LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté, d'une part, par motifs propres et adoptés, que le bailleur avait délivré congé à la société Le Tech par acte extrajudiciaire pour le 31 mars 2007, terme contractuel du bail de 23 mois consenti à cette société, et retenu, d'autre part, qu'il existait une contestation sérieuse quant aux manquements du bailleur à son obligation d'entretien et à l'existence et au montant des préjudices de jouissance invoqués par le preneur, la cour d'appel, abstraction faite d'un motif surabondant relatif à l'urgence, a légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu qu' ayant exactement retenu que l'engagement pour une somme indéterminée n'en est pas moins valable dès lors que cette somme est déterminable et que la caution avait connaissance de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée, et relevé que tel était le cas, la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne, représentée par son président en exercice, étant intervenue à l'acte de bail pour réitérer son engagement financier "en garantie d'une éventuelle indemnité en cas de non respect du délai de 23 mois", la cour d'appel a pu en déduire que l'obligation résultant clairement de cette stipulation n'était pas sérieusement contestable et que les tiers avaient pu légitimement penser que le représentant de la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne agissait en vertu des pouvoirs qui lui étaient conférés ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne à payer à M. X... et M. Y..., ès qualités, ensemble, la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blanc, avocat aux Conseils, pour la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société LF Tech à quitter les lieux qu'elle avait loués pour une durée de 23 mois et à verser à MM. X... et Y..., ès qualités de liquidateurs de la société Safam, une indemnité d'occupation de 5 000 euros par mois à compter du 1er avril 2007 jusqu'à la libération des lieux ;
Aux motifs que les parties étaient liées par l'acte du 9 septembre 2005 donnant à la société LF Tech un bail précaire et non renouvelable conformément aux dispositions de l'article L. 145-5 du code de commerce, moyennant un loyer annuel de 60 000 euros TTC pour une durée de 23 mois du 1er mai 2005 au 31 mars 2007 ; que ce bail dérogeait expressément au statut des baux commerciaux et prévoyait que « le preneur s'engage à quitter les lieux loués sans chercher à s'y maintenir sous quelque prétexte que ce soit. Si malgré tout il s'y maintenait, il serait considéré comme occupant sans droit ni titre et pourrait être expulsé en vertu d'une simple ordonnance de Monsieur le président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux loués, statuant comme en matière de référé » ; que ce contrat répondait à l'intention exacte des parties rappelée par l'ordonnance du juge commissaire du 25 avril 2005 quant à la volonté d'occupation précaire d'une partie des locaux pendant une durée maximum de 23 mois et à la garantie de la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne dans la recherche d'une solution foncière appropriée et par un engagement financier au titre de l'indemnité éventuellement due en cas de non respect du délai d'occupation ; que la société LF Tech avait reconnu que le bail précaire avait été convenu car il était prévu un déménagement et ne disconvenait pas s'être maintenue dans le lieux à l'expiration du bail ; qu'en l'état de ces stipulations parfaitement claires, les demandeurs étaient recevables à saisir le juge des référés pour faire cesser le trouble manifestement illicite causé par l'occupation sans droit ni titre des lieux depuis le 1er avril 2007 ; qu'il ne ressortait pas de la compétence du juge des référés de statuer sur l'existence et le montant des préjudices de jouissance invoqués par le preneur pendant la durée du bail, ni sur les manquements du bailleur à son obligation d'entretien, ni d'ordonner la compensation des sommes qui seraient dues au titre de dommage et intérêt ou en remboursement de travaux incombant au bailleur ; qu'en effet, aucune urgence n'était invoquée et ces demandes se heurtaient à une difficulté sérieuse qu'il appartenait au seul juge du fond de trancher ;
Alors que, 1°) le juge des référés peut modérer, par rapport au prix du loyer servant de référence, le montant de l'indemnité d'occupation compte tenu du non-respect par le bailleur de ses propres obligations ; qu'en exigeant pour ce faire que l'urgence soit établie, la cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile ;
Alors que, 2°) le juge des référés peut modérer, par rapport au prix du loyer servant de référence, le montant de l'indemnité d'occupation compte tenu du non-respect par le bailleur de ses propres obligations ; que l'articulation de griefs contre le bailleur ne se heurte pas nécessairement à une difficulté sérieuse s'opposant à leur prise en considération pour la fixation de l'indemnité d'occupation ; qu'en n'expliquant pas en quoi se présentait une difficulté quelconque et en retenant par principe qu'il n'appartenait pas au juge des référés de prendre en considération les griefs contre le bailleur, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 809 du code de procédure civile ;
Alors que, 3°) les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions sur les baux commerciaux pour un bail de deux ans au plus ; que cependant, si à l'expiration de cette durée le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions relatives aux baux commerciaux ; qu'en l'espèce, le preneur est resté et a été laissé en possession du bien après l'expiration du bail le 31 mars 2007, le bailleur n'ayant assigné en expulsion que le 2 octobre 2007 ; qu'en n'ayant pas recherché s'il ne résultait pas de cette circonstance que le preneur était devenu bénéficiaire d'un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de motifs (violation de l'article 455 du code de procédure civile).
