LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 juin 2008) que, par acte du 13 avril 1978, la SCI Le Val Content, aux droits de laquelle vient la société Icade, a donné un logement à bail à M. et Mme X... ; que le bail a été résilié par ordonnance du 23 mai 1986 et l'expulsion des locataires ordonnée ; que le divorce de M. X... et de Mme Y... est intervenu en 1986 ; que le logement a été occupé à compter de 1997 ou 1998 par M. Joël X..., fils des preneurs ; que l'expulsion a été réalisée le 17 octobre 2003 ; que la société Icade a assigné Mme Y..., M. X... étant décédé, et M. Joël X... pour les voir solidairement condamnés à payer des sommes au titre de l'indemnité d'occupation due pour la période courant du 1er juillet 2002 au 17 octobre 2003, des dégradations constatées dans les lieux et des frais d'huissier ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la condamner solidairement avec M. Joël X... à payer à la société Icade une somme au titre des réparations locatives, alors, selon le moyen, que :
1°/ l'obligation de réparation mise à la charge du locataire par l'article 7 c de la loi du 6 juillet 1989 ne porte que sur les dégradations et pertes survenues pendant la durée du contrat de bail ; qu'en l'espèce, en confirmant la condamnation de Mme Y... à répondre des dégradations et pertes survenues dans les locaux aux motifs, adoptés du premier juge, qu'il ressort de l'état des lieux établi le 13 avril 1978, lors de l'arrivée des locataires, que l'appartement donné à bail était décrit comme étant en bon état, tandis que l'état des lieux établi après la libération des lieux en octobre 2003 mentionnait que l'appartement était en mauvais état, tout en constatant par ailleurs que le bail avait été résilié le 23 mai 1986 et que M. Joël X... reconnaissait avoir occupé les lieux depuis 1997 ou 1998, sans rechercher si les dégradations et pertes constatées en octobre 2003 n'étaient pas intervenues postérieurement à la résiliation du bail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
2°/ ce n'est que dans le cas où plusieurs fautes ont concouru à causer un même dommage que des personnes peuvent être condamnées comme co-auteurs à réparer ce dommage ; qu'en l'espèce, en adoptant les motifs du premier juge, lequel a condamné Mme Y..., solidairement avec M. Joël X..., au paiement d'une certaine somme au titre des réparations locatives, sans constater que les dégradations et pertes survenues dans le logement seraient dues à une faute par elle commise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du code civil ;
3°/ la solidarité ne se présume pas ; qu'il faut qu'elle soit expressément stipulée, sauf dans les cas où elle a lieu de plein droit en vertu d'une disposition de la loi ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Y... solidairement avec M. Joël X... à payer une certaine somme au titre des réparations locatives, sans préciser le fondement de cette solidarité, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1202 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que des dégradations avaient été commises dans le logement et retenu, à bon droit, que Mme Y..., cotitulaire du bail, devait en être tenue responsable au titre de l'article 7 (c) de la loi du 6 juillet 1989, la cour d'appel, qui n'avait ni à caractériser une faute ni à rechercher si les dégradations avaient été commises avant ou après l'expiration du bail, a, nonobstant l'impropriété des termes au titre desquels la condamnation de M. Joël X..., occupant sans droit ni titre, a également été prononcée, légalement justifié sa décision ;
Mais sur les premier et troisième moyens, réunis :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour condamner Mme Y..., solidairement avec M. Joël X... à payer à la société Icade une somme au titre de l'indemnité d'éviction et une autre au titre des frais d'huissier de justice, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que cette dernière était cotitulaire du bail résilié par ordonnance du 23 mai 1986 et est, à ce titre, redevable de l'indemnité d'occupation due à la propriétaire à raison de l'occupation des lieux sans droit ni titre par M. Joël X..., ainsi que des frais d'huissier ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité d'occupation et les frais exposés par la propriétaire pour récupérer les lieux ne se rattachent pas au contrat de bail qui a pris fin avec sa résiliation, la cour d'appel, qui n'a relevé ni que l'engagement solidaire de Mme Y... au titre du bail devait survivre à sa résiliation, ni, à sa charge, une faute dont il serait résulté une obligation de réparation in solidum, n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné Mme Y... solidairement à payer à la société Icade une somme de 8 316, 36 euros au titre de l'indemnité d'occupation et une somme de 844,22 euros au titre des frais d'huissier, l'arrêt rendu le 17 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Icade aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Icade à payer à Me Z... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Z..., avocat aux Conseils pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Y..., solidairement avec M. Joël X..., à verser à la société (cade patrimoine, aux droits de laquelle est venue la SA Icade, la somme de 8.316,36 € au titre d'arriérés d'indemnités d'occupation,
