LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er octobre 2009), que la société Mécanique industrie chimie (MIC) qui produisait des appareils de manutention manuelle dans son usine d'Argentan et avait à Rungis un service administratif et commercial où étaient affectés 237 salariés, est devenue en 1974 une filiale de la société Jungheinrich Finance Holding (JFH), qui contrôlait également la société Jungheinrich France, distribuant en France les produits du groupe de même nom, et qui était elle-même contrôlée par la société de droit allemand Jungheinrich AG, à travers la société Jungheinrich Beteilgungs ; qu'en octobre 2002, la société MIC a cédé à la société Jungheinrich France l'ensemble des services implantés à Rungis, le personnel qui y était attaché passant alors sous la direction du cessionnaire ; qu'un jugement rendu le 1er avril 2003 par le tribunal de grande instance de Créteil ayant retenu que les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail n'étaient pas remplies, la société MIC a proposé aux salariés rattachés au siège de Rungis d'accepter un changement volontaire d'employeur ; que les 61 salariés qui avaient refusé cette modification sont restés au service de la société MIC ; que celle-ci a continué à payer leurs salaires sans leur fournir de travail ; qu'en 2004, après avoir conclu un accord de méthode portant sur le plan de sauvegarde de l'emploi, la société MIC a licencié tout son personnel pour motif économique ; que des salariés licenciés ont contesté la rupture de leurs contrats et demandé paiement d'indemnités en dirigeant leurs demandes à la fois contre la société MIC, ensuite placée en liquidation judiciaire le 14 décembre 2005, et contre la société JFH, en tant que coemployeur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Jungheinrich finances holding fait grief à l'arrêt de juger qu'elle était, avec la société MIC, l'employeur conjoint des salariés licenciés et de la condamner à ce titre au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en vertu du principe dit de l'autonomie des personnes morales et sauf en cas de confusion de patrimoine ou de caractère fictif de la filiale, une société mère demeure une entité juridiquement distincte à l'encontre de laquelle les créanciers de sa filiale ne peuvent prétendre disposer d'un droit de créance ; qu'en conséquence, le simple fait, pour une société dite « holding », de posséder la presque totalité du capital de ses filiales, d'exercer sur celles-ci et leur activité un certain contrôle lié à sa qualité d'actionnaire majoritaire et de prendre parfois, toujours en sa qualité de principal actionnaire, des décisions qui, relatives à la stratégie du groupe dans son ensemble, sont néanmoins susceptibles de produire certaines conséquences sur les contrats de travail conclus par sa filiale, ne saurait être en soi de nature à lui conférer la qualité d'employeur des salariés de cette dernière ; qu'en décidant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble le principe dit de l'autonomie des personnes morales et l'article 1165 du code civil ;
2°/ que la reconnaissance d'une dualité d'employeurs suppose qu'un salarié accomplisse indistinctement son travail sous la direction commune et au profit de deux sociétés liées entre elles par une confusion d'intérêts, d'activités et de direction ; qu'en retenant la qualité d'employeurs conjoints des sociétés MIC et Jungheinrich Finances Holding sans avoir pourtant constaté que les salariés accomplissaient indistinctement leur travail sous la direction commune et au profit de ces deux sociétés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que la qualité d'employeurs conjoints se déduit des seuls rapports qu'entretiennent entre elles les deux entités dont il est soutenu qu'elles sont coemployeurs ; qu'en déduisant la qualité de coemployeurs des sociétés MIC et Jungheinrich Finances Holding du fait que la société MIC trouvait l'essentiel de ses commandes au sein du groupe et ce, selon une politique tarifaire arrêtée par le groupe, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur les rapports qu'entretenaient entre elles les sociétés MIC et Jungheinrich Finances Holding, a statué par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
4°/ qu'en affirmant que la direction du personnel de la société MIC était en réalité assurée par la société Jungheinrich Finances holding quand elle a seulement pu relever que la société MIC disposait du même directeur des ressources humaines que la société Jungheinrich France, elle-même filiale de la société Jungheinrich Finances Holding et non que cette dernière assurait effectivement elle-même cette direction, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
5°/ qu'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction n'existe que dans le cas d'une confusion de fait des sociétés, laquelle conduit les salariés à travailler indistinctement pour le compte de l'une ou l'autre sans qu'il soit possible de déterminer laquelle est l'employeur ; que la cour d'appel, qui a seulement constaté que les sociétés Jungheinrich Finances Holding et MIC avaient des dirigeants communs, que la société Jungheinrich Finances Holding avait mis en oeuvre une stratégie de groupe décidée par la société Jungheinrich Ag et qu'elle avait assumé la charge du plan social, n'a pas caractérisé une confusion de fait entre les deux entités permettant de retenir leur qualité d'employeurs conjoints ; qu'elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
