LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que André X... est décédé le 5 septembre 1998 en laissant pour lui succéder, sa veuve, Mme Y..., avec laquelle il était marié sous le régime de la séparation de biens avec adjonction d'une société d'acquêts, donataire de la plus large quotité disponible entre époux, leur fille, Mme Odile X..., épouse Z..., et une fille issue de sa première union, Mme Denise X..., épouse A... ; que Mme Y... a déclaré opter pour le quart des biens composant la succession en pleine propriété et les trois quarts en usufruit ; qu'il dépendait de la société d'acquêts un portefeuille de valeurs mobilières ;
Sur les premier, deuxième, troisième et cinquième moyens, pris en leurs diverses branches, ci-après annexés :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le quatrième moyen, pris en ses trois branches, ci-après annexé :
Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 12 février 2009) de l'avoir déboutée de sa demande tendant à la condamnation de Mme Y... à lui payer la somme de 183 494, 22 euros à titre de dommages-intérêts ;
Attendu qu'après avoir constaté que le portefeuille de valeurs mobilières était constitué d'obligations et que Mme Y..., veuve X..., qui ne les avait pas cédées, avait reçu le remboursement des titres arrivés à terme, la cour d'appel en a justement déduit que, bénéficiant d'un quasi-usufruit sur les capitaux perçus en paiement de ces créances, l'usufruitière pouvait en disposer à charge de les restituer à la fin de son usufruit ; que la décision critiquée est, par ces seuls motifs, légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Z... à payer à Mme Y..., veuve X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme Z...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé la valeur du bien immobilier à la somme de 300 000 euros,
AUX MOTIFS, EN SUBSTANCE, QUE l'expert judiciaire désigné par arrêt de cette cour du 6 janvier 2005 a déposé son rapport le 13 juin 2005 ; qu'il a fixé la valeur de l'immeuble situé à Eaubonne à la somme de 280 000 euros en retenant qu'il est localisé dans un quartier favorable à l'habitation sur un terrain bien configuré de 525 m ², est en très bon état apparent à l'exception de l'installation électrique, mais ne dispose que de deux chambres alors que pour ce type de bien, trois chambres constituent un minimum ; que Mme Denise X... épouse A... demande à la Cour de retenir cette estimation ; que Mme Y... propose une valeur de 295 000 euros alors que Mme Odile X... épouse Z... sollicite une valeur de 352 800 euros et produit aux débats une estimation d'une agence immobilière datée du 3 mai 2008 ; que l'estimation effectuée par l'agence du Belvédère de Saint Leu à partir des documents transmis par Mme Odile X... épouse Z... sans visite du bien, assortie d'ailleurs de réserves de la part du professionnel de l'immobilier, ne peut remettre en cause l'estimation de l'expert judiciaire qui s'est prononcé après une visite attentive des lieux ; que si le marché immobilier a continué de croître entre 2005 et 2008, la hausse des prix s'est toutefois ralentie au cours de l'année 2008 et la tendance actuelle est plutôt à la baisse avec une diminution sensible des transactions ; que s'agissant d'une maison certes bien située et en bon état mais qui présente un inconvénient majeur tenant au nombre limité de chambres, la Cour dispose des éléments suffisants pour fixer à la somme de 300 000 euros la valeur de cet immeuble ; que cette somme devra être retenue par le notaire pour établir l'acte de partage, sachant que le bien a été attribué à Mme Y... ;
ALORS QU'en vue de leur répartition, les biens sont estimés à la date la plus proche possible du partage ; qu'en rejetant la demande de Mme Z... tendant à une nouvelle désignation de M. B... en qualité d'expert pour réactualiser la valeur du bien à la date la plus proche du partage et en déterminant au contraire la valeur de l'immeuble en cause à la date de sa décision, la Cour d'appel a violé l'article 829 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, qui a dit n'y avoir lieu de statuer à nouveau sur la demande de conversion de l'usufruit en rente viagère, « la conversion de l'usufruit de Marie-Louise Y...- X... en rente viagère (ayant) été définitivement ordonnée par arrêt de cette cour du 6 janvier 2005 », d'avoir débouté Mme Odile X... épouse Z... de sa demande tendant au changement de notaire,
