LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré et les productions, qu'après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la société West-Air.fr (la société), les 9 janvier et 27 février 2004, M. X..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de cette dernière, a assigné la société West air Sweden, aux fins d'annulation de paiements intervenus, au cours de la période suspecte, en exécution d'un contrat de location d'aéronef ; que la société West air Sweden, créancière au titre de la poursuite du contrat durant la période d'observation, lui en a réclamé le paiement par voie de compensation légale ; que le tribunal a accueilli la demande du liquidateur et ordonné la compensation des créances ; que M. X..., ès qualités, a relevé appel limité à la disposition de la décision accordant le bénéfice de la compensation à la société West air Sweden, tandis que cette dernière a relevé appel général ; que la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il a condamné la société West air Sweden à payer la somme de 380 087 euros et l'a réformé pour le surplus ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société West air Sweden fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande de compensation, alors, selon le moyen, que, comme le soutenait la société West air Sweden dans ses conclusions d'appel, dans la lettre adressée par son président à West-air.Fr, n'était accepté l'abandon de créance correspondant au montant des paiements décalés que dans la limite du plafond fixé à 100 000 euros pour le "montant cumulé de ces décalages" ; qu'en considérant néanmoins pour infirmer le jugement ayant admis la compensation à hauteur de 184 841 euros, à raison du défaut de paiement des factures correspondant à la période d'observation dont le règlement n'avait pas été effectué, que l'abandon de créance consent concernait l'intégralité de cette somme et non au maximum le montant de 100 000 euros, la cour d'appel a dénaturé cette lettre, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que, pour rejeter la demande de compensation légale, la cour d'appel ne s'est pas fondée sur la limitation à la somme de 100 000 euros du montant cumulé des paiements décalés, accepté par le président de la société West air Sweden dans la lettre arguée de dénaturation ; que le moyen manque en fait ;
Mais, sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande de compensation légale de la société West air Sweden, l'arrêt retient que celle-ci qui ne soutient pas que la trésorerie de la société aurait permis le règlement de ses factures émises au cours de la période d'observation, ne peut en l'état de l'extinction de l'obligation qu'elle invoque, par l'effet de la remise volontaire de dette qu'elle a expressément consentie à la société, opposer une quelconque compensation ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'aux termes de ses conclusions, la société west air Sweden soutenait que la société n'avait pas eu à faire usage du décalage de trésorerie autorisé, celui-ci n'ayant pas été rendu nécessaire en raison de la situation de sa trésorerie, le paiement de la somme en cause ayant été expressément autorisé par le mandataire du redressement judiciaire et que le défaut de paiement n'avait été imputable qu'à une erreur dans l'exécution du règlement, la cour d'appel a dénaturé ces conclusions et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il réforme le jugement rendu le 25 juin 2002 par le tribunal de commerce de Salon-de-Provence et déboute la société de droit suédois West air Sweden de sa demande de compensation, l'arrêt rendu le 22 décembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour la société West Air Sweden
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir débouté la société WEST AIR SWEDEN de sa demande de compensation,
AUX MOTIFS QUE la Société WEST AIR SWEDEN oppose à Monsieur Eric X... ès qualités la compensation avec la créance d'un montant de 184.848 euros qu'elle détient elle-même à l'encontre de la S.A. WEST AIR FR. au titre de la poursuite du contrat de location pendant la période d'observation ; que la compensation légale qui suppose l'existence de dettes également certaines, liquides et exigibles, s'opère de plein droit à concurrence de la plus faible à l'instant où la seconde est venue à échéance ; qu'en l'espèce, si Monsieur Eric X... ès qualités soutient à tort que la créance résultant de l'obligation pour un tiers de rembourser le montant de paiements annulés en application de l'article L. 621-108 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, ne peut être compensée avec celle détenue par ce tiers à l'encontre du débiteur, en revanche, celui-ci oppose justement à la Société WEST AIR SWEDEN sa renonciation à la créance due au titre de l'article L. 621-32 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ; qu'en effet, par lettre de son Président adressée à la S.A. WEST AIR FR., la Société WEST AIR SWEDEN a, dans le cadre des dispositions arrêtées pour permettre la poursuite d'activité de la débitrice au cours de la période d'observation, pris l'engagement d'accepter si « au bout du compte » la trésorerie de la S.A. WEST AIR FR. de la période du 9 janvier au 28 février 2003 ne permettait pas de régler les dettes relevant de l'article L. 621-32 précité, d'accepter « d'ores et déjà d'abandonner » sa créance correspondant aux paiements décalés de la période, afférents aux factures émises ou à émettre en application du contrat de location et « d'y renoncer irrévocablement » ; que par suite, la Société WEST AIR SWEDEN qui ne soutient pas que la trésorerie de la S.A. WEST AIR FR. aurait permis le règlement de ses factures émises au cours de la période d'observation, ne peut en l'état de l'extinction de l'obligation qu'elle invoque, par l'effet de la remise volontaire de dette qu'elle a expressément consentie à la S.A. WEST AIR FR., opposer une quelconque compensation ; qu'il convient de réformer de ce chef, le jugement déféré ;
1) ALORS QUE, comme le soutenait la société WEST AIR SWEDEN dans ses conclusions, dans la lettre adressée par son Président à WEST AIR FRANCE, n'était accepté l'abandon de créance correspondant au montant des paiements décalés que dans la limite du plafond fixé à 100.000 € pour « le montant cumulé de ces décalages » ; qu'en considérant néanmoins pour infirmer le jugement ayant admis la compensation à hauteur de 184.841 €, à raison du défaut de paiement des factures correspondant à la période d'observation dont le règlement n'avait pas été effectué, que l'abandon de créance consenti concernait l'intégralité de cette somme et non au maximum le montant plafond de 100.000 €, la Cour d'appel a dénaturé cette lettre, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;
2) ALORS QUE, et subsidiairement dans ses conclusions d'appel, la société WEST AIR SWEDEN soutenait que la Société WEST AIR FRANCE n'avait pas eu à faire usage du décalage de trésorerie autorisé, celui-ci n'ayant pas été rendu nécessaire en raison de la situation de trésorerie de la société WEST AIR FRANCE, le paiement de la somme en cause ayant été expressément autorisé par le mandataire du redressement judiciaire qui avait attesté que le défaut de paiement n'avait été imputable qu'à une erreur dans l'exécution de ce paiement ; qu'elle produisait au soutien de ses conclusions une lettre du mandataire judiciaire confirmant l'autorisation du règlement et l'erreur à l'origine du défaut de paiement ; qu'en décidant que la société WEST AIR SWEDEN ne pouvait opposer la compensation car elle « ne soutient pas que la trésorerie de la S.A. WEST AIR FR. avait permis le règlement de ses factures émises au cours de la période d'observation » la Cour d'appel a dénaturé ces conclusions qui invoquaient la situation de trésorerie permettant le paiement des factures en cause, violant ainsi l'article 4 du Code de procédure civile.