6°/ qu'en affirmant que la société MIC était privée de tout pouvoir propre de décision quand les seules décisions ayant été imposées à la société MIC dont l'arrêt attaqué ait pu relever l'existence concernaient le groupe Jungheinrich dans son ensemble et relevaient ainsi d'une stratégie de groupe qui échappait nécessairement à la compétence à la société MIC, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
7°/ qu'en énonçant que Mme Y... dirigeait en fait la société MIC sans avoir pourtant constaté l'existence d'aucun acte matériel de direction dont elle aurait été l'auteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
8°/ qu'il appartient aux juges du fond de préciser les éléments de preuve sur lesquels ils fondent leurs constatations de fait ; qu'en affirmant que la société Jungheinrich Finances Holding avait assumé la charge du plan social, sans préciser sur quel élément de preuve elle s'est fondée pour retenir un tel fait, dont la réalité était formellement contestée par la société Jungheinrich Finances Holding, laquelle avait fait valoir que le plan social avait été financé, non par elle, mais par la société de droit allemand Jungheinrich Ag, son action s'étant pour sa part limitée à financer le suivi de certaines mesures d'accompagnement résultant du plan social et ce, à un moment où, à la seule exception des salariés protégés, les salariés de la société MIC avaient tous été licenciés, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
9°/ qu'à tout le moins, en affirmant que la société Jungheinrich Finances Holding avait assumé la charge du plan social quand elle a par ailleurs relevé que les fonds nécessaires à la mise en oeuvre de ce plan provenaient de la société Jungheinrich Ag, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi, une seconde fois, l'article 455 du code de procédure civile ;
10°/ qu'en affirmant que la société Jungheinrich Finances Holding se trouvait à l'origine des licenciements quand ces derniers résultaient en réalité uniquement de la décision de fermer définitivement la société MIC, laquelle avait été prise, non par la société Jungheinrich Finances Holding, ni même par le groupe Jungheinrich, mais par M. Francis Z... seul et ce, en sa qualité de directeur général de la société MIC, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui privent une fois encore sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu, sans se contredire, que l'activité économique de la société MIC était entièrement sous la dépendance du groupe Jungheinrich, qui absorbait 80 % de sa production et fixait les prix, que la société JFH détenait la quasi-totalité de son capital, le reste étant détenu par le dirigeant de la société holding, qu'il existait une gestion commune du personnel des sociétés MIC et Jungheinrich France, sous l'autorité de la société JFH, que celle-ci dictait à la société MIC ses choix stratégiques, notamment la décision de transférer l'activité de Rungis à la société Jungheinrich France, que la société JFH intervenait de manière constante dans les décisions concernant la gestion financière et sociale de la cessation d'activité de la société MIC et le licenciement de son personnel, et qu'elle assurait ainsi la direction opérationnelle et la gestion administrative de sa filiale, qui ne disposait d'aucune autonomie ; qu'elle a pu en déduire qu'il existait entre la société JFH et la société MIC une confusion d'intérêts, d'activités et de direction et qu'en conséquence la société JFH avait la qualité de coemployeur à l'égard du personnel de la société MIC ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Jungheinrich Finances Holding fait encore grief à l'arrêt de la condamner au paiement de dommages-intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que les lettres de licenciement faisaient état tant de la fermeture du site de Rungis que de celui du site d'Argentan, et énonçaient que le licenciement était fondé sur la fermeture totale et définitive de l'entreprise et la suppression de l'ensemble des postes de travail en résultant ; qu'en affirmant que le motif du licenciement était la fermeture du seul site de Rungis, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des lettres de licenciement et a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que le juge prud'homal ne peut se prononcer sur la cause de la cessation d'activité de l'employeur, ni sur la légitimité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a apprécié le caractère réel et sérieux des licenciements au regard de la légitimité des décisions ayant conduit la société MIC à cesser toute activité, a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
3°/ que, sauf faute ou légèreté blâmable de l'employeur, la cessation d'activité d'une entreprise constitue en soi une cause économique de licenciement ; qu'en déclarant les licenciements sans cause réelle et sérieuse quand elle avait constaté la réalité de la cessation totale d'activité de la société MIC sans pour autant relever que l'employeur avait commis une faute ou avait fait preuve de légèreté blâmable, la cour d'appel a derechef violé l'article 1233-3 du code du travail ;