AUX MOTIFS, EXPRESSEMENT ADOPTES, DU PREMIER JUGE QUE, sur la co-titularité du bail, aux termes de l'article 1751 du Code civil, le droit au bail du local, qui sert effectivement à l'habitation des époux, est réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux ; qu'en cas de divorce, ce droit pourra être attribué à l'un des époux ; qu'il n'est pas contesté que M. Jean X... est décédé en juillet 1999 ; qu'en l'espèce, le contrat de bail, s'il indique le seul nom de M. X... Jean en tant que locataire, a été signé par M. X... et Mme X..., la signature de Mme X... étant identifiable car identique à celle figurant notamment sur son courrier du 24 juin 2005 versé aux débats ; qu'en outre, il résulte des pièces versées aux débats, et notamment l'ordonnance de référé du 23 mai 1986, que Mme X... était titulaire du bail ; qu'enfin, dans son courrier du 24 juin 2005, elle indiquait que son fils devait faire le changement de titulaire du bail, ce qui implique qu'elle savait être titulaire de ce bail et que, en l'absence de transfert de bail, elle demeurait titulaire du bail ; que Mme Y... pas plus que son fils n'ont signé avec le bailleur un transfert de bail, d'autant que, depuis 1986, le bail est résilié ; que, sur la demande en paiement d'une indemnité d'occupation, il n'est pas contesté que le bail du 13 avril 1978 a été résilié par décision du 23 mai 1986 ; que la procédure d'expulsion a été suspendue à plusieurs reprises en raison du paiement des arriérés ; que, lors des débats, M. Joël X... ne conteste pas avoir occupé les lieux depuis 1997 ou 1998 ; qu'il résulte des pièces du dossier et notamment du décompte que le solde des arriérés d'indemnités d'occupation s'élève à la somme de 8.316,36 € ; que Mme Y... étant titulaire du bail avant résiliation, il y a lieu de considérer qu'elle est redevable de cette somme ; que M. Joël X... reconnaît avoir occupé les lieux depuis 1997 ou 1998 sans être titulaire du bail ; qu'occupant sans droit ni titre, il est également redevable de l'indemnité d'occupation ; qu'en conséquence, Mme Y... est M. Joël X... seront condamnés solidairement au paiement de la somme de 8.316,36 € (jugement entrepris, pp. 3 et 4) ;
1) ALORS QUE l'engagement solidaire souscrit par des co-preneurs ne survit pas, sauf stipulation expresse contraire, à la résiliation du bail et que l'indemnité d'occupation est due en raison de la faute quasi-délictuelle commise par celui qui se maintient sans droit dans les lieux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a fait siens les motifs du premier juge – lequel, pour juger que Mme Y... était redevable de l'indemnité d'occupation, a retenu qu'elle était co-titulaire du bail du 13 avril 1978, tout en constatant que ce bail avait été résilié par décision du 23 mai 1986 – ne pouvait faire droit à la demande formulée à l'encontre de Mme Y... par la société icade, en allouant à celle-ci la somme qu'elle demandait à titre d'arriérés d'indemnités d'occupation pour la période du ler juillet 2002 au 17 octobre 2003, sans constater que le bail contenait une clause de survie d'un engagement solidaire des co-preneurs ou que Mme Y... avait occupé les lieux au cours de la période pour laquelle la société (cade réclamait le paiement d'indemnités d'occupation ; qu'en statuant comme elle l'a fait et par les motifs du premier juge qu'elle a adoptés, la cour d'appel a violé l'article 1202 du Code civil, ensemble l'article 1382 du même code ;
2) ALORS, au surplus, QUE la solidarité ne se présume pas ; qu'il faut qu'elle soit expressément stipulée, sauf dans les cas où elle a lieu de plein droit en vertu d'une disposition de la loi ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Y... solidairement avec M. Joël X... à payer une certaine somme au titre d'arriérés d'indemnités d'occupation, sans préciser le fondement de la solidarité dont a été assortie cette condamnation prononcée à l'encontre de Mme Y..., n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1202 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Y..., solidairement avec M. Joël X..., à verser à la société Icade patrimoine, aux droits de laquelle est venue la SA (cade, la somme de 3.464,44 € au titre des réparations locatives,
