LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Grenke location, qui avait loué à la société Diffusion thermique Ouest (la société DTO) un système téléphonique, a résilié le contrat pour non-paiement de loyers trimestriels et l'a assignée en paiement d'une indemnité et en restitution du matériel ;
Attendu que pour condamner la société DTO à payer à la société Grenke location la somme principale de 5 740,80 euros, outre les intérêts, et à restituer à ses frais le matériel loué par cette société, l'arrêt retient que ce n'est pas parce que cette société a encaissé les deux premiers chèques émis par la société Grenke location qu'elle avait renoncé de façon non équivoque au mode de paiement par prélèvement bancaire automatique prévu au contrat ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'article 4-2 des conditions générales du contrat ne prévoit pas que le règlement des loyers par prélèvement bancaire constituerait le seul mode de paiement admissible, mais se borne à mentionner que tout paiement effectué par un autre moyen que le prélèvement bancaire ferait l'objet d'une facturation complémentaire de 10 euros, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis de cette clause et a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar, autrement composée ;
Condamne la société Grenke location aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à la société Diffusion thermique Ouest la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour la société Diffusion thermique Ouest
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société DTO à payer à la société GRENKE LOCATION la somme principale de 5.740,80 €, outre les intérêts, et à restituer à ses frais le matériel loué par cette société ;
AUX MOTIFS QUE le contrat de location prévoit que les loyers sont payables d'avance le premier de chaque trimestre et que l'article 13-2 des conditions générales stipule que le bailleur peut procéder à une résiliation anticipée du contrat sans respecter de préavis lorsque le locataire est en retard de paiement d'un loyer trimestriel ; que l'autorisation de prélèvement donnée le 27 janvier 2006 par la société DTO au profit de la société GRENKE LOCATION sur son compte bancaire au CREDIT AGRICOLE a été signée par Monsieur Y..., personne non autorisée à faire fonctionner le compte et a été refusée par le CREDIT AGRICOLE, ce dont la société DTO a été avisée par lettre du 2 février 2006 ; que la société DTO n'est pas fondée à reprocher à la société GRENKE LOCATION de ne pas avoir vérifié la capacité de Monsieur Y... à signer l'autorisation de prélèvement, dès lors qu'il a luimême signé le contrat de location en qualité de «dirigeant du locataire», ce dont il résulte qu'il avait le pouvoir de représenter la société DTO aux yeux de son cocontractant et donc celui de signer l'autorisation de prélèvement ; qu'en réalité, la société DTO a refusé de régulariser l'autorisation de prélèvement comme le lui proposait le CREDIT AGRICOLE dans son courrier du 2 février 2006 en lui demandant de retourner l'autorisation avec une signature habilitée si elle souhaitait que les prélèvements émis par la société GRENKE LOCATION soient honorés ; que ce refus résulte clairement des mails adressés à Monsieur Y... par la direction de la société et du courrier de la société DTO à GRENKE LOCATION daté du 12 août 2006 ; que la société DTO ne justifie pas avoir informé la société GRENKE LOCATION de son souhait de modifier le mode de paiement (ce qui génère des frais supplémentaires à la charge du locataire, ainsi qu'il résulte de l'article 4-2 des conditions générales du contrat), mais qu'elle a, unilatéralement, décidé d'adresser des chèques en paiement ; que ces chèques ont d'ailleurs été établis avec retard, alors que les paiements devaient être effectués le premier jour du trimestre ; qu'ainsi, la société DTO indique elle-même que le premier trimestre de 2006 a été réglé par chèque du 17 mars 2006, débité le 27 mars 2006 et le deuxième trimestre 2006 par chèque du 10 avril 2006, débité le 21 avril 2006 ; que ce n'est pas parce que la société GRENKE LOCATION a encaissé ces deux chèques qu'elle a renoncé de façon non équivoque au mode de paiement prévu au contrat, unilatéralement décidé par la société DTO ; que cette absence de renonciation résulte clairement des termes d'un courrier que lui a adressé la société GRENKE LOCATION le 25 septembre 2006 ; que celle-ci n'était pas tenue d'accepter le paiement par chèque du 30 juin 2006 pour le loyer du 3ème trimestre 2006 ; que la résiliation prononcée par lettre recommandée avec avis de réception du 20 juillet 2006 pour rejet du prélèvement du 1er juillet 2006 est donc justifiée et ne revêt aucun caractère abusif ; qu'il n'est pas