Mais attendu que lorsque le salarié a pour coemployeurs des entités faisant partie d'un même groupe, la cessation d'activité de l'une d'elles ne peut constituer une cause économique de licenciement qu'à la condition d'être justifiée par des difficultés économiques, par une mutation technologique ou par la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe dont elles relèvent ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la cessation d'activité de la société MIC ne résultait que de choix stratégiques décidés au niveau du groupe, sans que des difficultés économiques les justifient, au niveau du secteur d'activité du groupe, en a exactement déduit que les licenciements ne reposaient pas sur une raison économique ; que par ce motif de pur droit, substitué aux motifs critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Jungheinrich Finances Holding aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. A..., ès qualités, la somme de 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Jungheinrich Finances Holding
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING était, conjointement avec la société MIC, l'employeur de Mesdames Sylvie B..., Marie Christine C..., Christine D..., Pascale E..., P..., Q..., Madame Annick F... et de Messieurs Loïc G..., Carl H..., R..., Pascal I..., Nicolas J..., Frédéric K..., Stéphane Z..., Jean-Paul L..., Luc M..., Pascal N..., Pascal O..., de l'AVOIR déclarée co-débitrice à leur égard, in solidum avec la société MIC, de différentes sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'AVOIR dès lors condamnée à leur payer ces sommes, outre une indemnité de 200 € chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR dit que la garantie due par l'AGS serait subsidiaire par rapport à son obligation ;
AUX MOTIFS QUE que les pièces versées aux débats démontrent que le groupe JUNGHEINRICH en 1974 et depuis le 30 novembre 2001 est une filiale à 99, 99 % de la S. A. S. JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING qui est également détentrice d'une part importante du capital de la S. A. S. JUNGHEINRICH FRANCE laquelle commercialise divers produits du groupe JUNGHEINRICH. La S. A. S. JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING est détenue par la société de droit allemand JUNGHEINRICHBETEILIGUNGS Gmbh, elle-même détenue par JUNGHEINRICH AG, dont le siège social est à HAMBOURG ; qu'il est ainsi établi que sur le plan capitalistique, seules 5 actions de la S. A. MIC sur un total de 4. 500. 000, ne sont pas détenues par la S. A. S. JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING et qu'une de ces 5 actions est possédée, es qualités, par le président de la S. A. S JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING, ce qui lui permet de siéger au conseil d'administration de la S. A. MIC ; que sur le plan industriel, la S. A. MIC n'avait pas de clientèle propre, son activité dépendant des commandes confiées par le groupe, que 90 % de sa production était revendue aux autres unités du groupe, 80 % de la valeur de ses ventes étant réalisé sur le matériel produit par les autres unités du groupe, et qu'elle était sous l'emprise tarifaire du groupe aussi bien pour les prix d'achat de sa production que pour les prix de vente des produits du groupe ; sur le plan de la gestion des ressources humaines, le même responsable dirigeait les personnels de la S. A. MIC et de la S. A. S. JUNGHEINRICH FRANCE, toutes deux filiales de la S A. S. JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING, et se trouvait sous l'autorité de cette dernière, instrument de l'actionnaire final pour administrer le groupe en France ; que les options stratégiques prises par la S. A. MIC ont été dictées par l'actionnaire final via la S. A. S. JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING, cela étant particulièrement vrai pour la décision cruciale de céder son activité administrative et commerciale à sa société soeur, la S. A. S. JUNGHEINRICH FRANCE, décision qui s'est imposée à elle en vertu d'un choix mondial pris par l'actionnaire final, ce qui a eu un impact direct sur le contrat de travail des salariés ; que la mise en oeuvre de cette emprise s'est d'ailleurs révélée dans l'affectation des dirigeants des diverses entités du groupe, dont il résulte que la S. A. MIC était privée de tout pouvoir propre de décision, le cas de Madame Y... étant particulièrement significatif puisqu'elle était présidente de la S. A. S. JUNGHBINRICH FINANCES HOLDING, directrice générale de la S A. S. JUNGHEINRICH FRANCE, administratrice de la S. A. MIC et détachée auprès de cette société pour superviser les aspects financiers, informatiques, de personnel et de contrôle de gestion soit, en fait, pour diriger l'entreprise au nom et pour le compte du groupe JUNGHEINRICH ; que la S. A. S. JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING est plus précisément intervenue de manière constante dans la gestion financière et sociale de la cessation d'activité et des licenciements du personnel de la S. A. MIC ; que c'est ainsi notamment qu'elle a assumé la charge du plan de sauvegarde de l'emploi, les fonds à cette fin en provenance de JUNGHEINRICH AG étant passés par elle, la preuve du contraire n'étant pas rapportée pour la quasi intégralité de la somme ; qu'elle a également décidé, le 30 juin 2005, et entièrement financé, l'assistance de la société EIM pour coordonner les plans d'action de ses filiales dans le cadre des licenciements et de la vente du patrimoine ; que face à ces réalités, la S. A. S, JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING