LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Met, sur sa demande, hors de cause la société Bouygues immobilier ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 621-40 et L. 621-41 du code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 5 mars 1999, la société Bouygues immobilier (la société Bouygues) a confié à la société Entreprise Vigna, devenue la société Nouvelle Vigna Côte-d'Azur (la société Vigna), la construction de logements et d'une maison de retraite ; que la société Vigna a sous-traité des lots à la société Intermétal ; que le 10 mars 2003, la société Intermétal a été mise en liquidation judiciaire, M. X... étant désigné liquidateur ; que la société Vigna, arguant de retards et de malfaçons, a déclaré une créance de 28 398, 75 euros qui a été contestée ; que le liquidateur a assigné la société Vigna et la société Bouygues en paiement de retenues de garantie et de retenues provisoires au titre de pénalités ; que la société Vigna a demandé reconventionnellement la fixation de sa créance et la compensation entre les créances connexes ;
Attendu que pour fixer la créance de la société Vigna au passif de la liquidation judiciaire de la société Intermétal à la somme de 23 398, 33 euros et ordonner la compensation entre les créances du liquidateur de la société Intermétal (5 143, 92 euros + 2 112, 20 euros) et celle de la société Vigna (23 398, 33 euros) et dire que seule reste due la somme de 16 142, 21 euros au bénéfice de la société Vigna, l'arrêt retient que la cour d'appel est compétente pour apprécier le bien fondé de la créance et pour la fixer et que la société Vigna justifie de sa créance qui doit être fixée au montant réclamé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que seule une instance en cours devant un juge du fond au jour du jugement d'ouverture enlève au juge-commissaire le pouvoir de décider de l'admission ou du rejet d'une créance, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement en ce qu'il a ordonné le sursis à statuer sur le bien fondé des retenues provisoires et leurs éventuelles compensations avec la déclaration de créance jusqu'à production de l'état définitif des créances par la partie la plus diligente, il a fixé la créance de la société Nouvelle Vigna 06 au passif de la liquidation judiciaire de la société Intermétal à la somme de 23 398, 33 euros, ordonné la compensation entre les créances de la société X...-Y..., mandataire-liquidateur de la société Intermétal (5 143, 92 euros + 2 112, 20 euros) et celle de la société Nouvelle Vigna 06 (23 398, 33 euros) et dit que seule reste due la somme de 16 142, 21 euros au bénéfice de la société Nouvelle Vigna 06, l'arrêt rendu le 14 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Nouvelle Vigna Côte-d'Azur aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Nouvelle Vigna Côte-d'Azur à payer à la société X...-Y..., ès qualités, la somme de 2 500 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société X...- Y..., ès qualités
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR fixé la créance de la société Nouvelle Vigna 06 au passif de la liquidation judiciaire de la société Intermétal à la somme de 23. 398, 33 euros et D'AVOIR ordonné la compensation entre les créances de la SELARL X...- Y..., mandataire liquidateur de la société Intermétal et celle de la société Nouvelle Vigna 06 et dit que seule restait due la somme de 16. 142, 21 euros au bénéfice de la société Nouvelle Vigna 06 ;
AUX MOTIFS QUE sur les retenues provisoires, le sursis à statuer a été ordonné par le jugement dans l'attente de l'état définitif des créances par la partie la plus diligente ; qu'il n'apparaît cependant pas nécessaire de confirmer ce point, le tribunal et la Cour étant compétents pour apprécier le bien fondé de la créance et pour la fixer ; que la société Nouvelle Vigna 06 justifie avoir effectué une déclaration de créance le 8 avril 2003 d'un montant de 28. 398, 75 euros, correspondant au solde établi en sa faveur et figurant dans un décompte général définitif du 20 novembre 2001 adressé à Intermétal ; qu'elle fait valoir d'une part, que le décompte général définitif intègre les retenues provisoires et d'autre part, que celles-ci correspondent à des retenues et pénalités devant être fixées à la somme de 23. 398, 33 euros ; que la SELARL X... / Y..., mandataire liquidateur de la société Intermétal conclut au sursis à statuer mais ne fait aucun commentaire sur l'ensemble des documents produits, ne contestant notamment ni les retards reprochés ni le bien fondé des factures interentreprises ; qu'il convient de constater que la société Nouvelle Vigna 06 justifie de sa créance, laquelle doit être fixée au montant réclamé ;
ALORS QUE seule une instance en cours devant un juge du fond au jour du jugement d'ouverture enlève au juge-commissaire le pouvoir de décider de l'admission ou du rejet de la créance déclarée ; qu'en accueillant la demande reconventionnelle de la société Nouvelle Vigna 06 tendant à la fixation de sa créance et formée après le jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Intermétal, ce dont il résultait que l'instance n'était pas en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective, la Cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les articles L 621-40, L 621-41 et L 621-104 du Code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR ordonné la compensation entre les créances de la SELARL X...- Y..., mandataire liquidateur de la société Intermétal et celle de la société Nouvelle Vigna 06 et dit que seule restait due la somme de 16. 142, 21 euros au bénéfice de la société Nouvelle Vigna 06 ;
AUX MOTIFS QU'il convient d'ordonner la compensation entre les créances de la SELARL X... / Y..., mandataire liquidateur de la société Intermétal (5. 143, 92 € + 2. 112, 20 €) et celle de la société Nouvelle Vigna 06 et de dire que seule reste due la somme de 16. 142, 21 € au bénéfice de la société Nouvelle Vigna 06 ;
ALORS, d'une part, QUE lorsque les conditions de la compensation légale ne sont pas réunies avant l'ouverture de la procédure collective, la compensation judiciaire ne peut être invoquée que s'il existe entre les dettes respectives un lien de connexité ; qu'en ordonnant la compensation entre d'une part, les créances détenues par la société Intermétal au titre de la libération des retenues de garantie auxquelles avait indûment procédé la société Nouvelle Vigna pour les travaux sous-traités de la maison de retraite de Mandelieu et de la « Colline des Arts » et d'autre part, la créance de la société Vigna fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Intermétal au titre de retards et malfaçons relatifs au seul chantier de la « Colline des arts », sans rechercher comme elle y était pourtant invitée, si les conditions de la compensation fondée sur la connexité des créances et de la dette de la société Intermétal étaient réunies, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L 621-24 alinéa 1er du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
ALORS, d'autre part, QU'en infirmant le jugement de première instance dont la société Intermétal demandait la confirmation sans s'expliquer sur le motif selon lequel la créance détenue par la société Intermétal à l'égard de la société Nouvelle Vigna 06 au titre de la libération de la retenue de garantie effectuée dans le cadre du chantier de la maison de retraite de Mandelieu ne pouvait « faire l'objet d'une quelconque compensation avec d'éventuelles malfaçons liées à une autre opération » (jugement p. 7, avant-dernier §), la Cour d'appel a violé l'article 954 alinéa 4 du Code de procédure civile.