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne à payer, solidairement avec la société LF Tech à compter du 1er avril 2007 et jusqu'à complète libération des lieux par cette dernière, une indemnité d'occupation mensuelle de 5000 euros à MM. X... et Y..., ès qualités de liquidateurs de la société Safam ;
Aux motifs que la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne était intervenue à l'acte de bail pour s'engager à la recherche d'une solution foncière appropriée dans les délais et financièrement en garantie en garantie d'une éventuelle indemnité en cas de non respect du délai de 23 mois ; qu'il ressortait clairement de cette stipulation qu'elle s'était portée caution de la société LF Tech en garantie de l'indemnité d'occupation qui serait due par cette dernière au cas de maintien dans les lieux après l'expiration du bail ; que son obligation n'était pas sérieusement contestable, celle-ci étant représentée à l'acte par son président en exercice, les tiers ayant pu en tout état de cause légitimement penser qu'il agissait en vertu des pouvoirs qui lui étaient conférés ; que par ailleurs l'engagement pour une somme indéterminée n'en était pas moins valable dès lors que cette somme était déterminable et que la caution avait la connaissance de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée, ce qui était le cas compte tenu de la qualité de la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne et de réitération de sa volonté expressément rappelée dans l'acte ;
Alors que, 1°) le caractère indéterminé de l'engagement de caution résultant de ce que le montant et la durée de la garantie de paiement de l'indemnité d'occupation n'étaient pas précisés constituait à tout le moins une contestation sérieuse qui faisait obstacle à ce que le juge des référés condamnât la chambre de commerce et d'industrie sur le fondement de celui-ci (violation de l'article 809 du code de procédure civile) ;
Alors que, 2°) la caution ne peut être engagée que si elle connaît la nature et l'étendue de son obligation ; qu'en retenant que c'était le cas en se fondant sur la qualité de la chambre de commerce et d'industrie et sur la réitération de sa volonté expressément rappelée dans l'acte, sans préciser en quoi pouvait être déterminable la garantie d'une indemnité due par le preneur, en cas de non respect par ce dernier de son obligation de quitter les lieux à l'échéance du bail, en l'absence de toute précision sur le montant de cette indemnité et surtout sur la durée pendant laquelle le maintien dans les lieux serait ainsi garanti, la cour d'appel a statué par des motifs inopérant (manque de base légale au regard de l'article 2292 du code civil).
Alors que 3°) il n'entrait pas dans les attributions de la chambre de commerce et d'industrie d'accorder une caution et qu'en tout état de cause, pour être valables, ses décisions devaient être autorisées par l'autorité de tutelle ; qu'en écartant la nullité de l'engagement en retenant que les tiers avaient légitimement pu penser que le président avait pu agir en vertu des pouvoirs qui lui étaient conférés, quand c'étaient les pouvoirs de la chambre qui étaient discutés, et non ceux du président agissant au nom de cette dernière, la cour d'appel a statué par un motif inopérant (manque de base légale au regard de l'article 11 de la loi du 9 avril 1898).