ne peut utilement opposer la façade juridique d'une société cantonnée dans son rôle de holding en faisant valoir qu'elle n'a signé aucun contrat de travail, rémunéré aucun salarié, donné aucune directive, qu'elle n'exerçait pas la même activité que sa filiale, avait une localisation différente, tous éléments qui ne constituent qu'une apparence démentie par la réalité de la gestion quotidienne du " groupe " ; que dans le contexte ainsi décrit, la S. A. S, JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING assurait la direction opérationnelle et la gestion financière et administrative d'une société MIC qui était pour sa part dépourvue de réelle indépendance, emportant pour les salariés de cette dernière un lien de subordination à son égard puisque l'exécution et la pérennité des contrats de travail dépendaient directement de ses décisions ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en vertu du principe dit de l'autonomie des personnes morales et sauf en cas de confusion de patrimoine ou de caractère fictif de la filiale, une société mère demeure une entité juridiquement distincte à l'encontre de laquelle les créanciers de sa filiale ne peuvent prétendre disposer d'un droit de créance ; qu'en conséquence, le simple fait, pour une société dite « holding », de posséder la presque totalité du capital de ses filiales, d'exercer sur celles-ci et leur activité un certain contrôle lié à sa qualité d'actionnaire majoritaire et de prendre parfois, toujours en sa qualité de principal actionnaire, des décisions qui, relatives à la stratégie du groupe dans son ensemble, sont néanmoins susceptibles de produire certaines conséquences sur les contrats de travail conclus par sa filiale, ne saurait être en soi de nature à lui conférer la qualité d'employeur des salariés de cette dernière ; qu'en décidant l'inverse, la Cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du Code du travail, ensemble le principe dit de l'autonomie des personnes morales et l'article 1165 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la reconnaissance d'une dualité d'employeurs suppose qu'un salarié accomplisse indistinctement son travail sous la direction commune et au profit de deux sociétés liées entre elles par une confusion d'intérêts, d'activités et de direction ; qu'en retenant la qualité d'employeurs conjoints des sociétés MIC et JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING sans avoir pourtant constaté que les salariés accomplissaient indistinctement leur travail sous la direction commune et au profit de ces deux sociétés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE la qualité d'employeurs conjoints se déduit des seuls rapports qu'entretiennent entre elles les deux entités dont il est soutenu qu'elles sont coemployeurs ; qu'en déduisant la qualité de co-employeurs des sociétés MIC et JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING du fait que la société MIC trouvait l'essentiel de ses commandes au sein du groupe et ce, selon une politique tarifaire arrêtée par le groupe, la Cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur les rapports qu'entretenaient entre elles les sociétés MIC et JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING, a statué par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QU'en affirmant que la direction du personnel de la société MIC était en réalité assurée par la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING quand elle a seulement pu relever que la société MIC disposait du même directeur des ressources humaines que la société JUNGHEINRICH France, elle-même filiale de la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING et non que cette dernière assurait effectivement elle-même cette direction, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, DE CINQUIEME PART, QU'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction n'existe que dans le cas d'une confusion de fait des sociétés, laquelle conduit les salariés à travailler indistinctement pour le compte de l'une ou l'autre sans qu'il soit possible de déterminer laquelle est l'employeur ; que la Cour d'appel, qui a seulement constaté que les sociétés JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING et MIC avaient des dirigeants communs, que la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING avait mis en oeuvre une stratégie de groupe décidée par la société JUNGHEINRICH AG et qu'elle avait assumé la charge du plan social, n'a pas caractérisé une confusion de fait entre les deux entités permettant de retenir leur qualité d'employeurs conjoints ; qu'elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, DE SIXIEME PART, QU'en affirmant que la société MIC était privée de tout pouvoir propre de décision quand les seules décisions ayant été imposées à la société MIC dont l'arrêt attaqué ait pu relever l'existence concernaient le groupe JUNGHEINRICH dans son ensemble et relevaient ainsi d'une stratégie de groupe qui échappait nécessairement à la compétence à la société MIC, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, DE SEPTIEME PART, QU'en énonçant que Madame Y... dirigeait en fait la société MIC sans avoir pourtant constaté l'existence d'aucun acte matériel de direction dont elle aurait été l'auteur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS, DE HUITIEME PART, QU'il appartient aux juges du fond de préciser les éléments de preuve