et dès lors aucun argument en faveur du prévenu ne peut être tiré de ce remboursement qui manque, pour le moins de spontanéité ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a pu écrire, au terme de son analyse, que « les 15 000 euros versés par Alessandrino
Y...
à Jack X...ne sont que la rémunération convenue et négociée entre eux deux, versée par l'entrepreneur corrompant ainsi le maire, pour que ce dernier amène le conseil municipal à adopter la délibération du 30 septembre 2003 dont l'économie favorisait outrageusement Alessandrino
Y...
au détriment de la commune de Chassieu (…) ;

" 1°) alors que, les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis, à moins que le prévenu n'accepte expressément d'être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention ; qu'en l'espèce, après avoir rappelé que la prévention saisissant le tribunal du chef de corruption passive et active faisait uniquement état de la remise par Alessandrino
Y...
à Jack X...d'une somme de 15 000 euros, l'arrêt ajoute que, toutefois, le dossier de la procédure « révèle l'existence d'autres avantages » consentis par l'entrepreneur au maire, et expose ensuite de façon détaillée la teneur de ces prétendus avantages l'amenant à conclure à la culpabilité des deux prévenus ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il ne résulte aucunement de l'arrêt que Jack X...ait accepté d'être jugé sur des faits distinct de ceux résultant de la prévention, la cour d'appel, qui a excédé les limites de sa saisine, a méconnu les textes susvisés " ;
" 2°) alors que, l'absence d'écrit, de taux d'intérêt stipulé ou la prétendue « tardiveté » du remboursement ne peuvent suffire à écarter l'existence d'un prêt d'argent conclu entre les parties lorsqu'il est établi que celles-ci ont été, en raison du lien d'amitié les unissant, dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit ; qu'en de telles circonstances, la preuve du contrat de prêt peut en effet se faire par tous moyens ; qu'en écartant en l'espèce, l'existence d'un prêt consenti par Alessandrino
Y...
à Jack X...aux motifs inopérants qu'aucune reconnaissance de dette n'était produite par les prévenus, qu'aucun taux d'intérêt n'avait été fixé entre les parties et que le remboursement effectué par Jack X...de la somme de 15 000 euros qui lui avait été versée par Alessandrino
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sous forme de trois chèques bancaires aurait été « tardif », la cour d'appel a derechef violé les textes visés au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans excéder sa saisine et sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 000 euros la somme qu'Alessandrino
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et Jack X...devront payer chacun à la commune de Chassieu au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Slove conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-88043
Date de la décision : 02/12/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 13 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 déc. 2009, pourvoi n°08-88043


Composition du Tribunal
Président : M. Dulin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Thomas-Raquin et Bénabent, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.88043
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