AUX MOTIFS, EXPRESSEMENT ADOPTES, DU PREMIER JUGE QUE Mme Y... était titulaire du bail avant sa résiliation par décision du 23 mai 1986 ; que M. Joël X... reconnaît avoir occupé les lieux depuis 1997 ou 1998 sans être titulaire du bail ; qu'il était occupant sans droit ni titre (jugement entrepris, p. 4) ; que, sur la demande au titre des réparations locatives, le locataire est, conformément à l'article 7 c de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, tenu de répondre des dégradations et pertes qui surviennent dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il na pas introduit dans le logement ; que l'existence de dégradations imputables au locataire s'apprécie par la comparaison des états des lieux dressés lors de l'arrivée et du départ du locataire, et en tenant compte le cas échéant de la date d'établissement de l'état des lieux de sortie au regard de celle de la libération effective des lieux par le locataire ; qu'il résulte des pièces du dossier que les occupants libéraient les lieux au plus tard le 17 octobre 2003 ; qu'un état des lieux de sortie, non contradictoire, était alors établi le 28 octobre 2003 ; qu'il ressort de l'état des lieux établi le 13 avril 1978, lors de l'arrivée des locataires, que l'appartement donné à bail était décrit comme étant en bon état ; qu'en revanche, l'état des lieux de sortie mentionne que l'appartement est globalement en mauvais état avec nécessité de remplacer toutes les portes et les dalles plafond ainsi que de débarrasser et désinfecter le logement ; que la demanderesse produit aux débats une évaluation des sommes dues pour un montant total de 3.464,44 €, correspondant aux travaux rendus nécessaires au regard du constat de sortie ; qu'il y a lieu de considérer que cette somme réclamée à Mme Y... et à M. Joël X... est justifiée ; qu'ils seront donc condamnés solidairement à son paiement (jugement entrepris, p. 5) ;
1) ALORS QUE l'obligation de réparation mise à la charge du locataire par l'article 7 c de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ne porte que sur les dégradations et pertes survenues pendant la durée du contrat de bail ; qu'en l'espèce, en confirmant la condamnation de Mme Y... à répondre des dégradations et pertes survenues dans les locaux aux motifs, adoptés du premier juge, qu'il ressort de l'état des lieux établi le 13 avril 1978, lors de l'arrivée des locataires, que l'appartement donné à bail était décrit comme étant en bon état, tandis que l'état des lieux établi après la libération des lieux en octobre 2003 mentionnait que l'appartement était en mauvais état, tout en constatant par ailleurs que le bail avait été résilié le 23 mai 1986 et que M. Joël X... reconnaissait avoir occupé les lieux depuis 1997 ou 1998, sans rechercher si les dégradations et pertes constatées en octobre 2003 n'étaient pas intervenues postérieurement à la résiliation du bail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
2) ALORS QUE ce n'est que dans le cas où plusieurs fautes ont concouru à causer un même dommage que des personnes peuvent être condamnées comme co-auteurs à réparer ce dommage ; qu'en l'espèce, en adoptant les motifs du premier juge, lequel a condamné Mme Y..., solidairement avec M. Joël X..., au paiement d'une certaine somme au titre des réparations locatives, sans constater que les dégradations et pertes survenues dans le logement seraient dues à une faute par elle commise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;
3) ALORS, au surplus, QUE la solidarité ne se présume pas ; qu'il faut qu'elle soit expressément stipulée, sauf dans les cas où elle a lieu de plein droit en vertu d'une disposition de la loi ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Y... solidairement avec M. Joël X... à payer une certaine somme au titre des réparations locatives, sans préciser le fondement de cette solidarité, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1202 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Y..., solidairement avec M. Joël X..., à verser à la société (cade patrimoine, aux droits de laquelle est venue la SA Icade, la somme de 844,22 € au titre de frais d'huissier,
AUX MOTIFS, EXPRESSEMENT ADOPTES, DU PREMIER JUGE QUE la demande de la société Icade patrimoine de condamnation solidaire de Mm Alberti et M. Joël X... à lui payer la somme de 844,22 € au titre des frais d'huissier n'est pas contestée ; qu'il y a donc lieu de condamner solidairement les défendeurs au paiement de cette somme (jugement entrepris, p. 5) ;
1) ALORS QU'en ne précisant pas le fondement juridique de la décision, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à celle-ci au regard de l'article 12 du Code de procédure civile ;
2) ALORS QUE la solidarité ne se présume pas ; qu'elle doit être expressément stipulée à moins qu'elle n'ait lieu de plein droit en vertu d'une disposition de la loi ; qu'en l'espèce, en condamnant Mme Y... solidairement avec M. Joël X... à payer à la société Icade une certaine somme au titre de frais d'huissier, sans préciser le fondement de la solidarité de la condamnation prononcée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1202 du Code civil.