sur lesquels ils fondent leurs constatations de fait ; qu'en affirmant que la société JUNGHEINRINCH FINANCES HOLDING avait assumé la charge du plan social, sans préciser sur quel élément de preuve elle s'est fondée pour retenir un tel fait, dont la réalité était formellement contestée par la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING, laquelle avait fait valoir que le plan social avait été financé, non par elle, mais par la société de droit allemand JUNGHEINRICH AG, son action s'étant pour sa part limitée à financer le suivi de certaines mesures d'accompagnement résultant du plan social et ce, à un moment où, à la seule exception des salariés protégés, les salariés de la société MIC avaient tous été licenciés, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE NEUVIEME PART, QU'à tout le moins, en affirmant que la société JUNGHEINRINCH FINANCES HOLDING avait assumé la charge du plan social quand elle a par ailleurs relevé que les fonds nécessaires à la mise en oeuvre de ce plan provenaient de la société JUNGHEINRICH AG, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi, une seconde fois, l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE DIXIEME PART ET ENFIN, QU'en affirmant que la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING se trouvait à l'origine des licenciements quand ces derniers résultaient en réalité uniquement de la décision de fermer définitivement la société MIC, laquelle avait été prise, non par la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING, ni même par le groupe JUNGHEINRICH, mais par M. Francis Z... seul et ce, en sa qualité de directeur général de la société MIC, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants qui privent une fois encore sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société JUNGHEINRICH FINANCES HOLDING était, conjointement avec la société MIC, l'employeur de Mesdames Sylvie B..., Marie Christine C..., Christine D..., Pascale E..., P..., Q..., Madame Annick F... et de Messieurs Loïc G..., Carl H..., R..., Pascal I..., Nicolas J..., Frédéric K..., Stéphane Z..., Jean-Paul L..., Luc M..., Pascal N..., Pascal O..., de l'AVOIR déclarée co-débitrice à leur égard, in solidum avec la société MIC, de différentes sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'AVOIR dès lors condamnée à leur payer ces sommes, outre une indemnité de 200 € chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR dit que la garantie due par l'AGS serait subsidiaire par rapport à son obligation ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de la lettre de licenciement adressée aux salariés, le licenciement est justifié par le fait que l'unité de production de RUNGIS (services administratifs et commerciaux) à laquelle ils sont affectés est dépourvue de toute activité depuis le premier novembre 2002, date d'entrée en application de l'accord de cession entre la S. A. MIC et la S. A. S. JUNGHEINRICH France ; que cette inactivité résulte de deux décisions prises par le groupe JUNGHEINRICH, d'une part celle d'appliquer dans ses filiales le principe " une marque, un réseau ", ce qui était parfaitement légitime mais ne répondait pas à une nécessité économique au sens du code du travail et constituait un choix stratégique librement assumé, indépendant de la situation de la S. A. MIC puisque s'inscrivant dans un plan global appliqué dans le monde entier, d'autre part celle de conserver au sein de la S. A. MIC les salariés ayant refusé le transfert de leur contrat de travail à sa société soeur, la S. A. S. JUNGHEINRICH FRANCE, tout en vidant ce contrat de tout contenu ; que dans ces conditions, pour les salariés du site de RUNGIS, dont le sort doit être considère de manière dissociée compte tenu de la particularité de leur situation résultant des options prises par l'employeur, le licenciement ne procède pas directement d'un motif économique susceptible de justifier cette mesure mais de décisions de gestion non contraintes ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les lettres de licenciement faisaient état tant de la fermeture du site de Rungis que de celui du site d'Argentan, et énonçaient que le licenciement était fondé sur la fermeture totale et définitive de l'entreprise et la suppression de l'ensemble des postes de travail en résultant ; qu'en affirmant que le motif du licenciement était la fermeture du seul site de Rungis, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des lettres de licenciement et a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge prud'homal ne peut se prononcer sur la cause de la cessation d'activité de l'employeur, ni sur la légitimité ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel, qui a apprécié le caractère réel et sérieux des licenciements au regard de la légitimité des décisions ayant conduit la société MIC à cesser toute activité, a violé l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
ALORS, EN OUTRE, QUE sauf faute ou légèreté blâmable de l'employeur, la cessation d'activité d'une entreprise constitue en soi une cause économique de licenciement ; qu'en déclarant les licenciements sans cause réelle et sérieuse quand elle avait constaté la réalité de la cessation totale d'activité de la société MIC sans pour autant relever que l'employeur avait commis une faute ou avait fait preuve de légèreté blâmable, la Cour d'appel a derechef violé l'article 1233-3 du Code du travail.