AUX MOTIFS QUE Mme Z... qui sollicite à nouveau le remplacement de la S. C. P. E... ET D... à raison des erreurs et irrégularités commises, ne caractérise pas le manquement à son devoir d'impartialité du notaire désigné ; et que les quelques rectifications à apporter à l'acte de partage ne sont pas de nature à établir qu'il n'accomplit pas sa mission avec diligence et compétence ;
ALORS QUE manque tant à son devoir d'impartialité qu'à son devoir de diligence le notaire qui persiste à mentionner la conversion de l'usufruit en capital, conformément aux exigences de l'usufruitière mais contrairement aux voeux des nus-propriétaires et nonobstant un arrêt définitif ayant ordonné la conversion de l'usufruit en rente viagère ; d'où il suit qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 2 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, ensemble l'article 237 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Z... de sa demande tendant à ce que la contribution sociale généralisée afférente à l'année 1997, la taxe d'habitation 1998, les taxes foncières 1998 et l'impôt sur le revenu 1997 pour un montant total de 9 744, 24 euros soient retranchés du passif de la société d'acquêts,
AUX MOTIFS QUE la nature même de ces dettes démontre qu'elles ne peuvent avoir été payées avant le décès d'André X... puisqu'il s'agit de dettes fiscales qui ne sont dues que fin septembre pour l'impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée, au plus tôt mi-octobre pour les taxes foncières et d'habitation ; qu'en conséquence, André X... ne pouvait avoir acquitté ces impôts et taxes sans avoir reçu la demande de l'administration fiscale ;
ALORS QUE faute d'avoir comparé le montant de l'impôt sur le revenu 1997 avec le montant des versements effectués, au titre des tiers provisionnels ou d'une éventuelle mensualisation de l'impôt, antérieurement au décès de André X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 870 et 873 du Code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Z... de sa demande tendant à la condamnation de Mme Y... à lui payer la somme de 183 494, 22 euros à titre de dommages-intérêts,
AUX MOTIFS QUE qu'il ressort du rapport d'expertise judiciaire que Mme Y... a perçu depuis le 5 septembre 1998 le remboursement du capital de titres arrivés à terme pour un montant, au moment du dépôt du rapport, de 602 646, 77 F. dont 3 / 8e appartiennent en nue-propriété aux héritières d'André X... ; qu'elle n'a pas procédé à des cessions volontaires de titres mais a omis de réemployer les obligations arrivées à terme ; que la comparaison entre le montant des avoirs mobiliers à l'ouverture de la succession (849 888, 90 euros) et le montant des avoirs mobiliers lors de l'établissement de l'acte de partage du 7 mars 2006 (839 588 euros) démontre que, contrairement aux affirmations de l'appelante, Mme Y... n'a pas fait disparaître les sommes reçues en remboursement des obligations arrivées à terme mais les a versées sur des comptes à vue de sorte que le capital a été préservé ; que dès lors que les remboursements de titres sont intervenus à leur échéance, sans manifestation d'une quelconque volonté de l'usufruitière, ils doivent être assimilés à des créances payées à un usufruitier, de sorte qu'à compter de ces remboursements, l'usufruitière a bénéficié d'un quasi-usufruit sur le capital et la somme due à la fin de l'usufruit est celle perçue par elle sans qu'il puisse lui être fait grief de ne pas avoir procédé au remploi des obligations arrivées à terme ;
ALORS QUE l'usufruitier, s'il dispose seul du pouvoir de gérer le bien, est tenu de se comporter en bon père de famille, avec prudence et diligence ; que, spécialement, l'usufruitier d'un portefeuille de valeurs mobilières, lesquelles ne sont pas consomptibles par le premier usage, est tenu d'en conserver la substance et de remplacer les titres remboursés ; d'où il suit qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 578 du Code civil ;
ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'il résulte du projet de partage établi par Maître D..., sur lequel la Cour d'appel s'est fondée, que le montant des avoirs mobiliers s'élevait à la somme de 677 139, 80 euros lors de l'établissement de l'acte de partage du 7 mars 2006 et, par suite, que le capital géré par Mme Y... a diminué de 172 749, 09 euros entre la date du décès de M. X... et le 7 mars 2006 ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a dénaturé le projet de partage, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;
ET QUE, PARTANT, la Cour d'appel a derechef violé l'article 578 du Code civil.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Z... de sa demande tendant à ce qu'il soit dit que Mme Y... devrait fournir au notaire, en vue de l'établissement d'un nouveau projet de partage, la photocopie recto-verso des 16 chèques mentionnés sur la pièce 4 et les relevés des comptes ouverts à la SOCIETE GENERALE sous le n° ...et Séquoia n° ...depuis la date de leur ouverture, ainsi que de sa demande subsidiaire tendant à la condamnation de Mme Y... à payer à Mme Z... la somme de 68 398, 76 euros, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, en réparation du préjudice résultant pour la seconde du défaut de communication imputable à la carence de la première,
AUX MOTIFS QU'à l'ouverture de la succession, la société d'acquêts comptait à son actif trois comptes ouverts dans les livres de la B. N. P., un compte à vue ...présentant un solde créditeur de 43 414, 54 euros, un compte titre de 212 020, 76 euros et un Codevi de 5 422, 07 euros ; qu'en mars 2006, le solde du compte à vue s'élevait à 3 866, 56 euros, le solde du compte titres à 82 404 euros et le solde du Codevi à 134, 07 euros ; que, cependant, la différence entre les soldes du compte à vue n° ...a été prise en compte dans le compte d'administration de la société d'acquêts et ajouté à l'actif de la société d'acquêts arrêté en mars 2006 ; que le remboursement des titres échus a été versé sur un compte à vue n° ... ouvert au nom de la succession crédité de 102 768, 40 euros ; que dès lors que les prélèvements effectués par Mme Y... sur les différents comptes et notamment sur ceux ouverts dans les livres de la B. N. P. n'ont pas eu pour conséquence de diminuer le montant total des avoirs, ce qui est le cas en l'espèce, à l'exception de la somme de 10 300 euros, Mme Odile X... épouse Z... ne peut exiger de l'usufruitière qu'elle justifie de l'utilisation des fonds et notamment des seize prélèvements effectués entre décembre 1998 et novembre 2000, s'agissant de sommes d'argent dont l'usufruitier ne peut faire usage sans les consommer, la seule obligation lui incombant étant alors de s'en servir à charge de les rendre à la fin de l'usufruit conformément à l'article 587 du Code civil ; que, quant aux comptes n° ...et Sequoia n° ...ouverts dans les livres de la SOCIETE GENERALE, ils ne figurent pas dans la succession car ils ont été ouverts par Mme Y... postérieurement au décès d'André X... ; que le fait qu'ils apparaissent sur les déclarations d'imposition sur la fortune déposées par cette dernière après 1998 ne signifie pas qu'ils font partie de la succession litigieuse ; que, s'agissant de comptes personnels de Mme Y..., les relevés y afférents n'ont pas à être produits dans le cadre de cette instance qui ne vise pas à établir la consistance du patrimoine de l'intimée ; qu'enfin, il n'est pas établi que l'actif de la société d'acquêts aurait diminué pendant l'exercice de l'usufruit, les comptes démontrant au contraire une valorisation essentiellement due à la hausse des prix des biens immobiliers ;
ALORS QU'il résulte du projet de partage établi par Maître D..., sur lequel la Cour d'appel s'est fondée, que le montant des avoirs mobiliers s'élevait à la somme de 677 139, 80 euros lors de l'établissement de l'acte de partage du 7 mars 2006 et, par suite, que le capital géré par Mme Y... a diminué de 172 749, 09 euros entre la date du décès de M. X... et le 7 mars 2006 ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel qui, par ailleurs, s'est fondée sur des motifs inopérants, a dénaturé le projet de partage, violant ainsi derechef l'article 1134 du Code civil ;
ET QUE, PARTANT, la Cour d'appel, à nouveau, a violé l'article 578 du Code civil.