établi au vu de ces éléments qu'elle ait été mise en oeuvre de mauvaise foi ; que la société DTO prétend avoir régularisé la situation et invoque encore la mauvaise foi de la société GRENKE LOCATION qui ne lui aurait pas envoyé de «lettre de désistement», suite à ses courriers des 12 août et 10 septembre 2006 ; mais attendu que la société GRENKE LOCATION a confirmé, par lettre du 1er septembre 2006, la résiliation du contrat pour défaut de paiement du loyer du 3ème trimestre 2006 ; que par courrier du 25 septembre 2006, elle proposait à la société DTO, soit de régler la créance d'indemnité de résiliation, soit si elle souhaitait conserver l'usage du matériel et régulariser les échéances, de mettre en place un plan de paiement qui reprendrait les données du contrat sous réserve du paiement des arriérés à la date de mise en place du plan de paiement et de la mise en charge des frais occasionnés par la transmission du dossier de son avocat ; qu'il était demandé à la société DTO de répondre avant le 4 octobre 2006 et qu'à défaut la procédure serait reprise ; que la société DTO ne justifie pas avoir répondu à ce courrier de sorte que la résiliation étant acquise, la société GRENKE LOCATION n'était tenue à aucun «désistement» et a légitimement introduit la procédure le 27 décembre 2006 ; qu'en vertu de l'article 15 des conditions générales du contrat de location, en cas de résiliation anticipée, le bailleur a droit à une indemnité égale à tous les loyers à échoir jusqu'au terme initial du contrat et la créance est exigible au jour de la notification de la décision de résiliation ; que les paiements effectués postérieurement à cette date par le locataire ne peuvent priver d'effet la résiliation prononcée par le bailleur ; qu'il n'y a donc pas eu de «régularisation» comme le soutient la société DTO par le versement des trois chèques de 358,80 €, chacun postérieurement à la résiliation, les paiements partiels ne pouvant venir qu'en déduction de la créance d'indemnité de résiliation, et ayant été d'ailleurs pris en compte par le premier juge (arrêt attaqué, pp. 5-6-7) ;
ALORS, d'une part, QUE faute de stipulation contraire dans le contrat de location, le locataire peut régler sa dette de loyer par tout moyen de paiement à sa convenance ; qu'en affirmant que le mode de paiement des loyers prévu au contrat de location souscrit par la société DTO était celui du prélèvement automatique, de sorte que la société GRENKE LOCATION n'était pas tenue d'accepter le paiement par chèque du 30 juin 2006 pour le loyer du troisième trimestre 2006, en se fondant sur les stipulations de l'article 4-2 des conditions générales du contrat, qui ne prévoient pourtant nullement que le règlement des loyers par prélèvement bancaire constituerait le seul mode de paiement admissible, cette clause se bornant à mentionner que tout paiement effectué par un autre moyen que le prélèvement bancaire ferait l'objet d'une facturation complémentaire de 10 euros, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis de la clause litigieuse et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, d'autre part, QUE les contrats doivent être exécutés de bonne foi, de sorte que la résiliation du contrat aux torts du débiteur ne saurait être prononcée à la suite d'une manoeuvre déloyale du créancier ; qu'en estimant que la société GRENKE LOCATION était, en raison des modalités de règlement prévues par les parties, fondée à refuser le chèque remis par la société DTO en paiement du loyer du troisième trimestre 2006, tout en constatant que la société GRENKE LOCATION avait auparavant encaissé les deux chèques correspondant aux premier et deuxième trimestres 2006, d'où il résultait que la société GRENKE avait manifesté sa déloyauté en refusant subitement tout paiement par chèque, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil ;
ALORS, de troisième part, QU'en ajoutant que, par un courrier du 25 septembre 2006 la société GRENKE LOCATION avait informé la société DTO de ce qu'elle ne percevrait que des paiements consentis sous forme de prélèvement bancaire automatique, de sorte que la locataire aurait commis une faute contractuelle en procédant à un paiement par chèque au titre du troisième trimestre 2006, quand ce courrier du 25 septembre 2006 était postérieur au courrier de résiliation du 20 juillet 2006, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
ALORS, enfin, QUE le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la clause pénale insérée dans la convention, lorsque celle-ci est manifestement excessive ; qu'en refusant d'apprécier le caractère excessif de la clause pénale invoquée par la société GRENKE LOCATION, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1152 du Code civil.