LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu du 24 novembre 2005 et condamner Mme Martine X... en qualité d'héritière pure et simple de la succession de sa mère Bernarde X..., à payer diverses sommes à Mme Elyse Y..., épouse Z..., l'arrêt attaqué retient que par jugement définitif du 30 septembre 2004, le dit tribunal a accordé un délai de cinq mois à Mme Martine X... pour prendre parti sur l'acceptation ou la renonciation à la succession de sa mère et dit qu'à défaut d'avoir pris parti à l'issue de ce délai, elle serait déclarée héritière pure et simple ; qu'il n'est pas prétendu que l'intéressée ait pris parti ne serait-ce qu'en déclarant accepter la succession sous bénéfice d'inventaire ; que seule la nécessité de faire inventaire constitue une cause permettant à l'héritier de retarder sa décision à l'égard du créancier de la succession ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme Martine X... qui faisait valoir qu'elle avait renoncé à la succession de sa mère le 18 décembre 2007, soit en cours d'instance d'appel, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les première et troisième branches :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble, autrement composée ;
Condamne Mme Y..., épouse Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Martine X..., en qualité d'héritière pure et simple de la succession de sa mère Bernarde X..., à payer diverses sommes à Madame Elyse Y..., épouse B... ;
AUX MOTIFS QUE par jugement définitif du 30 novembre 2004, le Tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU a accordé un nouveau délai de cinq mois à Martine X... pour prendre parti sur l'acceptation ou la renonciation à la succession de sa mère et dit qu'à défaut d'avoir pris parti à l'issue de ce délai, elle serait déclarée héritière pure et simple ; qu'il n'est pas prétendu que Martine X... ait pris parti ne serait-ce qu'en déclarant accepter la succession sous bénéfice d'inventaire ; qu'ainsi que l'a justement souligné le tribunal, seule la nécessité de faire inventaire constitue une cause permettant à l'héritier de retarder sa décision à l'égard du créancier de la succession ; que le jugement déféré en ce qu'il a déclaré Martine X... héritière pure et simple doit être confirmé ; que le jugement du 30 septembre 2004 a déclaré les créances liquides et exigibles et n'a différé la condamnation de Martine X... qu'en raison du délai qu'il accordait à celle-ci pour prendre parti ; que dans ces conditions, l'appel de Martine X... n'est pas fondé ; qu'en effet, le jugement déféré qui tire les conséquences de ce qu'elle est déclarée héritière pure et simple et la condamne au paiement des sommes dont le jugement du 30 septembre 2004 a dit qu'elles étaient liquides dans leur montant, ne peut qu'être confirmé ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le jugement du Tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU du 30 septembre 2004 donnait « acte à Mme Martine X... de sa réserve à renoncer à la succession de M. Ernest X... » et accordait « un délai de cinq mois à Mme Martine X... aux fins qu'elle prenne parti en sa qualité d'héritière » ; qu'en affirmant que ce jugement avait accordé un nouveau délai de cinq mois à Madame X... pour prendre parti « sur l'acceptation ou la renonciation à la succession de sa mère », cependant que le jugement du 30 septembre 2004 ne statuait que sur l'acceptation de la succession du père de Madame X..., la cour d'appel a dénaturé cette décision et a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'héritier conserve, même après expiration des délais accordés par l'article 795 du Code civil et ceux accordés par le juge dans le cadre des dispositions de l'article 798 du même Code, le droit de renoncer à la succession de ses auteurs durant l'instance l'opposant à un créancier de la succession ; que dans ses conclusions d'appel (signifiées le 5 février 2008, p. 3 in fine), Madame Martine X... faisait valoir qu'elle avait renoncé à la succession de sa mère le 18 décembre 2007 ; qu'en condamnant Madame X..., en sa qualité d'héritière pure et simple de sa mère, à verser diverses sommes à Madame B..., sans répondre à ses conclusions faisant état d'une renonciation expresse de sa part à la succession de sa mère, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QU'en cas de poursuites dirigées contre lui, l'héritier peut demander au juge un nouveau délai pour prendre parti sur l'acceptation de la succession ; que pendant la prorogation de délai, aucune condamnation ne peut être obtenue contre l'héritier, l'instance étant suspendue ; que dans ses conclusions d'appel (signifiées le 5 février 2008, p. 4 à 7), Madame X... contestait à titre subsidiaire la recevabilité et le bien-fondé des demandes en paiement de Madame B..., rappelait notamment que celle-ci n'était pas fondée à réclamer le paiement de sommes dues par Monsieur Ernest X... et soutenait que le quantum des demandes n'était en toute hypothèse pas justifié ; qu'en écartant ces contestations au motif que le jugement du 30 septembre 2004, qui avait accordé à Madame X... pour prendre parti sur l'acceptation de la succession de sa mère, avait définitivement fixé le montant des créances de Madame B..., la cour d'appel a conféré à cette décision une autorité qu'elle n'avait pas, violant ainsi l'article 798 ancien du Code civil et l'article 1351 du même Code.